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L’affiche ferroviaire en évolution

J.-P. Vantighem.

mercredi 21 août 2013, par rixke

Depuis sa création, la SNCB a toujours été un grand pourvoyeur de panneaux d’affichage. Il est vrai que l’affiche est depuis longtemps l’un des moyens d’expression publicitaire les plus marquants. Elle le reste aujourd’hui, malgré la poussée rapide des autres médias : presse (même parlée et télévisée), cinéma, dépliants de tout genre, etc.

Dans l’histoire de l’affiche ferroviaire, le curieux remarquera quelques " »arnières » intéressantes.

 De la litho au graphisme

A l’aube du siècle, la pierre lithographique est le moyen d’impression privilégié des affiches. Dans l’art de la gravure, les plus grands artistes brillent ; c’est la lignée des Signac, Toulouse-Lautrec et autres.

La photogravure se développe. Par application d’une trame en verre sur une plaque de zinc, les imprimeurs parviennent à donner d’un dessin en demi-tons une reproduction bien rendue avec des moyens étendus (tirage plus grand, etc.).

Les publicistes chargent donc des artistes de créer des motifs. L’affiche est alors, le plus souvent, un tableau surchargé de textes et sent la gouache ou l’aquarelle. L’affiche ferroviaire parle essentiellement de tourisme. Le premier virage important se dessine lorsque, sortie des écoles de dessin, une classe de « publicitaires » prend pied sur le marché. Ces hommes, nantis d’une formation plus spécifique, exploitent davantage les ressources nouvelles des techniques d’imprimerie, en particulier la quadrichromie. Bientôt, c’est le procédé offset qui prendra le pas sur les techniques classiques.

En même temps, les photographes apportent à la publicité un moyen d’expression qui, sans être pourtant nouveau, va renverser certaines valeurs acquises : les dessinateurs, pour maintenir leur position, se voient contraints de créer de nouveaux styles ou tout au moins de prendre leurs distances vis-à-vis du dessin purement figuratif.

Dans la même ligne, à l’heure actuelle, le « graphisme » pur gagne le terrain publicitaire. Il s’agit d’exprimer des idées en formes et en couleurs équilibrées, mais essentiellement par le biais de la symbolisation. C’est un métier nouveau.

 Les marchandises à l’honneur

Voilà trente ans, toutes les affiches avaient pour axe le tourisme. A l’époque, d’ailleurs, peu d’entreprises osaient déjà confier à des dessinateurs la création d’une vision imagée de leur activité industrielle. Aujourd’hui encore, ce thème fondamental occupe la première place. Pourtant, le transport de marchandises n’est plus tenu à l’écart. S’il fait l’objet de messages publicitaires dans des publications spécialisées, il a quand même eu les honneurs de l’affichage - y compris sur les grands panneaux urbains et routiers.

C’est un autre virage dans l’affichisme ferroviaire. Il n’est plus question de vendre des voyages ou des formules touristiques, mais de présenter au grand public une image nouvelle de la Société, une image de marque qui doit faire son chemin dans les esprits et y entretenir une certaine confiance à l’égard du prestataire de services. On le voit bien, d’ailleurs : les sujets choisis sont plus vastes. On a parlé, entre autres, d’un chemin de fer approvisionneur de soleil (en présentant les oranges fraîches amenées chaque matin à Bruxelles) ou encore d’un transporteur de masse (affiche « grande capacité »).

 Tout format

La troisième charnière remarquable est la diversification des formules. A côté du format standard utilisé depuis les premiers temps, le chemin de fer a fait flèche de tout bois. Avec les « flottants », ces affichettes suspendues aux filets à bagages dans les trains ; avec les 20 m2, grand affichage urbain et routier ; avec des affiches de formats très divers que l’on ne réserve plus au seul domaine ferroviaire, mais qui trouvent place aux « valves » des entreprises, des écoles, des centres d’information... en d’autres mots : qui vont à la rencontre de leur public, là où il se trouve.

Et n’oublions pas les autocollants, à la vogue desquels le chemin de fer a sacrifié parce qu’ils constituent un support exceptionnellement jeune, dynamique, mobile, efficace pour entretenir l’image de marque de la Société.

 Le baromètre

Chaque année, le service de publicité de la SNCB édite plus de 100 affiches, brochures, dépliants, sans compter les campagnes de presse qu’elle entreprend, les films qu’elle présente, les étalages qu’elle propose et bien d’autres prestations. L’affiche, cependant, reste un maître-support. Elle est le baromètre de l’action publicitaire des chemins de fer.

Ce qu’il y a de plus beau dans les voyages, ce sont les affiches des compagnies de chemin de fer...

Paul Morand

Par la brièveté de son message, par les impressions colorées qu’elle engendre chez le passant, elle synthétise tout le travail d’information accompli. C’est sans doute elle qui laisse le souvenir le plus durable. Les autres moyens d’expression ne la détrôneront probablement jamais : elle est plus permanente que le film, plus concise que la brochure, plus synthétique que le dépliant, plus présente que l’exposition, plus brillante que le communiqué de presse, plus parlante que le gadget.

Aujourd’hui, même, on la fait entrer au musée. C’est sa consécration.

Ajoutons - il faut se faire plaisir, quand c’est possible - qu’au musée de l’affiche, le chemin de fer est sans doute l’exposant le plus important. C’est un signe de la grande vitalité de ses actions publicitaires.


Source : Le Rail, avril 1977