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La normalisation de la Sambre

A. Couvreur.

mercredi 5 juin 2013, par rixke

Depuis que les travaux de normalisation de la Basse-Sambre sont terminés, les bateaux jaugeant 1.350 tonnes peuvent descendre et remonter le cours de la rivière de Monceau à Namur. Ces travaux avaient été entrepris à la suite de la promulgation, en 1947, de la loi dite des 1.350 tonnes, qui prévoyait la normalisation, entre autres, de la Basse-Sambre, de la Meuse jusqu’à Givet, du canal de Charleroi à Bruxelles, du canal du Centre, du canal Nimy - Blaton - Péronnes, et de l’Escaut.

Au pont Saint-Jacques, pendant les travaux. Les deux voies sont posées sur des tabliers provisoires. A gauche et à droite, les deux nouveaux tabliers en cours de montage sur des appuis provisoires.

La Basse-Sambre est devenue ainsi un chaînon du réseau international à grand gabarit. Elle ouvre sur Bruxelles et Anvers par le canal de Charleroi à Bruxelles, sur la France et le bassin liégeois par la Meuse. La loi dite des 1.350 tonnes a entraîné un élargissement important des sections de la rivière, déjà augmentées au cours des travaux entrepris à la suite des inondations catastrophiques de 1924, 1925 et 1926. Le tracé de la Basse-Sambre normalisée développe une longueur de 53 km, soit 15 km de moins que l’ancien tracé.

Le raccourcissement provient de la rectification d’ensemble du tracé. La rectification la plus spectaculaire se situe à Ham, où la Sambre développait un méandre franchi par trois ponts-rails du chemin de fer. Le nouveau tracé, au sud de la ligne 130, à travers l’éperon rocheux de Ham, a permis un raccourcissement du tracé fluvial de 2 km et l’économie de reconstruction des trois ponts-rails (voir fig. 1).

Fig. 1.

Nous ne nous étendrons pas sur les autres travaux importants entrepris par le ministère des Travaux publics. Citons, entre autres, la construction de 8 nouveaux barrages-écluses en remplacement des 13 ouvrages datant de 1825 et devenus insuffisants, l’établissement de bassins de virement dans chaque bief et l’aménagement de ports privés et publics. Par ailleurs, 23 ponts-routes ont été jetés sur la Basse-Sambre.

En liaison avec la modification du tracé de la rivière et avec l’augmentation corrélative de la section de sa cunette, 13 ponts-rails de notre Société, dont 11 sur la ligne 130 Namur - Charleroi, ont dû être adaptés aux nouvelles normes des 1.350 tonnes. Le tableau de la figure 2 donne les principales caractéristiques de ces 13 ponts-rails franchissant la Basse-Sambre de Monceau à Namur :

  • les superstructures, schématisées en deuxième colonne, sont toutes métalliques ;
  • le record de portée à âme pleine appartient au pont de Floreffe, avec 60 m ;
  • le record de portée en treillis est détenu par le pont de Franière, avec 75,425 m ;
  • le record du biais appartient au même ouvrage avec 45° 10’ 5".
Fig. 2.

Le tablier à double voie de ce dernier ouvrage est aussi, proportionnellement, le plus léger avec ses 542 tonnes (acier de haute qualité).

En ordre général et à la faveur de la construction des nouveaux ponts-rails, il a été jugé plus économique d’implanter ceux-ci suivant un nouveau tracé des voies de la ligne 130, l’entre-distance des axes des nouveau et ancien tracés n’excédant pas environ 17,50 m.

Le ministère des Travaux publics a pris en charge la totalité des dépenses, à l’exception du coût du renouvellement des tabliers métalliques devenus vétustes.

Bien que la voie d’eau soit évidemment la grande bénéficiaire de l’ensemble des travaux, au profit du rail, il faut relever en ordre principal :

  • de nouvelles infra- et superstructures pour les ponts-rails ;
  • l’amélioration de tracés de voies, s’étendant parfois sur plus d’un kilomètre ;
  • l’assainissement de l’infrastructure des nouveaux tracés, dont le ballast a été assis sur sous- couche drainante de sable ou de laitier ;
  • la suppression de ralentissements permanents dus aux rayons insuffisants des courbes ;
  • la désaffectation de plusieurs arches d’inondation ;
  • le transport des superstructures métalliques depuis les usines de construction jusqu’à pied d’œuvre, confié à notre Société (tonnage moyen de 600 tonnes par ouvrage).

Chacun des chantiers différant des autres, tant par les phases d’exécution que par l’implantation relative des anciens et des nouveaux tracés de la rivière et des voies, nous nous proposons de décrire brièvement deux des plus caractéristiques.

La photo nous montre, en cours de déchargement, un des six tronçons de maîtresse poutre de 40 tonnes environ, au pont d’Amptia en gare de Franière. Notre Société a assuré l’acheminement de ces charges encombrantes (environ 4,50 m de hauteur) à la faveur de transports exceptionnels depuis l’atelier situé à Herne-lez-Enghien. Les importants travaux de normalisation de la Basse-Sambre ont pu ainsi souligner une fois de plus l’aptitude de notre réseau à assurer dans les meilleures conditions les transports pondéreux et de grand gabarit.

Pour le pont Saint-Jacques, situé entre Tergnée et Farciennes, la topographie des abords a imposé la construction du nouvel ouvrage en sous-œuvre, c’est-à-dire sous les voies en service, posées sur cinq tabliers provisoires de 27 mètres de longueur, eux-mêmes fondés sur des faux puits de 0,80 mètre de diamètre et d’environ 12 mètres de profondeur. La coupe longitudinale de la figure 3 montre comment les deux nouvelles culées ont été établies à l’abri de fouilles blindées, descendues à 16,40 mètres sous le niveau du rail. Parallèlement à la construction des culées, une seconde entreprise a procédé au montage sur appuis provisoires des deux tabliers définitifs nouveaux, de part et d’autre des voies. Après achèvement des culées et à la faveur de services à voie unique de durée réduite, chacun de ces tabliers a été déplacé transversalement et amené sur ses appuis en quelques heures. Cette conception originale des phases a permis de perturber au minimum l’exploitation, déjà entravée par suite du ralentissement à 20 km/h imposé sur les tabliers provisoires de 27 mètres. Au cours de la même entreprise d’infrastructure, le futur pont-tube qui livrera passage à la voirie de détournement en vue de la suppression du P.N. 125 de Farciennes a été construit, à l’abri d’un sixième et d’un septième tablier provisoire de 27 mètres.

La construction du nouveau pont de Franière a permis de réaliser un nouveau tracé des voies en alignement et en palier sur environ 600 mètres.

Le nouveau pont Saint-Jacques.

Par la même occasion, un P.N. privé (n° 136) et quatre passages inférieurs (servitudes de passage et arches d’inondation) ont pu être supprimés et remplacés par deux passages inférieurs tubulaires d’un débouché plus important. Un pont provisoire de 62 mètres à trois travées (deux piles en rivière) a dû être établi sur l’ancien cours de la Sambre, et un mur de soutènement d’environ 120 mètres, d’une hauteur variable atteignant 7 mètres, a permis le maintien du tracé existant de la route de la Basse-Sambre.


Source : Le Rail, mars 1970