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Nuremberg, typiquement allemand

Raymond Rombout.

mercredi 31 juillet 2019, par rixke

Après York et Utrecht, vous pensiez peut-être tout savoir au sujet des musées ferroviaires. Si York se distingue par son authenticité, ce qui n’est guère surprenant étant donné sa situation géographique et historique, Utrecht séduit par sa créativité et son originalité. Voyons maintenant ce que le musée de Nuremberg nous réserve comme surprises. De prime abord, il est évident que ce musée est typiquement et essentiellement allemand.
Le musée du transport de Nuremberg

Le musée du transport de Nuremberg est le plus important des musées ferroviaires allemands. C’est aussi le plus vieux. Son histoire remonte à 1882.

Après plusieurs déménagements, le musée s’installe définitivement à Nuremberg. Nous sommes en 1914. A cause de la Première Guerre mondiale, l’ouverture officielle est reportée jusqu’en 1925. L’espace d’exposition atteint les huit mille mètres carrés, dont 1350 sont réservés aux services postaux.

La Deuxième Guerre mondiale interrompt ses activités, il faut attendre 1970 pour le voir rouvrir ses portes, en grande pompe cette fois.

L’on peut dire, sans minimaliser l’engagement des pionniers et des générations suivantes, que le musée ne prend vraiment son essor qu’à l’occasion du 150e anniversaire des chemins de fer allemands.

 L’année jubilaire 1985

Il faut bien reconnaître le savoir-faire allemand. La rénovation du musée des transports fut une des priorités de cette année 1985. Grâce au soutien de la DB, le chantier de rénovation se réduisit à une durée de dix-neuf mois. Le bâtiment principal vit sa superficie doublée pour atteindre aujourd’hui 7 500 m2. En tout, le musée propose 18 espaces d’exposition et halles.

L’investissement rapporta 4,5 millions de DM (90 millions de FB), le nombre de visiteurs se chiffrant pour la première année à 450 000.

 Les départements

La salle historique

La direction du musée eut toute latitude en ce qui concerne l’aspect historique, Aussi a-t-elle pensé, très logiquement, présenter une exposition dans une salle dénommée « Epochensaal » (que l’on pourrait traduire par salle des siècles).

La répartition thématique couvre cinq périodes : la naissance des chemins de fer allemands, le succès du rail allemand, les lignes privées, les chemins de fer de l’Etat allemand, et enfin la période de l’après-guerre à nos jours.

Quelques subdivisions apportent un éclairage particulier sur des thèmes majeurs de cette histoire, ceux du régime nazi et des trains à grande vitesse, par exemple.

La naissance des chemins de fer

Ce département commence avec la préhistoire des chemins de fer, soit depuis les wagonnets servant au transport du charbon jusqu’à la ligne complète Liverpool-Manchester.

Ceci constitue un excellent préambule à l’histoire des chemins de fer allemands qui commence avec la première ligne reliant Nuremberg à Furth, posée en 1835. Point n’est besoin de chercher midi à quatorze heures pour comprendre le choix de la ville de Nuremberg pour accueillir le musée ferroviaire.

La locomotive Adler

A signaler le plateau où sont présentées visuellement les phases successives de l’avènement des chemins de fer modernes, soit depuis les wagonnets sur rails jusqu’aux locomotives à vapeur.

Le développement du réseau ferré en Allemagne

La deuxième période se situe entre 1840 et 1880. Elle montre le développement rapide des chemins de fer en Allemagne, qui sont devenus le premier mode de transport public. Par ailleurs, sont aussi abordés les aspects de collaboration et d’attraction avec le milieu industriel.

A l’époque, les voies ferrées atteignaient une longueur de 30 000 km. Les thèmes « Trafic de marchandises et commerce », « Trafic de voyageurs et population », « Les hommes et la technique dans le monde ferroviaire » achèvent l’esquisse des chemins de fer de cette période.

Les chemins de fer des länder allemands

De 1880 à 1920, nous assistons à l’apogée des chemins de fer provinciaux qui sont comparables à la préhistoire de la SNCB. Le visiteur fait aussi connaissance avec des innovations majeures de l’industrie ferroviaire, dont l’avènement de l’électricité en 1879.

Les chemins de fer de l’Etat

La quatrième période (1920-1945) aborde le remplacement des chemins de fer provinciaux par le chemin de fer de l’Etat. Nombre de prouesses techniques de ce temps préfigurent les changements à venir. A remarquer l’installation d’un réseau urbain berlinois, pionnier de réseaux similaires dans le monde.

