Accueil > Le Rail > Histoire > Les trente ans de l’Expo-58 de Bruxelles

Les trente ans de l’Expo-58 de Bruxelles

mercredi 1er juillet 2015, par rixke

Toutes les versions de cet article : [français] [Nederlands]

Trente ans déjà ! Le 17 avril 1958, S.M. le Roi Baudouin inaugurait l’exposition universelle de Bruxelles.

La cérémonie se déroulait place de Belgique.

Les voitures officielles, encadrées par les cavaliers de la gendarmerie royale, parcouraient alors en un long cortège, les artères principales de l’Expo ouvertes au public.

 Une convention

C’est une convention internationale, signée le 22 novembre 1928 par 21 pays, qui est à la base de l’organisation et de la fréquence des expositions.

Celles-ci sont subdivisées en deux groupes, les expositions spéciales qui n’intéressent qu’un seul sujet déterminé et les expositions générales qui concernent toutes les activités humaines.

Les visiteurs pouvaient admirer du matériel des réseaux allemands, français, italiens, autrichiens, portugais, espagnols, tchèques, suisses, belges et des wagons-lits.

Les expositions générales relèvent de deux régimes : il y a celles de première catégorie, qui entraînent pour les pays participants l’obligation de construire leur pavillon national sur un terrain mis gratuitement à leur disposition par le pays organisateur ; et puis il y a celles de deuxième catégorie qui laissent au pays organisateur le soin d’édifier à ses frais les pavillons pour les pays étrangers.

Le 7 mai 1948, le gouvernement belge, sur proposition du bourgmestre de la ville de Bruxelles, désigne cette dernière comme siège de la prochaine exposition universelle et internationale.

Maquette en 1/2 grandeur d’une voiture-lits.

Le 20 juin 1952, le conseil des ministres retient l’année 1958 pour l’organisation de l’exposition car cette date coïncide avec le 50e anniversaire du rattachement du Congo belge à la Belgique.

En sa séance du 5 novembre 1953, le Bureau international des Expositions entérine la proposition et place l’exposition de Bruxelles dans la première catégorie. La rencontre de Bruxelles s’organise autour du thème : « Bilan du monde pour un monde plus humain » et son meilleur interprète est assurément M. Everarts de Velp, secrétaire général de l’Exposition, dont il faut citer ici quelques propos fort judicieux :

Le matériel était représente par des locomotives, des voitures, des autorails et automotrices, des wagons a marchandises dont certains rail/route.

« Porter témoignage sur une époque — fût-elle la plus belle — est certes toujours malaisé. Mais cette époque que nous vivons est incontestablement une des plus étonnantes, des plus paradoxales, des plus difficilement compréhensibles de l’histoire humaine. Les problèmes qu’elle pose sont incohérents ; les solutions valables aujourd’hui seront dépassées demain : la vérité d’hier risque d’être lettre morte après-demain. L’homme se meut dans un univers qu’il est tenté, à certaines heures, de trouver absurde. »

Dans ce contexte de profondes mutations, il est évident que le chemin de fer avait un rôle non négligeable à jouer.

 Un investissement considérable

Dès mars 1957, la direction de l’Exploitation s’occupe du transport supplémentaire par jour de quelques 10 000 voyageurs belges et 2 300 étrangers.

En accord avec les réseaux voisins, la conclusion s’impose qu’il faut non seulement augmenter la composition normale des trains mais aussi prévoir des trains supplémentaires en relation avec Amsterdam, Cologne, Bâle et Paris.

En octobre de la même année, une organisation internationale « Expo » est mise sur pied.

Dans le même temps, des dispositions sont prises quant au service intérieur des trains : renforcement des trains ordinaires aux heures précédant et suivant les heures d’ouverture des pavillons de l’Expo, organisation de trains supplémentaires les samedis et dimanches...

Enfin, la gare de Schaerbeek est choisie comme centre principal de jonction entre les moyens de transport de la SNCB et de la STIB. A la mi-mai 1958, la direction Commerciale accorde les mardis, jeudis, samedis et dimanches des réductions sur les billets « Expo » allant de 35 à 50 % selon les distances.

Le visiteur était aussi convie a visiter une petite salle dont la forme rappelait celle d’un poste de conduite d’une locomotive électrique.

A la fin de l’Expo, nos gares avaient délivré 668 000 billets « Expo » à prix réduit et environ 1 320 000 tickets combinés « tram-Expo ». En tout, 1 685 trains spéciaux avaient transporté 684 000 voyageurs. Le record d’affluence a été battu le dernier jour de l’Expo, soit le 19 octobre, où 13 trains spéciaux en service international vers et de Bruxelles et 69 en service intérieur ont dû être formés pour assurer le transport des visiteurs.

 Une présence remarquable

Au rez de chaussée du Grand Palais du Heysel, transformé pour la circonstance en un vaste service de réception, se trouvait un « Centre d’accueil ». Ce centre était dirigé par monsieur Laloni, président du Centre d’information des chemins de fer européens (CICE) et animé par dix représentants : un Allemand, un Anglais, un Français, un Hollandais, cinq Belges et un représentant des Wagons-lits.

