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Où en est l’« automation » à la S.N.C.B. ? (IV)

Claude Vial.

samedi 14 octobre 2017, par rixke

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 Le détecteur de boites d’essieu chauffantes.

Dans le vocabulaire du cheminot, une boîte « chauffante » est une boîte d’essieu de wagon qui s’est échauffée de façon anormale. Si elle n’est pas découverte à temps, il naît un risque croissant d’incendie ou d’accident. On estime que la température intérieure d’une boîte d’essieu devient dangereuse dès que celle de ses parois dépasse 50°.

Les nouvelles boîtes d’essieu à rouleaux sont conçues de manière à ne jamais normalement provoquer de « chauffage », affirment les experts. Mais tous les wagons belges et étrangers qui empruntent notre réseau n’en sont pas encore pourvus ; nombre d’entre eux sont encore équipés de boîtes à palier lisse, plus sujettes à l’échauffement.

En attendant donc, la détection électronique continue à remplir son rôle précieux.

C’est en 1961 qu’un premier détecteur fut mis à l’essai, en gare de Forrières. Sa première « victime », le conducteur d’un train de minerai, fut passablement éberlué, me raconte-t-on, de se voir arrêter à Jemelle et d’être interpellé par le visiteur, dans un style très Sherlock Holmes : « Vous avez une boîte chauffante, côté gauche, au 34e essieu à partir de l’extrémité arrière du train ».

Le détecteur de Forrières avait rempli son office. Le wagon défectueux put ainsi être décroché bien avant que le danger devienne imminent.

Ce détecteur d’essai pouvait surveiller, au passage, tous les trains roulant jusqu’à une vitesse de 100 km/h. Les installations actuelles permettent le contrôle de trains roulant jusqu’à 200 km/h.

Qu’est-ce qu’un détecteur de boîtes chauffantes ? Cet appareil est composé de deux lecteurs électroniques disposés de part et d’autre de la voie. Leur axe optique est dirigé obliquement, de façon à atteindre le côté arrière de chaque boîte — face qui reflète le mieux la température intérieure de la boîte. Chaque lecteur comprend une cellule particulièrement sensible aux rayons infrarouges, qui peut mesurer parfaitement, au passage, la température exacte de toutes les boîtes d’un train.

De ce fait, évidemment, un problème se posait. Le soleil, dardant ses rayons sur la cellule, ne risquait-il pas de provoquer de nombreuses et inutiles alertes et de jouer ainsi au berger de la fable ? Les constructeurs ont donc prévu un écran obturateur. Le lecteur est protégé contre les rayonnements étrangers et ne se découvre qu’au passage du train. En outre, grâce à une régulation électro-thermique très délicate, il n’enregistre que le rayonnement émis par les boîtes d’essieu.

De plus, les lecteurs sont chauffés intérieurement par un thermostat ; leur température n’est jamais inférieure à 25°. Ils ne courent donc pas le risque d’être obstrués par la neige ou la glace.

Passant par différents appareils d’amplification et de transmission, les indications relevées par les lecteurs sont traduites « en clair » sur une bande de papier qu’un appareil d’enregistrement, situé dans une cabine à quelques kilomètres de là, déroule à chaque passage de train. Des traits successifs s’y inscrivent ; leur longueur correspond à la température de chaque boîte. Une température normale oscille autour des 30°. Un trait beaucoup plus long attire immédiatement le regard du personnel de la cabine. Le regard... et l’oreille, car le signal optique est doublé d’un signal acoustique

Le train pourra être arrêté ou dérouté vers une gare proche où le véhicule défectueux sera examiné. Que le voyageur qui peste contre un arrêt intempestif (j’en ai été, « mea culpa ! ») songe au détecteur électronique dont la vigilance a peut-être évité un accident.

(A suivre.)


Source : Le Rail, février 1970