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Aspects de la chine ferroviaire 1980

Robert Alen.

mercredi 9 février 2011, par rixke

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une voiture-couchettes, comme on peut le voir

Si la Grande Muraille, symbole de l’ancienne Chine impériale, fascine les visiteurs qui s’y rendent en foule, un autre spectacle, tout proche, comblera d’aise les amateurs de la traction à vapeur : c’est celui du transmongolien qui, au pied de la Muraille, gravit les entrelacs de la voie ferrée en direction du col de Pa Ta Ling.

La locomotive de tête, une 482 moderne, s’annonce au loin grâce à son fanal allumé, couronné d’épaisses volutes de fumée noire ; les douze voitures du convoi, vertes liserées de jaune, s’étirent lentement, telles un dragon de métal, au fil des sinuosités de la voie.

la Pacific en gare de Wuhan

Dans les sections du parcours à forte déclivité, une énorme 2102 de renfort assure à l’arrière, la poussée du train et les deux machines coordonnent leurs efforts à coups de sifflet longuement répercutés par les parois rocheuses.

A en juger par les dépôts de matériel de traction, la vapeur demeure prédominante en République Populaire de Chine, avec d’innombrables 282 assez anciennes, et de prestigieuses Pacific, comme celle que nous avons pu photographier en gare de Wuhan ; toutes ces locomotives sont étincelantes de propreté dans leur livrée noire aux roues peintes en rouge.

La construction de machines à vapeur se poursuit encore actuellement en Chine, en concurrence avec les nouvelles diesel électriques ; nous avons pu voir, franchissant le grand pont rail-route sur le Yang-Tsé, à Wuhan, une toute récente locomotive du type Dong Feng 4, présentée par ailleurs en maquette à la Foire de Canton.

diesel Dong Feng 4 sur le pont du Yang-Tsé

Nous n’avons pu expérimenter les voitures voyageurs de classe populaire aux banquettes de bois dépourvues de compartiments ; le confort des hôtes étrangers est, sur les longs parcours, assuré par des voitures-couchettes et des wagons-restaurants, qui n’ont rien à envier au matériel européen correspondant.

Sur le trajet Wuhan-Guilin, le wagon-restaurant, desservi par un personnel attentif, peut à chaque service, accueillir une soixantaine de convives : nappes, napperons brodés et lampes à chaque table, panneaux décorés de fresques florales et ventilation discrète dispensent une impression de confort ; sans prétendre à la gastronomie, la cuisine, traditionnelle, comportait une dizaine de petits plats : crevettes, salades, haricots, canard, nouilles, riz, et pour terminer, un bouillon aux herbes, le tout agrémenté de bière, de vin rouge liquoreux et de mao-taï ou alcool de sorgho.

La voiture couchettes du parcours Shan Jiang -Wu Chang comportait des compartiments de 4 places, avec couchettes pourvues de véritables matelas, de couvertures, oreillers et édredon ; un épais tapis de sol, des rideaux aux fenêtres, une tablette agrémentée d’un napperon, d’une lampe à abat-jour et d’un pot à fleurs (dans le style des bonzaïs), tout concourt à créer une ambiance d’intimité et de détente, que favorisent aussi une excellente suspension, une insonorisation satisfaisante, et un thé servi fréquemment avec grande gentillesse.

Sur le trajet Canton-Hong Kong, les wagons salons, dépourvus de compartiments, possèdent des sièges rotatifs à 180° et deux récepteurs télévision en couleur : il s’agit là d’une « ligne de prestige » qu’empruntent obligatoirement, à l’entrée ou à la sortie, les étrangers qui séjournent en Chine méridionale.

Les gares principales que nous avons pu apercevoir, Pékin, Wuhan, Canton, sont des bâtisses monumentales et fonctionnelles en béton. Une mention particulière doit être réservée à la nouvelle gare de Guilin, dans la région autonome du Guangxi, renommée pour la beauté de ses paysages et objet d’une promotion touristique largement méritée ; à la gare de Guilin, l’emploi judicieux du béton et du verre donnent une impression d’unité et d’harmonie dépourvue d’un monumentalisme excessif.

Un horaire de visites particulièrement chargé ne nous a guère permis de flâner dans les gares : au départ comme à l’arrivée, les hôtes étrangers sont pilotés directement vers une petite salle d’attente spécialement aménagée avec bar, et sont dispensés des formalités d’enregistrement des bagages et de l’achat de billets : en revanche, il n’est guère possible de s’en évader, sous peine d’y être bientôt reconduit par un agent du chemin de fer dont le sourire déborde par ailleurs d’amabilité contrite.


Source : Le Rail, février 1981