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Northumbria, berceau du chemin de fer

G. Delise.

mercredi 16 janvier 2013, par rixke

 La romance de la vapeur

La disparition de la vapeur a suscité pas mal de nostalgie. C’est toujours avec émotion que nous évoquons ce passé-là.

Dans le Nord-Est de la Grande-Bretagne, le Northumbria, berceau du chemin de fer, célèbre avec faste cette année le 150e anniversaire du premier transport public de passagers en chemin de fer à vapeur.

En effet, le 27 septembre 1825, le premier train de passagers fut remorqué de Shildon à Stockton (via Darlington) par la fameuse locomotive « Locomotion n° 1 » créée par George Stephenson, ingénieur autodidacte de la région. Cette magnifique machine, astiquée avec amour, est toujours fièrement exposée sur le quai de la gare, à Darlington (Bank Top Station).

George Stephenson, un des pionniers de la « vapeur », considéré comme le « père » des chemins de fer, naquit en 1781 à Wylam, petit village de la vallée de la Tyne, dans le Northumberland, où l’on peut encore voir la maison où il a passé son enfance.

Sa première locomotive, appelée « Blucher », fut créée pour les mines de charbon de Killingworth ; une plaque commémorant cet événement a été apposée au-dessus de la porte du « Dial Cottage » à Killingworth où il vécut de 1805 à 1823.

Apportant des améliorations à sa première invention, Stephenson atteignit le sommet de sa renommée avec la locomotive « Locomotion n° 1 » construite pour le « Stockton and Darlington Railway ». « Locomotion n° 1 » possédait deux cylindres verticaux plantés au-dessus d’une chaudière protégée par des lattes en bois, le mouvement des pistons étant transmis directement aux roues par l’intermédiaire de bielles et de manivelles ; les quatre roues motrices étaient reliées deux à deux par une bielle.

. . . Imaginons la scène qui se déroula en ce matin historique du 27 septembre 1825 lorsque George Stephenson monta sur la plate-forme de « Locomotion » pour effectuer son premier voyage de 32 km entre Shildon et Stockton. Stephenson poussa le régulateur de la machine et le lourd convoi - 80 à 90 tonnes de charge - s’ébranla. La foule excitée, qui n’avait vu jusqu’alors que des wagons de charbon tirés par des chevaux, salua et se mit à applaudir lorsque « Locomotion » passa, tirant son train chargé de passagers enthousiastes. Car c’était un jour de gala ; l’engin était destiné à introduire une nouvelle méthode rapide... pour le transport du charbon ! Or, 21 wagons ne contenaient pas de charbon mais des passagers, et les 12 wagons remplis de charbon étaient, eux aussi, surchargés de passagers assis de façon plus que précaire.

On avait également accroché une sorte de mail-coach, « élégante voiture couverte » baptisée « Experiment » (essai), montée sur 4 roues de fonte, équipée de sièges pour les directeurs et les propriétaires de la ligne : la première voiture à voyageurs était née.

Le convoi était précédé par un cavalier muni d’un drapeau.

Aux endroits où la ligne longeait la route, les conducteurs de voitures excitaient leurs chevaux pour tenter de rivaliser de vitesse avec le « dragon de fer » mais dans cette course rail-route, le rail eut le dernier mot. Certes, la vitesse moyenne réalisée par la locomotive sur tout le parcours ne dépassa guère 7 km à l’heure, mais, par moments, des pointes de 24 km/heure furent atteintes.

A Stockton, plus de 40 000 personnes attendaient le convoi inaugural et c’est avec de folles exclamations et une salve de 21 coups de canons qu’on salua cette arrivée. [1]

Ce jour était pour Stephenson véritablement un jour de gloire et le confirmait dans sa foi en l’avenir de la locomotive. Dans l’histoire du chemin de fer, la voie ferrée Stockton -Darlington apparaît comme la première grande ligne ferroviaire du monde.

Tous les musées de la région du Northumbria retracent l’épopée du rail en exposant bien des pièces intéressantes, non seulement à Darlington - surnommée le « home » des chemins de fer - mais également à Stanley, près de Chester-le-Street, au Beamish Open Air Museum, ainsi qu’à Newcastle, au Museum of Science and Engineering, et au Monkwearmouth Station Muséum de Sunderland.

Fier de son héritage, le Northumbria a entendu faire revivre en 1975 le chemin de fer de ses pères et en exhiber les richesses au cours de célébrations variées, qui ont commencé au mois de juillet.

Du 21 au 27 septembre 1975, Stockton montrera aux visiteurs un train-exposition du rail britannique. Le jour « J », le 27 septembre 1975, la ville retournera au temps de 1825 : des scènes du passé, en costumes d’époque, seront reconstituées avec fidélité.

Des trains à vapeur seront mis en service sur la ligne Battersby - Whitby tous les samedis de septembre et également le dimanche 28.

 Northumbria, toit de l’Angleterre

L’ancien royaume saxon de Northumbria comprend les trois grands comtés du Yorkshire, Northumberland et Durham.

Tout le Northumbria regorge de beautés naturelles et de traces d’un passé riche en histoire.

