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Les trains teem

M. Daelman.

mercredi 26 janvier 2011, par rixke

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Le TEE, tout le monde sait ce que c’est. Même les gens qui ne sont pas cheminots et ceux qui ne prennent jamais le tram.

Le cruciverbiste qui ne connaîtrait pas ce sigle pourrait bien d’aventure ne pas arriver au bout de sa grille. Et c’est normal. Voyageur sur le quai d’une gare ou automobiliste attendant impatiemment le feu vert au passage à niveau, vous ne pouvez pas ignorer le TEE. Il s’impose à vous et par la forme et par la couleur.

Cependant, beaucoup ne le prennent jamais. Ou rarement. On ne le connaît donc pas tout à fait. On sait qu’il existe, comme les « Concorde » et les sous-marins. Mais cela ne va pas plus loin, Les trains TEEM (pour Trans-Europ-Express-Marchandises), pendants marchandises des TEE, ne sont quasi pas connus du tout. Généralement, on ne sait rien d’eux. Ou très peu. Ce n’est pas étonnant, car extérieurement, ils n’ont rien de bien remarquable. Pour les distinguer, il y a un numéro de train (mais qui donc connaît le numéro d’un tram de marchandises) et une petite étiquette , discrète, sur chaque wagon. Pourtant, s’ils n’existaient pas, la fraîcheur ne serait pas la qualité première des produits qui nous viennent de l’étranger. Ainsi, sans le savoir, tout le monde, ou pratiquement, tire bénéfice de leur existence. Nous avons donc pensé qu’il convenait d’en dire quelques mots.

 Un peu d’histoire

Créé voici dix-neuf ans, le 28 mai 1961 pour être précis, le réseau TEEM a crû en importance et en étendue.

Au départ, il n’y avait que 31 trains et les trajets étaient relativement courts. Aujourd’hui, on compte 139 relations et le parcours moyen a bien augmenté. Le plus long (Sagunto - Stockholm) fait plus de trois mille kilomètres.

Un exemple peut être utile si vous ne voyez pas le rapport entre 31 trains et 139 relations. Le TEEM Anvers - Vienne comprend également des wagons pour Bâle et le TEEM Zeebrugge - Bâle des wagons pour Vienne. Tous deux passent par Cologne où a lieu le triage. On a ainsi quatre relations TEEM.

La SNCB participe à 24 relations, ce qui, toutes proportions gardées, n’est pas si mal.

 Pourquoi les TEEM ?

Voici une vingtaine d’années, on s’est aperçu que malgré la bonne volonté des différents réseaux, le trafic international des marchandises n’avait d’international que le nom. La situation était la suivante : Un réseau prenait en charge les wagons de son voisin et les acheminait en régime intérieur jusqu’à la gare frontière de sortie où les formalités douanières n’arrangeaient pas les choses. Le trajet global était donc très long.

A l’intérieur de la CEE les contrôles douaniers ont gagné en souplesse. En transit du moins. Mais il fallait plus. Il n’y avait qu’une solution : la création de trains complets auxquels la douane pouvait donner feu vert sans aucune forme de contrôle. C’était possible notamment avec les TEEM, qui ne sont composés que de wagons dédouanés au départ. C’était la fin des longs arrêts aux frontières.

De plus, les trams TEEM cessèrent d’être incorporés dans l’organisation du régime intérieur, ce qui permit de réduire ou de supprimer les temps d’arrêt dans les gares de formation. En principe, les TEEM sont des trains complets [1] qui relient une zone de production à une zone de consommation.

Quoi qu’il en soit, on a pu rapidement constater que peu nombreuses étaient les régions d’Europe pouvant réunir tous les jours, sans exception, un nombre suffisant de wagons pour former des trains complets à destination de zones de consommation éloignées. D’autant plus que les conditions sont strictes :

  • les trains TEEM ne sont composés que de wagons équipés d’installations thermiques et de wagons de marchandises périssables ou nécessitant un transport rapide ;
  • les marchandises pondéreuses sont exclues de ce trafic ;
  • les wagons doivent bien entendu être autorisés à rouler à 100 km/h au moins (suivant l’état du wagon et du chargement) ;
  • les expéditeurs doivent être convenus d’un itinéraire commun ;
  • les marchandises doivent être dédouanées au départ pour éviter les arrêts prolongés à la frontière.

II a ainsi fallu passer de la notion de tram TEEM à la notion de relation TEEM. Anvers dispose par exemple d’un nombre suffisant de wagons pour la Suisse et l’Autriche, mais pas pour ces deux pays séparément. Le but recherché, c’est-à-dire durée de parcours ultra-rapide, est atteint aussi bien par des relations que par des trains.

 Zones belges de production et de consommation

N’étant pas bien grand, notre pays peut être considéré comme une seule zone. Cette circonstance devrait faciliter la formation et la réception des trains TEEM.

