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Piéton - Marchienne : une nouvelle section de ligne

LRG.

mercredi 19 mars 2014, par rixke

La SNCB a mis en service en 1984 une nouvelle section de ligne entre Piéton et Marchienne-au-Pont, section de près de 7 km établie en site entièrement neuf.

L’importance de cette modernisation dépasse largement le cadre régional : ce nouveau tronçon est en effet le plus important réalisé en site neuf depuis l’achèvement du réseau belge.

En outre, sa mise en service accélère sensiblement les relations, tant entre Mons et Charleroi que sur l’ensemble de la dorsale wallonne. En même temps, elle marque l’achèvement de l’électrification de cette dernière, dans son trajet le plus direct.

 Modernisation de la dorsale wallonne

S’étendant du Hainaut occidental à l’est de la province de Liège, de Mouscron à Welkenraedt, cet axe relie entre eux les centres urbains et les bassins industriels les plus importants du sud du pays. Le tronçon Namur - Charleroi avait été électrifié en 1959. Suivirent alors Namur - Liège en 1970, Mons - La Louvière en 1980 et Mons - Tournai - Mouscron en 1982.

La modernisation de la liaison La Louvière - Charleroi posait cependant un problème. En effet, la ligne classique avait été établie en tenant compte des sites industriels existant à l’époque, parmi lesquels de nombreux puits de mine, aujourd’hui désaffectés. D’où un tracé sinueux avec des courbes de faible rayon, divers passages à niveau, des zones de ralentissements permanents. Et partant, ... autant d’obstacles à la réalisation d’une liaison rapide, électrifiée, moderne, entre les centres concernés.

Il fut alors décidé d’électrifier la relation La Louvière - Piéton - Marchienne tout en réalisant d’importantes adaptations de l’infrastructure. C’est ainsi qu’à La Louvière, le « triangle de la paix » - assurant les liaisons entre Mons, La Louvière-Centre et Haine-Saint-Pierre - fut complètement réaménagé tandis que d’importantes rectifications de tracé, avec modifications d’ouvrages d’art intervenaient entre Haine-Saint-Pierre et Piéton. Les tronçons ainsi modernisés furent mis en service en mai 1983 [1]. Quant à la section Piéton - Marchienne, on opta pour un tracé entièrement neuf, beaucoup plus rectiligne que le précédent.

Ces divers travaux nécessitèrent une interruption totale des circulations sur la ligne 112 entre Haine-Saint-Pierre et Marchienne. Toutefois, les relations entre Mons et Charleroi qui transitaient déjà par Luttre et Manage purent, dès 1980, bénéficier de la traction électrique, du fait des électrifications La Louvière - Manage - Luttre et Manage - Braine-le-Comte.

 Une nouvelle ligne

Travaux de voie

L’origine du nouveau tronçon se situe, sur l’ancien tracé, juste au-delà de la bifurcation de la ligne 112a (Piéton - Roux via Trazegnies et Courcelles). Globalement orienté d’ouest en est, le nouveau tracé est beaucoup plus rectiligne que le précédent, les diverses courbes ayant un rayon au moins égal à 1800 m. La nouvelle section se raccorde à l’ancien tracé aux abords de la gare de Monceau-Formation, par une courbe de 500 m de rayon.

Ce tronçon a une longueur de 6,9 km, ce qui correspond à une réduction de plus de 4 km par rapport à l’ancien tracé. Entièrement à double voie sur tout son parcours, il ne compte aucun passage à niveau, la traversée des voiries communales ou de l’Etat ayant été réalisée par la construction de six passages supérieurs et quatre inférieurs. Le tronçon comporte un point d’arrêt, dénommé « Forchies » et situé à 3 km de Piéton.

nouveau point d’arrêt de Forchies, direction Marchienne

L’établissement de la nouvelle assiette des voies a exigé des travaux de terrassement fort importants :

1 320 000 m³ de déblais et 200 000 m³ de remblais. Des nappes d’eau situées à un niveau assez élevé furent rencontrées et il a même fallu les « rabattre » en deux endroits différents, afin d’assurer la stabilité permanente de l’assiette des voies.

Quant à ces dernières, elles sont constituées de rails longs posés sur des traverses en béton.

Bétonner des puits de mine

Un problème particulier a été posé par la traversée du site d’une ancienne mine, à hauteur du point d’arrêt de Forchies.

un des derniers autorails sur la ligne 112a

En effet, deux anciens puits sont situés sous les quais, tandis qu’un troisième se trouve à moins de 25 m au sud de l’assiette des voies : il a été nécessaire de stabiliser et d’étanchéiser la partie supérieure de ces trois puits en y implantant une assise de béton armé à cinquante mètres de profondeur. Par ailleurs, des galeries d’aération ont également dû être remblayées entièrement au moyen de béton. Pour mener à bien ces travaux, il a fallu creuser un nouveau puits d’accès vertical à partir duquel des galeries joignant les trois puits existants ont aussi été creusées. Après congélation du sol au-dessus et en-dessous des zones d’implantation des assises en béton, les volumes nécessaires ont été excavés et ensuite bétonnés. Après ces opérations, les galeries et le puits d’accès ont également été remplis de béton à la suite duquel a été injecté un isolant de sécurité.

