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Genk direct

J. Van Goethem.

mercredi 14 octobre 2015, par rixke

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 Un peu d’histoire

Le 27 mai dernier, la mise en service de l’antenne ferroviaire vers Genk a ajouté un nouveau chapitre à l’histoire déjà fort longue de la ligne 21. Celle-ci remonte en effet au 6 octobre 1839, date à laquelle a été inauguré avec les fastes habituels et en présence du roi Léopold I, le premier tronçon Landen - Saint-Trond de la ligne 21 actuelle, qui était en même temps la première ligne ferroviaire vers le Limbourg.

Par la suite, il fallut attendre 1847 pour que la voie unique fût prolongée jusqu’à Hasselt, capitale de la province.

Après étude des différentes alternatives, et sous la pression des fabricants de liqueurs — l’industrie la plus importante du Limbourg —, compte tenu aussi des innombrables pétitions émanant de Hasselt et de la Campine, la construction et la concession du tronçon Saint-Trond - Hasselt furent finalement confiées par arrêté royal du 19 mai 1845 à la société britannique Mackenzie et Barry, qui exploitait déjà la ligne Orléans - Bordeaux. Par contre, la malchanceuse ville de Tongres allait être obligée d’attendre l’année 1863 pour voir arriver ce train, souhaité depuis si longtemps. C’est en 1863 en effet que fut mise en exploitation la section Tongres - Bilzen. Lors de l’extension ultérieure du réseau ferroviaire limbourgeois, ce fut enfin le tour de l’arrondissement de Maaseik. Les polémiques au sujet de cette relation qui, à un certain moment, fut même considérée comme une partie de la ligne Paris - Berlin, ne manquèrent pas et durèrent de 1865 à 1871. Finalement, cette relation ne franchit jamais la Meuse.

Lorsque le 3 mars 1874 — soit il y a plus de cent ans — eut lieu l’inauguration du tronçon Hasselt - Maaseik, c’est-à-dire la dernière partie de la ligne 21, c’était la première fois qu’un train entrait à Genk, que l’on orthographiait à cette époque « Genck ».

 Une évolution remarquable

Première phase

Au début de notre siècle, la commune de Genk, située au cœur du Limbourg, à 13 km seulement de Hasselt, comptait à peine 2500 habitants et constituait jusqu’alors une région presque déserte. L’extraction du charbon campinois, qui débuta à ce moment, allait transformer la région en très peu de temps et marqua le départ de l’industrialisation de la région limbourgeoise. Cela impliquait en même temps une adaptation radicale de l’infrastructure ferroviaire aux alentours de Genk.

Dès avant la première guerre mondiale, tout était mis en œuvre pour raccorder les charbonnages au réseau ferroviaire. Aussi, la ligne précédemment construite et qui traversait Genk perdait graduellement de son importance, alors que petit à petit naissait un tracé qui évitait le centre de la commune et se dirigeait vers As, via Winterslag, Zwartberg et Waterschei. Ce tracé fut entièrement mis en exploitation en 1925. Le trafic « voyageurs » lui aussi fut dévié du centre de Genk et complètement adapté au transport des mineurs vers les différents charbonnages. Entre-temps, la population de Genk s’est sensiblement accrue, suite aux immigrations massives de la main-d’œuvre venue de l’étranger. Par rapport à 1900, elle avait pratiquement décuplé en 1930 : 24574 habitants !

Etant donné que la majeure partie du potentiel ouvrier de Genk a trouvé un emploi dans la région, le trafic qui s’y est développé était surtout d’ordre local. Pendant la deuxième guerre mondiale, la ligne vers Genk fut même jugée inutile et en 1942-1943, elle fut démontée.

Deuxième phase

A partir de 1956, lentement mais sûrement se dessine le déclin des charbonnages campinois. Grâce à l’intervention active des autorités, une reconversion est réalisée et l’on assiste à la naissance d’une deuxième période, qui voit le développement prodigieux de la zone industrielle Genk Sud, en bordure du Canal Albert.