Les passionnés du chemin de fer découvriront qu’ils peuvent satisfaire à la fois leur plaisir de remonter aux origines du rail et celui d’admirer les autres richesses de la région : le mur romain, les châteaux forts, les abbayes, les cathédrales, dans un paysage de collines sauvages et de rivières.

 Newcastle upon tyne (northumberland )

Le double pont remarquable (rail-route) construit par Robert Stephenson, digne fils de George, est encore là et fait toujours l’admiration des visiteurs.

Newcastle possède deux splendides musées : le Muséum of Science and Engineering, exposant notamment de nombreuses locomotives, entre autres celle construite par George Stephenson en 1826 pour les mines de Killingworth, et le Museum of Antiquities, montrant les trésors archéologiques, découverts aux alentours du mur romain. La muraille d’Hadrien, qui comprenait 300 tours et 28 camps retranchés, fut construite par les légions romaines en 122 après J.-C, quand l’empereur Hadrien fut venu en Angleterre pour s’informer comment protéger les populations contre les raids des tribus du Nord. Cette frontière fortifiée, vestige de la puissance romaine, s’étire de la côte Est à la côte Ouest de l’Angleterre, sur une longueur de 120 km, coupant le Nord de l’Angleterre dans sa partie la plus étroite.

Pour aller contempler ce mur impressionnant, le moyen le plus original consiste à prendre à Newcastle le train de la Tyne Valley Line jusqu’à Hexham.

Chaque halte a sa petite histoire. La ligne a été ouverte en 1835 (d’abord jusqu’à Hexham, ensuite en 1839 jusqu’à Carlisle), en un temps où il n’existait en Angleterre que quatre chemins de fer pour passagers. Ce train, circulant le long de la Tyne, une rivière coquette en diable, s’arrête notamment à Wylam, lieu de naissance de George Stephenson, d’où part un sentier pour piétons, tout nouvellement créé et jalonné de reliques de l’époque héroïque.

Le nombre surprenant de pubs qu’on trouve dans la région s’explique par la présence de nombreuses mines de charbon et de fer du XIXe siècle : le travail était dur... et donnait soif !

A Hexham, dans la belle abbaye qui vient de fêter, en 1974, le 1300e anniversaire de sa fondation par saint Wilfrid, on peut admirer le « Frith Stool », siège où étaient couronnés les rois saxons du Northumbria.

Un service de bus partant de la gare de Hexham conduit les touristes au fort le mieux préservé de la muraille d’Hadrien, celui de Housesteads (Vercovicium) où ils pourront, mettant leurs pas dans ceux des soldats romains, longer pendant cinq kilomètres le même pan de mur élevé il y a 1800 ans, en contemplant à perte de vue les collines verdoyantes et les landes du Nord, paysage rude et sauvage où s’intègrent parfaitement les pierres romaines.

 Durham (comté de durham) citadelle du nord

Côte à côte, un château et une immense cathédrale normande dominent la cité et surplombent les berges boisées de la rivière Wear qui cerne de trois côtés le promontoire, véritable nid d’aigle manifestement choisi comme retraite en cas de guerre.

Walter Scott, décrivant cette belle cathédrale qu’il aimait, disait : « mi-église de Dieu, mi-château contre les Ecossais ».

Bede le Vénérable, moine et historien, appelé « père de l’histoire d’Angleterre » qui vécut il y a 1300 ans dans le monastère de Monkwearmouth, est enterré dans cette cathédrale, l’une des plus majestueuses de Grande-Bretagne. C’est Bede qui, le premier, traduisit la Bible en anglais.

 York (yorkshire) ancienne capitale de l’Angleterre

Pour parler de York, la ville la plus « historique » de Grande-Bretagne, il faut ne pas avoir peur des superlatifs. Cinq kilomètres de remparts intacts - datant du XIVe siècle - flanqués de leurs quatre grandes portes, entourent la cité la plus médiévale du pays. York Minster, la plus grande église gothique d’Angleterre, renferme le plus prestigieux ensemble de vitraux du Moyen Age : 117 merveilles, près de la moitié des vitraux de l’époque médiévale existant dans le monde. La construction de cette cathédrale, qui prit 250 ans, s’acheva en 1472. Cinq années de travaux de restauration viennent de lui redonner sa splendeur première, son éclat, sa lumière. En plus de ce joyau, York, dénommée la « ville des églises », compte encore dans ses murs 17 églises médiévales.

Ses rues étroites font le charme de la vieille ville, spécialement la petite rue moyenâgeuse des « Shambles », ancien quartier des bouchers, bordée de vieilles maisons pittoresques dont les façades semblent plier sous le poids des ans. D’autres corps de métiers ont laissé leur empreinte dans leurs demeures du XIVe siècle, admirablement conservées : la Maison des Marchands Aventuriers, la Maison des Marchands Tailleurs.

York marquera également sa participation active aux fêtes du 150e anniversaire en inaugurant, le 27 septembre 1975, son Musée national du Rail.


Source : Le Rail, septembre 1975


[1Source d’information : « La Naissance du Rail européen », J. Pecheux. Le tableau représentant la scène historique se trouve au Musée de Darlington.