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Le tramway touristique de l’Aisne a dix ans
Phil Dambly.
mercredi 16 janvier 2013, par
Le TTA, dont on fête le dixième anniversaire cette année, animera le paisible et riant Val-de-l’Aisne jusqu’au 26 octobre. Comme au cours des saisons précédentes, ceux qui aiment retrouver un peu du charme de leurs jeunes années pourront voyager ainsi qu’au bon vieux temps grâce aux petits trains du TTA, tout pimpants et soigneusement entretenus, qui constituent un véritable musée animé du transport rural de jadis.
Les efforts déployés par un groupe d’amateurs enthousiastes et bénévoles, encouragés par la SNCV, ont permis de réaliser le réseau du TTA sur une ligne vicinale désaffectée qui suit les méandres de l’Aisne à une dizaine de kilomètres de Hotton, de Barvaux et de Bomal. Ces deux dernières localités sont situées sur la ligne 43 de la SNCB, dite « ligne de l’Ourthe » (Liège - Jemelle).
Après moult réunions et discussions, la partie de la ligne à remettre en exploitation fut définitivement désignée : elle partirait du pont d’Erezée pour rejoindre Dochamps via Blier, Amonines et Forge-à-la-Plez. Les premiers travaux consistèrent à débroussailler la voie ferrée, laquelle est toujours en site propre, et à élaguer les branches d’arbres de manière à dégager le gabarit. Ensuite, le matériel roulant vint de tous les azimuts, et pas toujours en bon état, pour constituer un parc initial de trois locomotives à vapeur (dont une seule en état de fonctionner), quatre autorails, douze voitures et quelques wagons à marchandises. Les locomotives et les autorails provenaient de la SNCV tandis que le matériel remorqué avait diverses origines : SNCV, tramways d’Anvers (MIVA) et de Charleroi (STIC).
Et ce fut une journée historique que celle du 25 juin 1966, quand la ligne fut inaugurée en présence du gouverneur de la province de Luxembourg. Au cours des années suivantes, l’armée apporta un précieux concours aux pionniers du TTA. Ainsi, le Génie amena et répandit 25 tonnes de ballast, posa 1 200 traverses neuves et participa à la construction d’un dépôt à Blier pour abriter le matériel roulant et permettre aux mécaniciens, ouvriers et peintres de travailler dans de bonnes conditions. Plus tard, un peloton de TTR installa une ligne téléphonique entre Erezée et Forge-à-la-Plez et mit en place une signalisation électrique.
Au fil des ans, les voitures furent restaurées et repeintes, les voies améliorées, les autorails révisés, etc. En 1971, une quatrième locomotive à vapeur renforça le parc de traction. Elle venait de Saint-Valéry, dans la Somme. Appelée la « Scarpe », cette locomotive française a un aspect plus conventionnel que les machines bicabines de type SNCV, mais est dotée comme celles-ci de trois essieux couplés.
Rutilante et crachant sa vapeur à coups précipités, la « Scarpe » effectua son premier parcours le 9 juin 1973 à l’occasion du prolongement de la ligne jusqu’à la ferme de Bergister, près de Dochamps, soit 1 500 mètres. En 1966, première année d’exploitation, 3 600 touristes fréquentèrent le réseau. En 1972, ils étaient plus de 32 000 ! Cependant, la saison 1974, défavorisée par le mauvais temps, n’amena que 28 138 visiteurs, soit une réduction de 12 %. A la diminution des disponibilités financières entraînée par cette baisse s’ajoute l’augmentation considérable des approvisionnements due à l’inflation. Le TTA doit donc renoncer pour l’instant à un nouveau prolongement de la ligne et à la remise en état d’une locomotive à vapeur.
L’année dernière, les travaux habituels d’entretien de la voie et du matériel roulant ont été poursuivis. Les installations contribuant à la sécurité des trains ont été améliorées et renforcées. Au début de l’hiver, des membres actifs ont procédé au bétonnage du dépôt et ont commencé une nouvelle campagne de débroussaillage afin de dégager des coins pittoresques de la ligne.
Le parc du matériel roulant atteignait, au 31 décembre dernier, un total de 59 véhicules. Parmi eux, on dénombre cinq autorails SNCV (AR 93, AR 133. ART 50, 69 et 123) et les quatre locomotives à vapeur (n° 24 « Scarpe », 1000, 1075 et 1076). La machine n° 24 est momentanément la seule en état de marche. En effet, la locomotive n° 1076 qui assurait les services « vapeur » depuis le début est avariée, la locomotive n° 1075 est en cours de restauration et la machine n° 1000 est toujours immobilisée. On a procédé à I’installation d’un frein Westinghouse direct et automatique de type vicinal sur la « Scarpe ». L’air comprimé sera fourni par un compresseur provenant de la SNCB, monté à I’avant de la machine. Les deux réservoirs sont fixés sous le toit de la cabine afin de préserver l’esthétique de la locomotive. Lors de la mise en service du Westinghouse (début juin), le frein à vapeur actuellement utilisé a été neutralisé. L’installation du frein à air comprimé sur cette machine se justifie du point de vue de la sécurité puisque plusieurs voitures du TTA en sont équipées d’origine.
Pour terminer, nous rappellerons que la ligne du TTA se trouve à une vingtaine de kilomètres de nombreux sites touristiques réputés : La Roche-en-Ardenne, le Hérou, le barrage de Nisramont, la Baraque Fraiture et ses fagnes, les grottes de Hotton, les dolmens de Wéris, Durbuy (la plus petite ville de Belgique), le safari de Dochamps, etc. Combinée avec une visite de la région, l’excursion sur le TTA sera une occasion idéale de meubler agréablement une journée de loisirs dont on emportera un excellent souvenir. On ne peut donc que se réjouir de l’initiative prise par quelques « fanatiques du tram » ayant conservé la nostalgie des chemins de fer secondaires grâce auxquels de nombreuses régions éloignées du « grand chemin de fer » ont pu sortir de leur isolement. A ces vrais amis du Rail, nous disons merci et... bonne continuation !
Source : Le Rail, septembre 1975