En 1970, Genk et sa région offraient 29500 emplois, dont 77 % dans le secteur secondaire. Malgré cette évolution favorable, il faut cependant tenir compte du fait que la mécanisation progressive des usines amène une stagnation de la demande de main-d’œuvre dans le secteur industriel ; en outre, il ne faut pas oublier qu’on a affaire ici à une population très jeune : 40 % ont moins de 17 ans, ceci d’après les données de 1970.

A l’heure actuelle, le chiffre de la population de Genk atteint à peu près le même niveau que celui de Hasselt et il est sensiblement plus élevé que celui des autres villes et communes du Limbourg. Les chiffres de 1978 sont éloquents :

  • Hasselt = 63681 habitants
  • Genk = 61 313 habitants
  • Saint-Trond = 36129 habitants
  • Beringen = 33039 habitants

II est à prévoir que de plus en plus de main-d’œuvre affluera vers le secteur des services, ce qui va exiger toutefois un sensible développement du transport « voyageurs » ferroviaire à Genk.

C’est pour répondre à cette demande que la construction d’une ligne ferroviaire vers le centre de Genk a été envisagée à nouveau et inscrite au plan décennal 1970-1979 concernant la modernisation du réseau ferroviaire. Voilà pourquoi depuis le 27 mai 1979, après une interruption de quelque quarante ans, le centre de Genk est à nouveau desservi par des trains voyageurs.

 Infrastructure

La double voie électrifiée Hasselt - Genk (vitesse de référence 120 km/h) quitte la ligne existante Hasselt - As à hauteur de Boksbergheide. La longueur de ce nouveau tronçon est d’environ 2,4 km. Disons en passant que depuis l’électrification du tronçon Hasselt - Genk, le réseau électrifié s’est agrandi d’environ 15,8 km.

Le lecteur non initié sera sans doute étonné d’apprendre que la construction de ces 2,4 km de ligne ne fut pas un travail des plus simples.

En effet, en plus de l’électrification proprement dite de la double voie entre Hasselt et Genk, il y avait aussi les traditionnels travaux de terrassement. Et ils s’avérèrent relativement importants parce que lors du déblaiement de l’assiette sur plusieurs centaines de mètres, de grandes différences de niveau — 10 m par endroit — ont dû être éliminées. En outre, il a fallu construire quatre ouvrages d’art, dont un pour un passage inférieur sous la ligne 21C Winterslag - Bilzen (travées ± 12,2 m), un autre pour le passage inférieur sous la Tennislaan (travée 13 m), un troisième pour le passage inférieur sous la Vennestraat (travée 22 m) et, enfin, un dernier pour le passage supérieur au-dessus du Westering (travée 56 m). Méritent encore d’être cités, les travaux réalisés en vue de :

  • l’amélioration du tracé de la courbe vers la bifurcation Nord du triangle ferroviaire de Hasselt, permettant d’augmenter la vitesse à cet endroit ;
  • la modernisation de la signalisation avec signaux lumineux pourvoies normales et contre-voies sur tout le tronçon, avec instauration du système de block automatique entre les bifurcations de Zonhoven et de Boksbergheide, entraînant l’adaptation de la signalisation (block 19) à Hasselt ainsi que l’établissement d’une cabine tout-relais provisoire dans le block 5 Boksbergheide (à intégrer ultérieurement dans la cabine nodale projetée block 6 Winterslag) ;
  • l’adaptation et l’équipement nécessaire des points d’arrêt de Kiewit et de Bokrijk ainsi que la construction d’un point d’arrêt supplémentaire « Boksbergheide » ;
  • la construction de la nouvelle gare tête de ligne de Genk.

 La gare de Genk

Le terminus de la ligne a été choisi à l’endroit le plus central possible de la ville, soit à ± 250 m du centre d’habitation et des centres administratif et culturel de Genk.

La gare de Genk comporte trois voies à quai. La longueur utile des quais est respectivement de 420 m (voie I) et de 360 m (voies II et III). Si cela s’avère nécessaire, la construction d’une voie supplémentaire avec quai est toujours possible.

