Accueil > Le Rail > Infrastructure > Gare > Bruxelles Tour et Taxis, une des grandes gares de la capitale

Bruxelles Tour et Taxis, une des grandes gares de la capitale

G. Feron.

mercredi 15 juillet 2015, par rixke

Toutefois, les gares éprouvaient de grosses difficultés à assurer le service des messageries. L’administration des chemins de fer décida alors de créer, à proximité des entrepôts, une grande gare spécialisée. Ainsi débuta l’histoire de Tour et Taxis. Les deux installations furent inaugurées en 1907. Les renseignements concernant la conception et la construction de la gare sont rares.

Par conséquent, les données qui suivent sont présentées avec les réserves d’usage.

L’architecte de l’entrepôt est vraisemblablement Ernest Van Humbeek et certains auteurs lui attribuent également les plans de la gare. Les deux complexes ont des affectations et des styles bien différents, ce qui nous amène à admettre d’autres sources selon lesquelles la gare aurait été conçue par les architectes C. Bosmans et H. Vandeveld (à ne pas confondre avec Henry Vandevelde, le contemporain et adversaire de Horta).

Une certitude toutefois : les plans furent approuvés par l’ingénieur Frédéric Bruneel alors ingénieur en chef des chemins de fer de l’Etat. Ce haut fonctionnaire est surtout connu pour ses plans de la jonction nord-midi, approuvés en 1901.

De grandes gares furent construites à la fin du 19e siècle et au début du 20e. A cette époque, les chemins de fer connaissaient un succès croissant et permanent.

Ils contribuaient au développement et au prestige des localités desservies et rendaient les plus grands services au commerce et à l’industrie. Les villes considéraient les gares comme la porte de la cité et il était de bon ton, pour des raisons de prestige, de les construire comme des cathédrales. Les styles allaient du néo-gothique au néo-classique en passant par le néo-renaissance. Du moment que c’était néo-quelque chose ! Il n’y eut cependant pas de gare en style néo-roman. Pour citer quelques exemples, il y eut Anvers central, néo-classique du Brugeois de la Censerie ; Gand St-Pierre, conçue par le professeur Cloquet et qui était destinée à être une gare de passage pour l’exposition de 1913 en remplacement de la gare classique en impasse de Gand Sud.

Gand St-Pierre possède un style indéfinissable à la fois néo-classique, un peu maritime, un rien anglais.

Schaerbeek, quant à elle, fut réalisée en deux étapes à cheval sur les deux siècles.

L’architecte Franz Seulen, un Limbourgeois, la conçut néo-renaissance de type flamand. Grand admirateur de Gustave Eiffel, il donna une armature métallique à la seconde partie du bâtiment des recettes et fit en sorte que celle-ci soit apparente. Mais comment définir le style de la gare contemporaine de Bruxelles TT ? On peut y déceler une nette influence française, sans pour autant nier des caractéristiques belges. On pourrait la classer dans la catégorie néo-renaissance et à l’avant-garde du jugendstil avec toutes ses ferronneries et tourelles. Destinée au service marchandises, cette gare est restée une vieille dame élégante dont l’affectation fut aussi brève que limitée dans le domaine des voyageurs, des navetteurs plus particulièrement.

Avant la Première Guerre mondiale, on pouvait y voir débarquer les paysans des environs de Kortenberg avec leur production laitière. Un parlementaire local obtint même que ces trains arrivent au Nord comme les autres.

L’appellation de la gare Bruxelles TT n’a jamais rien eu à voir avec un quelconque service de taxis. Ce nom résulte du fait que la gare fut construite sur des terrains marécageux ayant appartenu à l’illustre famille de Tour et Taxis. En 1490, cette famille obtint, avec l’accord de l’empereur Maximilien d’Autriche, le monopole du trafic postal en Europe. Ce privilège fut confirmé en 1505 par Philippe Le Bel et la famille posséda de nombreux biens et immeubles dans la capitale jusqu’à la fin de 1905 ; son nom survit dans la gare.

La gare a une étendue de ± 30 ha et est complètement entourée de grillages fermés à certaines heures. On y compte 12 voies dans le hangar à marchandises, 26 dans l’entrepôt, 14 à la cour et quelques voies sur les deux rives du bassin Vergote.

On y travaille jour et nuit.

La longueur totale des voies de la gare et de l’entrepôt est de 23 km. Depuis le 18 novembre 1976, Bruxelles TT dispose d’un container-terminal. L’entrepôt des douanes a une superficie de 80 000 m2 auxquels il faut ajouter 19 000 m2 de caves dans lesquelles sont entreposés les vins et spiritueux. Des entreprises privées peuvent disposer de 30 000 m2 le long de la rue Picard comme entrepôt provisoire et les installations TIR qui furent établies à Bruxelles entrepôt n’ont cessé de se développer depuis 1950. Bruxelles TT dispose en outre d’une flotte de véhicules routiers qui assurent la prise et remise à domicile des colis dans une zone de 650 km2.