Leur rôle consistait à renseigner les visiteurs, à vendre des billets et à réserver des places dans les trains internationaux. A gauche des Grands Palais, une vaste étendue était réservée aux trois groupes suivants : l’aéronautique, les transports maritimes et fluviaux et les transports terrestres.

Le rez de chaussée de ce vaste complexe était occupé par les constructeurs belges de matériel roulant, tandis que l’étage nord d’une superficie de 1 400 m2 l’était par la SNCB, les Wagons-lits et l’Office de la Jonction.

Notre Société avait, pour l’heure, choisi de séduire le public ! Dès son arrivée, celui-ci était confronté à une maquette de la jonction longue de 42 m, parcourue par un service de trains miniatures, composés de voitures belges et de rames internationales. La maquette se complétait d’un pupitre de commande de ces miniatures et d’un appareil annonçant la voie des trains au départ. Un tableau de contrôle optique permettait également de suivre les manœuvres des trains miniatures pour la partie représentant la gare du Midi.

Outre ce « petit joyau », le stand proposait encore un bureau de répartition (dispatching) commandant une ligne du réseau (celle de Bruxelles à Liège, en l’occurrence), le schéma d’une sous-station électrique et une ligne caténaire avec exposition de ses pièces. La signalisation était aussi au rendez-vous, tant la routière que la ferroviaire avec un signal lumineux, un appareil de manœuvre électrique d’aiguillage et une connexion inductive.

Le visiteur pouvait également observer à loisir la composition de trains de marchandises dans une gare de formation. Les Wagons-lits, eux, avaient construit une maquette en demi-grandeur d’un compartiment de voiture-lits.

De cet étage, une passerelle enjambait l’emplacement mis à la disposition des sections étrangères et belges pour exposer le matériel roulant des chemins de fer.

Ce parc international d’un hectare et demi comptait huit voies, des quais, une cour et une aire d’évolution, où étaient exposés des locomotives électriques et diesel, des voitures J et N, des automotrices et autorails, des wagons à marchandises et du matériel à marchandises rail-route.

L’Union internationale des Chemins de fer (UIC) disposait également d’un stand de 500 m2 que ses responsables avaient organisé autour de quatre thèmes : le caractère moderne du chemin de fer, sa haute productivité, sa vocation européenne et le chemin de fer, instrument de progrès des relations humaines.

Ces quatre aspects avaient été illustrés respectivement par la SNCF, la DB, la SNCB en collaboration avec l’UIC et la FS et l’opération coordonnée par les CFF. La vocation européenne des chemins de fer prenait là toute sa signification.

 Un enjeu de taille

Le chemin de fer d’alors était à un tournant : le monde moderne lui imposait des obligations nouvelles, celles de concilier notamment les inévitables progrès techniques et les exigences de confort et de sécurité, l’amélioration des prix de revient et l’humanisation des conditions de travail. Mais déjà, ces impératifs étaient potentiellement compromis par les difficultés budgétaires, ce qu’exprimait parfaitement Louis Armand, président de l’UIC, dans un article paru dans la presse française :

« Dans des pays qui sont aux prises avec de graves difficultés budgétaires, on ne peut concevoir qu’un service public, condamné en quelque sorte au régime du déficit, aille recourir à des équipements coûteux s’il ne les utilise pas de façon intensive. Les réseaux ont besoin d’un parc de matériels unifiés, de stations d’essais pour la tenue en marche des engins moteurs ou remorqués, c’est-à-dire d’installations que les techniques modernes rendent très coûteuses et qui doivent, pour autant, être réalisées à frais communs et fonctionner dans l’intérêt de tous. Dans ce domaine, l’Office de recherches et d’essais (ORE) constitue un instrument parfaitement adéquat qui rend d’éminents services. »

Ces réflexions restent d’une actualité évidente mais ce n’est pas l’heure d’en discuter. Le fait était néanmoins à relever.

 Note finale

Nous ne terminerons pas cette évocation sans dire deux mots des précieuses collaboratrices que furent les hôtesses du rail belge !

Engagées pour l’événement, elles furent invitées à suivre un stage intensif de deux mois auprès de spécialistes du service commercial pour recevoir et renseigner les voyageurs de tous bords.

Leur uniforme se composait d’un ensemble coquet en tissu bleu roi, agrémenté de deux poches et d’un petit calot orné d’une roue ailée, surmontée par la couronne royale. Réparties dans les principales gares belges, à l’arrivée des grandes lignes internationales, au pavillon de l’Information place de Brouckère et à l’Expo même, elles avaient été sévèrement sélectionnées pour leur maîtrise des langues étrangères. Ayant de plus une bonne culture générale et ferroviaire, elles ont assumé leur rôle à la perfection.

A tel point que même les jours de congé, elles ne pouvaient s’empêcher de fréquenter l’Expo.

On peut en dire autant de tous ceux qui l’ont vécue de près ou de loin. Et ceux qui l’ont visitée en restent imprégnés.

Enfin, pour les plus jeunes, l’Atomium en reste le symbole le plus impressionnant.


Source : Le Rail, septembre 1988