Les quais, recouverts en majeure partie d’une marquise (sur toute la largeur de la gare), sont accessibles à partir d’un terrain souterrain, situé au niveau de la place de la gare, grâce à des escaliers fixes et roulants. En même temps, on s’est préoccupé des handicapés : les quais leur seront accessibles grâce à un ascenseur incorporé dans le mur de soutènement du quai I. Le bâtiment des recettes comprend deux parties séparées couvrant ensemble une superficie de quelque 500 m2. Le plus grand bâtiment se compose d’un hall spacieux, du bureau des guichets, d’un magasin à marchandises, des installations sanitaires et des locaux pour le personnel de la gare. Dans la deuxième partie a été installé le buffet de la gare. A proximité de ces bâtiments ont été prévus un parking pour environ 70 voitures ainsi que l’emplacement nécessaire pour la mise en dépôt des vélos et des vélo-moteurs.

Comme Genk constitue aussi une importante escale pour les autobus de la région, on a construit devant la gare une gare d’autobus couverte groupant 13 quais, avec chacun un emplacement pour deux autobus.

 En chemin de fer de et vers Genk

La situation et le branchement de la ligne se prêtent très bien à une desserte basée sur le service de trains existant Bruxelles - Hasselt via Louvain et Landen prolongé jusqu’à Genk. Pour cette relation, on a élaboré un service cadencé se présentant de la manière suivante : toutes les heures, et dans chaque direction, une relation semi-directe Bruxelles - Genk et une relation omnibus Hasselt - Genk. Pendant les heures creuses, quelques relations omnibus sont toutefois supprimées. Un parcours de Genk à Hasselt, sans arrêt intermédiaire, dure 13 minutes (vitesse moyenne : 72,6 km/h) ; Bruxelles-Nord est atteint en 1 h 30. Un train omnibus couvre la distance Hasselt - Genk en 18 minutes (vitesse moyenne : 54,4 km/h) avec des arrêts à Kiewit, Bokrijk et Boksbergheide. Chaque jour ouvrable, entre ± 5 h 30 et ± 23 h 30, Genk est desservi par quelque 80 trains. Pendant les week-ends, ce nombre est diminué d’environ un quart par l’instauration d’un service « toutes les deux heures » pour les trains omnibus. La plupart des services sont assurés par des rames automotrices.

 Projets d’avenir

Le prolongement et l’électrification de la ligne 21 jusqu’au centre de Genk ne constitue nullement le point final de la modernisation du réseau ferroviaire limbourgeois. Un aperçu des améliorations proposées, dont plusieurs sont en cours d’exécution, prouve le contraire :

  • l’électrification des lignes 35 et 16 qui entraînera des relations meilleures et plus rapides entre Anvers et Hasselt ;
  • l’électrification de la ligne 34 vers Tongres et, au-delà, vers Liège ;
  • l’augmentation de la vitesse sur le tronçon Mol-Neerpelt : de 90 à 120 km/h ;
  • l’augmentation de la vitesse entre Mol et Hasselt : de 70 à 90 km/h ;
  • l’augmentation de la vitesse entre Hasselt et Landen : de 100 à 120 km/h, ainsi que la pose d’une seconde voie électrifiée entre Hasselt et Alken.

 Mise en exploitation du tronçon Hasselt – Genk

A l’occasion de la mise en exploitation de ce tronçon, un tout nouveau service, basé sur les principes suivants, a été projeté :

  • Les jours ouvrables
    • Service de base
      • un train direct par heure = la prolongation du train semi-direct Bruxelles - Hasselt
      • un train omnibus par heure entre Hasselt et Genk
    • Service de pointe
      • quelques trains supplémentaires entre Bruxelles et Hasselt sont prolongés jusqu’à Genk
  • Les samedis/dimanches
    • un train direct par heure (comme les jours ouvrables)
    • un train omnibus toutes les deux heures

 Schéma de base

Trains directs

Chaque heure
Hasselt A.02
D.07
Genk 20
Genk 46
Hasselt A.59
D.04

Trains omnibus

Chaque heure
Hasselt 40
Kiewit 46
Bokrijk 50
Boksbergheide 53
Genk 8
Genk 06
Boksbergheide 11
Bokrijk 14
Kiewit 18
Hasselt 24

Pendant les mois d’été, certains trains directs intéressants font également arrêt à Bokrijk.


Source : Le Rail, juillet 1979

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