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Un organe paritaire international : Le Comité paritaire des chemins de fer de la Communauté Européenne

Jean-Paul R. Preumont.

mercredi 20 janvier 2016, par rixke

A côté des nombreux groupes où les chemins de fer européens réfléchissent à leur avenir, il est un comité officiel, institué par la Commission des Communautés européennes pour permettre aux partenaires sociaux de participer à l’élaboration de la politique sociale communautaire. Le Comité paritaire des chemins de fer a pour tâche de contribuer à l’amélioration et à l’harmonisation des conditions de vie et de travail dans les chemins de fer.

La Commission des Communautés européennes a ainsi créé trois comités consultatifs, chacun se rapportant à un mode de transport : l’un pour la route, le deuxième pour la navigation intérieure, le troisième, enfin, pour les chemins de fer.

Pourquoi des comités paritaires dans les transports et pas dans tous les autres secteurs d’activités économiques ? Tout d’abord, il existe de semblables organes dans les branches importantes de l’industrie. Le Comité économique et social est lui-même un organe interprofessionnel où les différents acteurs de la vie économique et sociale participent au processus d’intégration européenne. Ensuite, il faut savoir que la libre circulation des travailleurs dans la Communauté Européenne équivaut à l’assujettissement aux règles et conditions de travail en vigueur dans le pays où le travail est exécuté et que le transport international est quant à lui, effectué par des travailleurs non résidents (les prestations s’exécutent, en grande partie, dans d’autres états) sur la base des conditions de travail et de rémunération de leur pays d’origine.

C’est la raison pour laquelle ces comités ont normalement pour mission d’œuvrer au rapprochement des dispositions sociales applicables dans les trois modes de transport. Notons au passage, une nuance importante qui affecte depuis le départ les travaux du Comité paritaire : il n’est pas question de vouloir harmoniser les conditions de vie et de travail des douze chemins de fer européens avant que l’harmonisation des conditions sociales au sein du secteur routier et de la navigation intérieure n’ait été réalisée. Cela est très logique. En fait, les chemins de fer disposent de réglementations sociales effectivement et strictement appliquées dans l’intérêt de leurs personnels et de la sécurité de leurs usagers, ce qui n’est pas nécessairement le cas dans les autres modes de transport. Aussi, tant que le rapprochement des conditions de concurrence entre les différents modes de transport n’aura pas été réalisé, le Comité paritaire des chemins de fer ne se préoccupera pas des questions d’harmonisation sociale entre les entreprises ferroviaires.

 Pourquoi un comité paritaire ?

Au sein de la Communauté européenne, les partenaires sociaux sont de plus en plus associés à l’élaboration de la politique sociale et à l’amélioration des différents modes de vie. Les comités paritaires constituent dès lors un moyen très approprié pour assurer cette participation : il s’agit d’organes, représentatifs au niveau communautaire, des forces socio-économiques concernées. Le Comité paritaire des chemins de fer est consulté par la Commission lors de chaque grand projet pouvant affecter soit les chemins de fer eux-mêmes, soit les conditions de concurrence entre les modes de transport (ce qui revient à dire qu’il doit être consulté à l’occasion de tous les projets affectant le transport terrestre).

 Composition

Le Comité paritaire comprend 54 membres : 27 représentants des chemins de fer et 27 représentants des syndicats de cheminots. 24 représentants des employeurs (deux par pays) sont choisis par la Communauté européenne des chemins de fer (Groupe des Douze chemins de fer de la CEE), et 24 représentants des travailleurs (2 par pays) sont choisis par le Comité syndical des transports dans la Communauté européenne. Les 6 derniers membres (3 employeurs et 3 travailleurs) sont directement désignés par la Commission des Communautés européennes après consultation des organes patronaux et syndicaux.

Tous les deux ans, le Comité élit son président et son vice-président, alternativement, parmi les représentants des employeurs et des travailleurs.

 Groupes de travail

Le Comité paritaire se réunit, en principe, une fois par an.