Electricité et signalisation

Les caténaires équipant la nouvelle section sont alimentées au départ de la sous-station de traction de Piéton, tandis que la mise en parallèle avec les caténaires des lignes 124 (Charleroi - Bruxelles) et 124 A (Charleroi - Luttre) s’effectue via le poste de sectionnement de Marchienne-au-Pont.

Le tronçon est équipé du block-system automatique et bénéficie de la signalisation de voie normale et de contre-voie.

Par ailleurs un cable téléphonique pupinisé a également été posé sur cette nouvelle section.

 Aménagements complémentaires

Piéton

Située entre deux sections, l’une profondément remaniée et l’autre entièrement nouvelle, la gare de Piéton a, elle aussi, fait l’objet d’importants aménagements. Outre qu’un nouveau bâtiment voyageurs a été édifié [2], un couloir sous voies a également été construit entre les quais encadrant les deux voies principales, quais dont la longueur a été portée à 300 m. Par ailleurs un parking a aussi été aménagé.

Pour le trafic voyageurs, la gare dispose maintenant de trois voies de passage et d’une voie en cul-de-sac côté La Louvière, destinée à la desserte de la ligne 113. Les appareils d’entrée et de sortie de la gare et de son faisceau marchandises ont été remplacés tandis que tracé et profil des voies étaient rectifiés ou améliorés. Les blocks 4 et 5 anciens ont été désaffectés et remplacés par une nouvelle cabine « tout relais » installée dans le bâtiment voyageurs.

Par ailleurs, les passages supérieurs encadrant la gare ont été reconstruits compte tenu des nécessités du gabarit électrique tandis qu’on a quelque peu élargi la plate-forme des voies à la sortie de la gare, en direction de La Louvière (40 000 m³ de déblais). En direction de Marchienne, enfin, les voies ont été renouvelées et rehaussées jusqu’aux abords de la nouvelle section de ligne.

Marchienne

A Marchienne-au-Pont, deux aménagements doivent être mentionnés.

Un des chantiers a concerné la bifurcation des lignes 112 (vers Piéton) et 124 A (vers Luttre), bifurcation qui a été aménagée (suppression de dévers et remplacement d’appareils) pour pouvoir être franchie à 90 km/h sur les deux voies en direction de Piéton.

Par ailleurs, une « bifurcation anglaise » a été construite un peu au-delà de l’origine de la ligne 112, afin d’améliorer l’accès à la gare de Monceau-Formation pour les trains venant de Marchienne via cette ligne : après avoir quitté la voie vers Piéton par la gauche, ils passent sous les deux voies avant d’entrer en gare. On évite ainsi le cisaillement de la voie Piéton - Marchienne, toujours susceptible de perturber les circulations. Cet ouvrage est en outre utilisé pour la desserte de la gare de Monceau-Usines et de l’important raccordement de l’usine métallurgique du Ruau : ceci permet également de supprimer l’ancien cisaillement obligatoire de la ligne 112.

 Exploitation

Sept paires de trains de voyageurs ont, dès janvier 1984, emprunté chaque jour de la semaine cette nouvelle section de ligne qui, compte tenu de ses caractéristiques, peut être parcourue à 120 km/h.

automotrice du service L à Piéton

Mais depuis le 3 juin, 36 relations, cadencées pour la plupart, sont assurées chaque jour de la semaine entre La Louvière et Charleroi (35 en sens inverse).

Parmi celles-ci on compte, par sens, 16IC Liège-Mouscron, qui peuvent profiter pleinement des infrastructures nouvelles ou modernisées comme de certains autres changements : la liaison Mons - Charleroi (indicateur : tableau 54) est maintenant effectuée en 28 minutes (contre 45 auparavant) tandis que le trajet Liège - Mouscron est actuellement parcouru en 2 h 24, soit un gain de près d’une heure. Quant au trafic marchandises régional, il concerne essentiellement Bascoup, Anderlues et Fontaine-l’Evêque (une voie de l’ancienne ligne 112 a été maintenue jusqu’à cette dernière localité à partir de Piéton, le reste de l’ancienne infrastructure ayant été intégralement démonté).

ligne 112 à hauteur de la bifurcation vers Monceau-Formation

La desserte, axée sur la gare de Monceau-Formation, s’effectue normalement par emprunt successif des lignes 112 a (spécialisée au trafic marchandises) et 112.

Nouvelle section de ligne, plus rapide et électrifiée, signalisation de contre-voie, et équipement de commande moderne, possibilité d’utiliser des itinéraires auxiliaires, fluidification des circulations dans la zone de Marchienne - Monceau ... Dans l’ensemble les modernisations intervenues améliorent l’image et les possibilités du chemin de fer dans la région, grâce aux meilleurs services qu’il peut offrir au public. En même temps, elles permettent aux cheminots d’effectuer leur travail dans de meilleures conditions et de façon plus efficace.


Source : Le Rail, février 1985

Portfolio


[1Voir Le Rail d’octobre 1983.

[2Voir le Rail d’octobre 1983.