Dans certains pays (chez nos voisins plus précisément), il n’y a que peu de wagons « à l’exportation » à dédouaner à la frontière. Chez nous, la situation est tout autre. Nous ne pouvons traiter cette question, cela nous conduirait trop loin.

Les possibilités de former des trains complets au départ du territoire national sont donc très réduites. Dans la pratique, nos TEEM partent tous des ports d’Anvers et de Zeebrugge qui disposent de wagons dédouanés au départ. Dans la mesure du possible, on ajoute en cours de route d’autres wagons qui conviennent à ce genre de trafic.

A l’importation, les wagons destinés à des gares intérieures peuvent plus facilement tirer avantage de l’une ou de l’autre relation TEEM, bien que dans certains cas ce ne soit que jusqu’à la gare frontière d’entrée.

 Relation TEEM

Quelles conditions doit remplir une liaison ferroviaire donnée pour devenir relation TEEM ?

Les réseaux membres accordent aux trains TEEM une certaine forme de priorité, ce qui ne va pas sans influencer le service des trains. Bien entendu, le réseau A ne peut décider unilatéralement qu’un train composé de wagons destinés au réseau C est un TEEM et, partant, obliger le réseau de transit B à donner la priorité au dit train. La décision appartient à un groupe de travail international qui tient compte de certains critères auxquels la relation doit satisfaire.

Une vitesse commerciale d’au moins 45 km/h, voilà l’idée maîtresse du système !

Cela ne paraît pas beaucoup pour des wagons autorisés à rouler à 100 km/h. Pourtant, si l’on tient compte des arrêts inévitables et des moyennes réalisables, une vitesse de l’ordre de 45 à 50 km/h, c’est une belle performance. C’est tellement vrai que pour respecter ce critère, il faut admettre des suppléments de temps sur certaines relations (nombreuses gares frontières peu distantes, difficultés topographiques, navires transbordeurs,... ).

La limite des 45 km/h reste obligatoire aujourd’hui, bien que certains aient proposé de l’abaisser quelque peu. On devrait autoriser des vitesses légèrement inférieures pourvu que les marchandises arrivent à temps à destination.

Les vitesses moyennes des camions peuvent varier également en fonction de l’état de la route sur l’itinéraire suivi. L’essentiel, c’est de disposer des marchandises au moment voulu.

 Perspectives d’avenir

Compte tenu des éléments évoqués ci-dessus, on peut affirmer sans grand risque d’erreur que les trains TEEM vont continuer à se multiplier, même si des conditions trop strictes ont jusqu’à présent ralenti le développement du système.

De toute manière, le produit fait recette.

Si nous relisons aujourd’hui ce que l’on écrivait à propos des TEEM dans « Le Rail » de novembre 1963, nous ne pouvons nous empêcher de penser que l’auteur de l’article éprouvait quelque crainte même s’il nourrissait beaucoup d’espoirs. Le nouveau-né pouvait s’en tirer, pensait-il, imaginant qu’on ne lésinerait pas sur les « vitamines » à lui administrer : intégration européenne, coordination économique, suppression des barrières douanières, mise en service de l’accouplement automatique,... Quinze années se sont écoulées et lesdites vitamines en sont toujours au stade expérimental. Le TEEM a donc dû se passer de stimulants. Cela ne l’a pourtant pas empêché de grandir.

Pourquoi ? Avant tout parce que les chemins de fer ont pu créer le réseau qui convenait aux clients. Il s’agit d’une réussite qui ne se démentira certainement pas.

Le secret des chemins de fer ? Un nombre suffisant de personnes qui savent ce qu’elles font et qui ne sont jamais contentes du résultat atteint. Leur devise : « on fera mieux la prochaine fois ».

C’est le groupe de travail TEEM de la CEM [2] qui est chargé de concrétiser les idées de nombreux individus. Si les TEEM sont les rejetons des réseaux, le groupe de travail est une sorte de comité de parents. Il doit faire preuve de dynamisme.

Toutes les opinions ont droit de cité dans ce comité qui réunit les représentants des réseaux de l’Est et de l’Ouest, qu’ils soient grands ou petits.

Tous ont pu s’en féliciter et nous pouvons envisager l’avenir avec sérénité.

Les trams TEEM sillonnent l’Europe à une vitesse commerciale d’au moins 45 km/h. Ils relient zones de production et de consommation.
La fraîcheur des produits que vous consommez, c’est à eux que vous la devez.

Source : Le Rail, septembre 1980


[1pas de modification de la charge en cours de route

[2Conférence Européenne des Horaires des Trams de Marchandises
Réseau gérant : CSD (Chemins de fer de l’Etat tchécoslovaque)
Membres : les réseaux européens, à l’exception des chemins de fer soviétiques et albanais.