Un tel rythme de travail est totalement insuffisant pour assurer l’efficacité et la rapidité des prises de position des partenaires sociaux sur des sujets importants d’intérêt communautaire. Pour faciliter les travaux, il a donc été nécessaire de constituer des groupes de travail qui fonctionnent de façon permanente. Deux groupes ont ainsi été créés :

Premier groupe : « aspects sociaux de la politique européenne des transports »

Ce groupe de travail a pour mandat de se tenir informé et de réagir pour autant que de besoin, à toutes les initiatives communautaires en matière de transport (route, navigation intérieure, chemin de fer) :

  • En se préoccupant, notamment, de leurs répercussions sur les conditions de concurrence ;
  • En veillant à faire valoir le point de vue des chemins de fer suffisamment tôt.

Il doit dès lors apporter une attention particulière aux travaux :

  • De la Commission européenne (et spécialement de la Direction générale des transports) qui a pour mission de proposer au Conseil des Ministres de la Communauté toutes mesures utiles au développement des politiques communes et à la réalisation du marché intérieur ;
  • Du Parlement européen (et spécialement de la Commission des transports), puisqu’il doit donner son avis sur toutes les propositions de la Commission avant que le Conseil des Ministres soit appelé à se prononcer ;
  • Du Comité économique et social de la Communauté (et spécialement de la Section transports et communications), à qui sont également transmises, pour avis, les propositions de la Commission ;
  • Du Comité des représentants permanents (COREPER) et spécialement de son Groupe des questions de transports, qui coordonne les travaux préparatoires du Conseil des Ministres de la Communauté.

De plus, dans le cadre du rapprochement des conditions de concurrence entre les trois modes de transports et en vue de l’organisation de réunions conjointes des trois comités paritaires, le Premier groupe de travail doit également suivre les activités des deux autres comités paritaires « navigation intérieure » et « route ».

Le premier groupe ne se réunit que deux ou trois fois par an, mais l’ampleur du travail exige que les rapporteurs se rencontrent une fois par mois.

Second groupe : « aspects sociaux de l’introduction des nouvelles technologies (transports ferroviaires à grande vitesse) »

Ce groupe de travail a pour mandat d’examiner :

  • Les problèmes de formation du personnel au point de vue technologique et commercial ;
  • Les problèmes de sécurité et de santé du personnel ;
  • Les problèmes de sécurité des circulations ;
  • Les répercussions sur le volume total de l’emploi.

 Fonctionnement

A la demande de la Commission ou de sa propre initiative, le Comité paritaire des Chemins de fer transmet ses avis à la Commission des Communautés européennes (si ceux-ci ne faisaient pas l’objet d’un accord unanime, les opinions divergentes exprimées devraient également être transmises) ainsi qu’au Conseil des Ministres.

Plusieurs avis importants, élaborés par le Premier groupe de travail, ont été adoptés à l’unanimité par le Comité paritaire :

  • Avis sur les aspects sociaux de la politique européenne des transports (novembre 1986) ;
  • Mémorandum sur la politique commune des transports (novembre 1986) ;
  • Conclusions sur l’accès au marché des transports par routes entre les Etats membres (octobre 1987) ;
  • Conclusions sur l’autorisation des services aériens réguliers interrégionaux pour le transport de passagers, d’articles postaux et de fret entre les Etats membres (octobre 1987) ;
  • Avis sur l’élimination des distorsions de matière fiscale dans les transports de marchandises par route - Taxes sur les véhicules, taxes sur les carburants et péages autoroutiers (octobre 1987) ;
  • Prise de position relative à l’assainissement de la situation des entreprises des chemins de fer et à l’harmonisation des règles régissant les relations financières entre ces entreprises et les Etats (décembre 1988) ;
  • Avis sur le développement de l’infrastructure ferroviaire :
    • Sur l’élaboration d’un réseau TGV pour le trafic voyageurs ;
    • Sur un trafic marchandises plus rapide (décembre 1988).
  • Prise de position concernant le développement des transports combinés (décembre 1988).

En trois années, le volume de ces différents avis et prises de position du Comité Paritaire des Chemins de fer représente plus de 60 pages de textes qui ont été négociés en tenant compte des sensibilités nationales, traduits en 9 langues et toujours adoptés à l’unanimité.


Source : Le Rail, janvier 1991