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Les buffets de gare

A. Buskens.

mercredi 6 août 2014, par rixke

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Aujourd’hui, on désigne indifféremment par « buffet » une longue table que l’on dresse en certaines occasions pour servir à boire et à manger, et l’endroit où l’on se restaure dans une gare. Le mot, forgé au XIIe siècle déjà, répond maintenant à une idée de collation prise debout, à la sauvette. Mais les clients de nos buffets ont à ce sujet une opinion toute différente de celle du commun des mortels. Sans doute, pour une certaine littérature, un buffet de gare est-il toujours un lieu bruyant, riche en courants d’air et en appels de haut-parleurs où l’on se presse, où l’on se bouscule, avalant de travers un repas « standard » ou des boissons trop chaudes. Ce cliché est aussi démodé que la toile du peintre français Droz : « Un buffet de chemin de fer en 1864 » ! Nous n’en sommes plus là ! Nos buffets ont de tels attraits qu’ils ont maintenant une clientèle fidèle, soucieuse de ses aises, prisant la bonne chère et sensible à cette atmosphère particulière qu’on ne rencontre que dans les gares.

Lorsque fut créée en 1926 la Société nationale pour gérer le réseau de l’Etat belge suivant des méthodes industrielles, peu de gares avaient un buffet disposant d’installations adéquates. C’était le plus souvent dans des salles d’attente que les buffets étaient exploités, autrement dit dans des locaux qui n’avaient pas été conçus pour devenir des restaurants. Pas question d’exploitation rationnelle !

La S.N.C.B. profita de la reconstruction de ses bâtiments détruits par la guerre ou de leur modernisation pour doter de locaux appropriés les gares où l’installation d’un buffet répondait aux désirs de la clientèle. Sans doute, en raison de l’exiguïté du territoire et de la fréquence des communications, la plupart des buffets de gare ne devaient pas avoir chez nous la même importance que celle des grands buffets d’Allemagne, de France ou d’Italie, où les distances sont considérables et où les clients aiment de couper leur voyage dans les gares de coïncidence pour s’y restaurer à l’aise.

Toutefois, à Bruxelles, les besoins de la clientèle exigeaient que l’on fît aussi bien que dans les grands centres européens. L’achèvement de la Jonction permit de faire en sorte qu’il en soit ainsi dans les trois nouvelles gares.

A Liège.

Les buffets poursuivent un double but : rendre service aux voyageurs et apporter au chemin de fer des recettes accessoires. Plus ils rendent service, plus ils rapportent. Les quantités de marchandises qu’ils débitent laissent rêveur. Pour ne citer qu’un seul exemple, au buffet de Bruxelles-Midi, qui dispose de 750 places « assis », il est débité bon an mal an 1.250.000 verres de bière, 600.000 filtres et tasses de café, 350.000 bouteilles de limonade, 30.000 litres de lait, 125.000 œufs, 500.000 sandwiches, 6.000 poulets, 20.000 kg de viande et 10 wagons de pommes de terre.

A Bruxelles-Nord.

En Belgique, on exploite les buffets de gare suivant deux formules : la première, que l’on retrouve d’ailleurs sur les autres réseaux, est la formule de l’affermage. La seconde est l’exploitation directe par la S.N.C.B., appelée aussi, à tort, exploitation « en régie ».

Pour les buffets exploités par affermage, les concessionnaires sont généralement désignés par voie d’adjudication restreinte. On retient seulement les candidats ayant une expérience suffisante du métier et offrant des garanties aux points de vue de la moralité et de la solvabilité et, lors de l’adjudication, on choisit l’offre la plus élevée concernant la redevance fixe à payer par le concessionnaire. Il est entendu qu’au fixe mensuel s’ajoute un pourcentage du chiffre d’affaires réalisé. Celui-ci est généralement fixé à 10 % de la recette, sauf sur les articles fumeurs, pour lesquels il est de 5 %.

Ambiance d’autrefois...

Il appartient au concessionnaire désigné de fournir tout le matériel d’exploitation indispensable, à l’exception du mobilier (comptoir, tables et chaises), qu’il trouve sur place et qui est la propriété de la S.N.C.B.

... et d’aujourd’hui.

Dans l’exploitation « en régie », la S.N.C.B. engage par contrat un spécialiste de l’industrie hôtelière qui prend la direction du buffet et recrute tout le personnel nécessaire pour mener à bien la gérance qui lui est confiée. Elle met à sa disposition des locaux entièrement équipés en mobilier et en matériel (appareils de cuisson, machines culinaires, vaisselle, verrerie, argenterie, linge de table et de cuisine, caisses enregistreuses, etc.). C’est encore la S.N.C.B. qui désigne les fournisseurs auprès desquels le gérant s’approvisionnera. Pour les choisir, elle tient notamment compte de l’importance des transports de marchandises que les firmes susceptibles de fournir confient au chemin de fer.

Tout le personnel des buffets « en régie » est soumis au statut de l’industrie hôtelière. Il ne s’intègre donc pas dans le personnel statutaire de la S.N.C.B., mais ses contacts avec les hommes et les clients du rail le font participer à l’esprit cheminot.

Cette formule offre des avantages multiples tant pour le voyageur que pour la Société nationale.

Des mets de réveillon !

Le réseau des chemins de fer belges compte actuellement 90 buffets ; 83 sont donnés en concession et 7 sont exploités directement par la Société nationale.

Les buffets de gare ont également un rôle important à jouer dans la propagande touristique et hôtelière du pays. En effet, le buffet est l’établissement que le touriste fréquente généralement en premier lieu lorsqu’il débarque. C’est là qu’il recueille ses premières impressions - bonnes ou mauvaises - sur l’industrie hôtelière du pays visité.


Source : Le Rail, janvier 1964