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L’atelier Diesel

J. Carlier, ingénieur principal.

mercredi 3 avril 2013, par rixke

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C’est à la fin de 1953 seulement que notre Société a commandé ses premières locomotives diesel. Aujourd’hui, la traction diesel assure plus de 45 % des circulations, presque autant que la traction électrique.

Au 1-1-66, les effectifs diesel comprenaient :

  • 420 locomotives de ligne ;
  • 261 locomotives de manœuvre ;
  • 60 locotracteurs ;
  • 122 autorails + 30 remorques.

Ces engins effectuent par mois près de 4,5 millions de kilomètres ! Ils seront bientôt renforcés par 139 nouvelles unités : 66 locomotives de ligne et 73 locomotives de manœuvre.

Cette « reconversion » a entraîné une métamorphose totale des ateliers. En une dizaine d’années, que de transformations ont bouleversé l’aspect des lieux, l’atmosphère du travail et les façons de faire ! L’équipement a été complètement renouvelé. Or, la première richesse d’un équipement, ce sont les hommes. Aussi nous plaît-il dès l’abord de rendre hommage à tous ceux-là qui, en si peu de temps, ont fait, eux aussi, peau neuve.

La majeure partie du personnel des ateliers diesel, tant le personnel ouvrier que celui des « cadres », provient des services de la vapeur, parfaitement qualifiés pour ceux-ci et, de plus, héritiers d’une longue tradition artisanale, ces cheminots ont fait face au changement avec une conscience professionnelle et un sens de l’adaptation remarquables : ils ont secoué leurs habitudes et sont retournés à l’école pour se familiariser avec d’autres techniques, un travail de plus grande précision, des organes plus compliqués.

Ils ont la satisfaction de voir que leurs activités se situent maintenant à un niveau plus élevé et qu’elles s’exercent dans des conditions plus agréables. Aujourd’hui, les ateliers diesel sont propres et bien éclairés ; les conditions d’hygiène y sont de jour en jour améliorées ; l’atmosphère y est plus calme ; les postes de travail, plus modernes et mieux conçus, sont dotés d’un outillage plus rationnel.

Un engin diesel est beaucoup plus compliqué qu’une locomotive à vapeur. Il forme un ensemble dans lequel la plupart des organes mécaniques, électriques ou hydrauliques fonctionnent en étroite liaison. Etant donné que chaque engin est utilisé au maximum, le moindre dérangement peut désorganiser l’exploitation d’une ligne. Aussi faut-il que toutes les avaries soient détectées immédiatement et réparées d’une façon parfaitement efficace.

Le personnel a le mérite, non seulement de s’être adapté à sa nouvelle tâche, mais encore d’accomplir celle-ci en étant à la hauteur de la situation. Une locomotive diesel coûte cher (de 14,5 à 15 millions de francs pour un engin de 1.400 ch) et il importe de réduire son immobilisation au strict minimum. Il faut donc que l’équipement matériel et l’organisation de l’atelier permettent de travailler vite et bien. Mieux qu’un long exposé, les photos que nous vous présentons donnent une idée de cet équipement et de l’organisation.

La tâche d’un atelier de traction diesel consiste à entretenir les véhicules diesel jusqu’au moment où une réparation complète des engins s’impose. Celle-ci a lieu dans un atelier central. Actuellement, les locomotives diesel de ligne parcourent des distances allant de 600.000 km à 800.000 km entre deux réparations complètes. L’expérience démontre qu’avec des programmes d’entretien et des méthodes de travail parfaitement mis au point, ainsi qu’avec un personnel initié travaillant dans un milieu bien adapté, il est possible d’atteindre et même de dépasser le million de kilomètres.

Tout est mis en œuvre pour atteindre ce but.