Nous avons déjà fait allusion tantôt à la liaison nord-midi par la ceinture ouest. On y trouvait des gares généralement autonomes. Actuellement, la plupart sont devenues dépendances de Bruxelles TT.

 Les gares de la ceinture ouest

Bruxelles Petite-Ile

C’est une gare à marchandises bâtie sur le territoire d’Anderlecht. C’est là qu’en 1934 arrivaient les trains spéciaux amenant les anciens combattants de 14-18 pour assister aux funérailles du roi Albert. C’est de là également que partit en 1940 le train des « Suspects » vers Abbeville. L’imprimerie, le dépôt central des imprimés et l’atelier de publicité de la SNCB y sont logés.

Bruxelles Ouest

II s’agit de la gare de Molenbeek St-Jean qui est actuellement ouverte aux seules marchandises. Les bâtiments et les faisceaux datent de la fin du 19e. Ils servaient aux petites et moyennes entreprises de la commune qui recevaient leurs matières premières par train (charbon, houblon, bière, etc). C’est également de cette gare que partaient les trains entiers de pigeons destinés aux concours de Barcelone, Narbonne, Angoulême et autres.

Aujourd’hui, la gare de l’Ouest s’est spécialisée dans les transports combinés rail-route. On y trouve les wagons-kangourous ou piggybags. Quelques voies ont été supprimées pour faciliter la construction du métro avec gare pour la ligne de la place Ste-Catherine au palais du Centenaire.

Cureghem

Cureghem se trouve également sur le territoire d’Anderlecht. C’était autrefois une dépendance de Bruxelles Ouest. Il y avait deux voies et deux quais avec, de chaque côté, un imposant bâtiment de style classique en pierre de taille. D’un côté des voies coule le canal de Charleroi à Bruxelles, de l’autre s’étend la place E. Vandervelde.

Simonis-Koekelberg

Elle se trouve à proximité de la Place Simonis, de l’avenue de la Liberté et de l’avenue de Jette. A l’époque du roi Léopold II, on ne trouvait aucun tram dans le quartier. Le chemin de fer y bâtit une gare comparable à celle de Cureghem qui disparut en 1920 avec l’apparition des premiers tramways bruxellois.

Pannenhuis

La gare se trouve en bordure de la commune de Jette. En 1830, on trouvait à cet endroit une guinguette où les volontaires de la Révolution venaient déguster une bière pour faire « passer » la poudre à canon. Le métro y dispose d’une jolie gare qui a repris le nom de Pannenhuis, qui signifie « toit de tuile ». A la sortie de la gare se trouve la bifurcation qui, vers la gauche, dirige les trains vers Denderleeuw et Termonde. Celle de droite les dirige vers Laeken. On y trouve également le raccordement de Bruxelles TT et de l’entrepôt. Dans les premières années de l’exploitation du réseau, il fallait passer par Malines pour aller de Bruxelles Nord à Gand. En 1856, une liaison fut créée par Jette et Denderleeuw.

Ce n’est qu’en 1933, en prévision de l’Expo de 1935, qu’une ligne directe Bruxelles Midi - Gand via la vallée de la Pede fut réalisée.

Bockstael

Située sur le territoire de la commune de Laeken, à proximité de la Place du même nom, Bockstael est une nouvelle gare commune train-métro. Elle est située à quelques centaines de mètres de la gare de Laeken, dont elle entraîna la fermeture.

Laeken

Dès 1856, Laeken disposa d’une gare. Ce n’était qu’une modeste construction à proximité du passage à niveau de l’avenue de la Reine, remplacée plus tard par un tunnel. Une nouvelle gare avec quais et abris fut créée en 1880.

La gare royale

Celle-ci fut vraisemblablement créée à l’initiative de S. M. le Roi Léopold II, particulièrement féru de chemins de fer. Le bâtiment, classique et sobre, fut enjolivé en 1884 de quelques statues du sculpteur Jean Herain. Le Roi avait fait également établir un raccordement ferré jusqu’au Palais de Laeken avec une gare terminus. Sa Majesté comptait le faire exploiter en traction électrique. Dans ce but, II avait commandé une loco électrique au Titan Anversois.

Voici à nouveau le canal. Un pont fixe remplace le pont mobile du début du siècle. Au-delà, les voies se séparent comme les doigts d’une main pour se diriger vers Schaerbeek et sa formation, Liège, Namur, Anvers et Bruxelles Nord.

Ici, il faut reparler brièvement de Tour et Taxis car un de ses anciens départements, le centre européen d’importation de fruits et légumes, en quelque sorte un marché matinal a élu domicile à côté du pont Van Praet à Schaerbeek.


Source : Le Rail, décembre 1988