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La Compagnie Internationale des Wagons-Lits et des Grands Express Européens
mercredi 1er février 2012, par
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- L’audacieuse entreprise (...), p1
- Des noms qui font rêver, p1
- De 1918 à 1939, p1
- Après 1945, p1
- Une belle vitalité, p1
- Au service du tourisme, p1
- L’organisation, p1
- Son esprit international, p1
- Le personnel itinérant, p1
Valéry Larbaud et les Grands Express |
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Valéry Larbaud, l’auteur de « Fermina Marquez », l’un des meilleurs romans du XXe siècle, fut, dès 1898, un des plus fidèles clients des grands express européens. Avec les « Poésies de A.O. Bamabooth » (1913), il fut le premier grand poète à insuffler dans la poésie le « sentiment géographique moderne ».
Derrière les vitres des grands express, l’Europe lui est apparue émouvante et familière, mais, pour cet enfant gâté, elle n’était pas encore l’Europe humaine vers laquelle nous marchons avec un idéal bien défini de fraternité.
Voici son ode célèbre au train de luxe :
PRETE-MOI ton grand bruit, ta grande allure si douce,Ton glissement nocturne à travers l’Europe illuminée,O train de luxe ! et l’angoissante musiqueQui bruit le long de tes couloirs de cuir doré,Tandis que derrière les portes laquées, aux loquets de cuivre lourd,Dorment les millionnaires.JE parcours en chantonnant tes couloirsEt je suis ta course vers Vienne et Budapest,Mêlant ma voix à tes cent mille voix,O Harmonika-Zug !J’ai senti pour la première fois toute la douceur de vivre,Dans une cabine du Nord-Express, entre Wirballen et Pskow.On glissait à travers des prairies où des bergers,Au pied de groupes de grands arbres pareils à des collines,Etaient vêtus de peaux de mouton crues et sales...(Huit heures du matin en automne, et la belle cantatriceAux yeux violets chantait dans la cabine à côté.)ET vous, grandes glaces à travers lesquelles j’ai vu passer la Sibérie et les monts du Samnium,La Castille âpre et sans fleurs, et la mer de Marmara sous une pluie tiède !PRETEZ-MOI, ô Orient-Express, Sud-Brenner-Bahn, prêtez-moiVos miraculeux bruits sourds etVos vibrantes voix de chanterelle ;Prêtez-moi la respiration légère et facileDes locomotives hautes et minces, aux mouvementsSi aisés, les locomotives des rapides,Précédant sans effort quatre wagons jaunes à lettres d’orDans les solitudes montagnardes de la Serbie,Et, plus loin, à travers la Bulgarie pleine de rosés...AH ! il faut que ces bruits et que ce mouvementEntrent dans mes poèmes et disentPour moi ma vie indicible, ma vieD’enfant qui ne veut rien savoir, sinonEspérer éternellement des choses vagues.
(Poésies de A.O. Barnabooth.)
Source : Le Rail, juillet 1960