L’ENTRETIEN. Pour faciliter les travaux d’entretien et le nettoyage des différents organes des véhicules diesel, les sections d’entretien sont équipées, d’une part, d’une passerelle surélevée, complétée d’une plate-forme de travail amovible, qui permet de circuler facilement à hauteur du plancher du véhicule, et, d’autre part, de profondes et larges fosses de visite, grâce auxquelles on peut atteindre les organes situés en dessous du châssis et des bogies.

APPROVISIONNEMENTS. Outre les grosses pièces de rechange et les produits de graissage, le magasin compte environ 1.500 articles d’usage courant.

Un magasin auxiliaire, établi à proximité des stands de travail, fournit les pièces d’utilisation journalière, classées par type de véhicule diesel.

NETTOYAGE. Le nettoyage des différents organes a été un problème long et difficile à résoudre. Plusieurs essais ont été réalisés avant qu’on trouve la meilleure méthode et les meilleurs moyens. Citons, parmi ceux-ci :

Le bain dégraissant dans lequel sont plongées les pièces détachées recouvertes d’une couche d’huile ou d’une couche graisseuse mêlée d’impuretés ;

La machine automatique qui débarrasse les filtres à air de leurs impuretés. Après égouttement, ceux-ci sont plongés dans un bain d’huile, d’où ils ressortent utilisables ;

La pompe dont on se sert pour laver, au moyen d’une solution acide, la paroi intérieure des tuyaux spiralés dont sont composées les chaudières des locomotives diesel « voyageurs » ;

PRINCIPAUX APPAREILS DE LEVAGE.

Des ponts roulants, d’une capacité de levage de 3 t, utilisés principalement pour enlever le toit des locomotives et pour déplacer de lourdes pièces de rechange telles que pistons, bielles, cylindres, compresseurs et organes électriques ;

Un ou plusieurs jeux de quatre vérins, destinés au levage des caisses. Grâce à ces engins, qui ont une puissance de levage de 100 t (4 X 25 t), le remplacement de deux bogies d’une locomotive par deux bogies de réserve peut se faire en 4 h ;

Une grue à portique fixe, d’une capacité de levage de 12 t, pour la manutention d’organes lourds tels que bogies, trains de roues et moteurs de traction ;

CIRCULATION DE L’EAU DE REFROIDISSEMENT. La quantité d’eau de refroidissement dans les locomotives diesel de ligne est d’environ 900 litres. Il s’agit d’une eau traitée spécialement. Chaque atelier possède une installation pour l’adoucissement et le traitement de l’eau. Un réseau de répartition distribue l’eau traitée à toutes les sections d’entretien.

APPAREILLAGES ELECTRIQUES. L’entretien des appareillages électriques est confié aux électromécaniciens. Les appareils révisés ou réparés sont chaque fois testés sur des bancs d’essai.

GRAISSAGE. Une locomotive diesel de route exige environ 700 litres d’huile détergente. Les apports au cours des travaux d’entretien atteignent chaque fois 50 à 100 litres. Le remplissage des carters s’effectue à l’aide de pompes électriques aspirant directement l’huile des fûts.

Régulièrement, des échantillons d’huile sont prélevés et analysés dans un laboratoire central, qui utilise des méthodes physico-chimiques et spectrographiques (voir « Le Rail » n° 36). Ces analyses fournissent toutes sortes de renseignements sur les renouvellements d’huile à effectuer, la qualité de la combustion, la présence éventuelle d’eau, la dilution de l’huile provoquée par l’infiltration de gasoil, l’usure des organes principaux.

La même huile de graissage peut, dans des circonstances normales, servir jusqu’à ce que la locomotive ait parcouru 300.000 km ; il peut s’écouler donc plus de deux ans entre deux vidanges complètes du carter.

OUTILLAGE. Pour pouvoir procéder à l’entretien et à la réparation de la fine mécanique et de l’appareillage électrique compliqué des véhicules diesel, l’outillage des ateliers a subi une reconversion systématique. Il suffit de regarder un panneau à outils pour s’en rendre compte.


Source : Le Rail, mai 1966