On apprend aussi que nos voisins de l’Est sont occupés depuis 1933 à l’élaboration d’un réseau Intercity rapide (160 km/h). Les pages noires de l’histoire allemande et du rail sont également abordées : sans détours est expliquée la façon dont le chemin de fer fut abusé pour le transport des Juifs et comment il eut à subir les assauts guerriers.

De n’avoir pas passé sous silence ces terribles événements est tout à l’honneur de la DB.

Après 1945

Dernière partie de l’« Epochensaal », l’après-guerre à nos jours commence avec la scission de l’Allemagne et ses conséquences sur le trafic.

L’attention se fixe d’emblée sur un poteau de signalisation du métro de Berlin Potsdammerplatz. Il fut récupéré, après la chute du mur de Berlin, dans la zone interdite entre Berlin Est et Berlin Ouest. Les années cinquante sonnent le glas des locomotives à vapeur, remplacées progressivement par des machines plus performantes.

D’autres chapitres traitent de l’offre de trafic voyageurs et marchandises, de l’amélioration des conditions de travail du cheminot, et enfin, de l’élargissement de l’offre de transport avec l’arrivée des trains à grande vitesse.

Un poste de conduite d’un ICE et une collection stupéfiante de locomotives de modèle réduit (1:10) constituent des attractions de choix pour les jeunes visiteurs.

Une sixième section est en cours d’aménagement : les chemins de fer allemands de l’an 2000.

De choses et d’autres

Il n’y a pas de musée ferroviaire sans techniques et signalisation. La conception du nouveau bâtiment est à cet égard bienvenue.

Une exposition générale sur ces deux thèmes est présentée sur une sorte de mezzanine.

On peut y voir tunnel et ponts, comprendre l’architecture ferroviaire et la façon dont sont posés les rails.

Dans une des salles a été reconstitué le salon royal de la première gare des chemins de fer de l’Etat de Nuremberg, complété par une salle d’attente et le coin du poinçonneur. Des photos de quelques gares remarquables sont aussi exposées, avec le nom de leurs architectes.

Musée du transport de Nuremberg : vue du salon royal

A signaler encore à l’étage, un aperçu historique des locomotives allemandes : 160 machines sont exposées depuis la célèbre locomotive à vapeur Bavaria de 1841 jusqu’aux modernes BR 120. Réduites à l’échelle 1:10 bien sûr, mais c’est néanmoins un exploit. On ne pouvait en attendre moins des Allemands.

Ajoutons qu’un restaurant « Zur Dampfmaschine » a été aménagé dans ce musée. Faut-il préciser qu’ici tout respire le chemin de fer d’antan et la quiétude ?

Le parc des voitures

Les voitures sont réparties dans quatre salles : la salle Adler, l’ancienne et la nouvelle halle des locomotives, et la salle principale. Cette dernière est un des joyaux de ce musée. On y découvre notamment la voiture-salon et terrasse du roi de Bavière Ludwig II, datant de 1835. Dans la nouvelle halle des voitures est exposée une voiture du métro berlinois, construite en 1926. La longueur des rails présentés dans cet espace de 1 000 m2 atteint 200 m, auxquels il faut ajouter 160 m en cours d’aménagement. Les rails sont en outre reliés à la gare de Nuremberg toute proche. Ce raccordement permet une mobilité pratique et confère au musée son dynamisme.

Le train remorqué par la locomotive Adler quitte la gare de Nuremberg. Un précieux souvenir pour les ferrovipathes

En août 1991, s’est ouvert un espace extérieur de 1 500 m2. Sur deux écartements de voies différents sont exposées de nombreuses voitures intéressantes, comme la vieille rame 7 de 1909, la locomotive à vapeur 99 de Saxe et les voitures prussiennes à six essieux de 1906 qui composèrent longtemps une partie du monument de Lénine à Sassnitz.

 Succès

Nuremberg est légitimement fier de son musée. Avant 1985, il n’était qu’un modeste lieu où l’on pouvait voir, il est vrai, les étapes historiques importantes des chemins de fer allemands. Néanmoins, sans l’année du jubilaire, il eût été condamné à disparaître. Nuremberg s’est aussi fait le gardien de la vapeur : toute l’année, il est possible d’effectuer des parcours en locomotive à vapeur, dans les environs et jusque dans l’ancienne Allemagne de l’Est. Pour un prix raisonnable, le visiteur a le choix entre 30 promenades avec des locomotives différentes.

Parcours du 150e anniversaire de la DB avec la locomotive à vapeur 01.1100, de Nuremberg Hbf à Bayreuth Hbf et retour photographié ici près de Rupprechtstegen, en direction de Bayreuth.

 Pratiquement

Musée des transports de Nuremberg
Lessingstrasse, 6
D 90443 Nuremberg


Source : Le Rail, Novembre 1994