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Un musée pour s’amuser

mercredi 25 décembre 2019, par rixke

Il est peu de musées qui retiennent l’attention des enfants, parce qu’on n’y peut rien toucher, qu’on y tolère peu le chahut et encore moins les galopades. Légitimement. Conscients néanmoins des besoins des enfants et de leur turbulence, d’aucuns conservateurs ont imaginé des formules pour titiller leur curiosité, pour dynamiser les visites et les rendre plus conviviales, en impliquant toute la famille dans des jeux de piste par exemple.

Il existe cependant un musée où chacun, quel que soit son âge, éprouve grand plaisir à déambuler, à jouer et à rire : c’est le musée du jouet dont l’animateur a fait le choix de laisser les enfants s’exprimer. Installé dans un vieil hôtel de maître de 1880 aux boiseries intactes, le musée occupe trois étages, en ce compris le rez-de-chaussée. Sitôt la porte cochère franchie, le visiteur pénètre dans une véritable caverne d’Ali Baba où jouets, peluches et dînettes complotent pour vous étourdir. Vos deux yeux ne suffisent pas à dresser l’inventaire des trésors entassés là, pêle-mêle.

Arrêtons-nous un instant dans la grande salle que surveille, goguenard, un funambule à vélo. Chaque vitrine, fermée, propose une série de jouets composant une scène thématique particulière : celle-ci protège des poupées de cire et d’autres en papier, à habiller ; une autre des jeux Meccano dont un bel exemplaire de grande roue actionnée par un petit moteur mécanique et qui fonctionne 48 heures sans arrêt ; celle-là des modèles réduits de voitures des années 10, 20 et 50, de marques allemande, anglaise, française et italienne ; une autre encore des machines à vapeur destinées à alimenter le mécanisme de vieux métiers : on y voit un rémouleur, un bûcheron... à la tâche. Ailleurs, c’est la fête foraine qui est à l’honneur ou les peluches qui racontent leur méthode de fabrication. Vous avez la nostalgie de votre tambour cabossé ? Qu’à cela ne tienne, un petit détour du côté de la mini-cuisine équipée et vous y verrez des instruments de musique dont deux superbes petits accordéons.

Adjacente à la grande salle, une autre, de plus petite taille, est envahie par un grand circuit de trains électriques pour l’instant en panne. Il est vrai que son mécanisme est fort sollicité par petits et grands, passionnés du rail. Aux murs sont exposés dans des vitrines, bien sûr, des modèles réduits de trains de la CIWL, des ferry-boats ainsi qu’une collection presque complète de trains Gils dont la renommée n’est plus à faire.

Terminons la visite du rez-de-chaussée par la dernière salle où bricole M. Raemdonck, le conservateur de ce lieu. Eclectique, elle abrite Dinky Toys et soldats de plomb, jouets en bois et trains Hornby. On y voit aussi des figurines en plâtre de Durso dans une scène historique, le voyage du Roi au Congo.

Avant de grimper le monumental escalier, admirons au passage la reconstitution d’un marchand de jouets des années trente, appelé plaisamment « Au petit paradis ». Le premier étage, par comparaison avec le bric-à-brac du dessous, paraît presque dénudé. Et pourtant que de thèmes abordés : les moyens de transport dans le hall ; l’armée, les Indiens, l’histoire du Petit Chaperon rouge, la saga de Guillaume Tell racontées par des figurines Lucotte et les châteaux-forts dans la première salle ; une chambre 1900 dans le couloir et une salle de classe dans la dernière pièce, meublée avec des pupitres du début du siècle. Une pièce est également réservée aux jouets agrandis parmi lesquels on peut citer une école maternelle, un minibus, une ferme, un tram et un cirque. Précisons que ces agrandissements sont effectués dans la maison et selon des modèles exposés dans le musée. Ces objets sont toujours fabriqués en double exemplaire pour permettre leur prêt sans dégarnir le musée. Enfin abordons le dernier étage où est aménagée une salle pour les goûters d’anniversaire que propose aussi le musée. Cette salle est décorée avec des jouets de plage et des bateaux des marines marchande et de guerre. Le couloir est occupé par une vitrine de jeux de construction, et ses murs sont garnis, à leur sommet, de mini-circuits en fer blanc. La deuxième pièce, qui peut aussi accueillir des goûters, est abondamment décorée de théâtres, classique et de papier. S’y trouve aussi un atelier ferroviaire et sa plaque tournante. Le hall est entièrement consacré aux jeux optiques et lanternes magiques. On accède à la dernière pièce par une galerie aménagée autour des célèbres poupées Schildkrôt. Cette pièce abrite un théâtre de marionnettes qu’anime chaque troisième dimanche du mois un bénévole. Aux murs se succèdent des châteaux de toute sorte.

Vous l’aurez compris, le musée est un lieu vivant où il se passe toujours quelque chose. Son fondateur, M. Raemdonck, y est occupé du matin au soir 365 jours par an. Aidé par quelques étudiants et bénévoles, il accueille, anime, restaure, répare et agrandit des jouets avec le même plaisir, avec la même passion. Rien ne le prédestinait à cette fonction pourtant, si ce n’est l’amour des enfants (il en a six) et l’envie de les amuser. Tout a commencé il y a longtemps quand il animait les fêtes des écoles en y installant des circuits de trains miniatures que les enfants pouvaient emprunter. Sollicité de plus en plus souvent, il en vint à prendre en grippe ses déplacements de fêtes en foires aux jouets et son cortège de déballages. Petit à petit s’est imposée l’idée d’un musée fixe et permanent qui se concrétisa en décembre 1984 par la constitution d’une asbl et son installation dans des locaux vacants du Centre Anspach. Chassé de ce haut lieu du commerce en 1988, il acquit en 1990 le numéro 24 de la rue de l’Association où il est aujourd’hui définitivement installé. Subsidié modestement par la Communauté française, le musée est géré en bon père de famille. L’on fait tellement de choses avec si peu, qu’un jour on y fera tout avec rien, a coutume de dire M. Raemdonck qui fait les brocantes dès potron-minet pour y dénicher le jouet rare.

Tout ? Citons dans le désordre, l’organisation de goûters d’anniversaire pour lesquels il confectionne lui-même le gâteau au chocolat ; la location, pour des étalages ou des décors de films, de jouets d’époque ; la mise à la disposition des élèves d’une nombreuse documentation ; l’organisation de visites guidées, de visites de prestige, de bourses d’échanges... Et même la transmission à saint Nicolas des lettres que les enfants lui adressent ! A propos, si on allait jouer au musée plutôt que de rendre visite au saint Nicolas de pacotille de la grande surface d’à côté ?

Virton-Saint-Mard
Intérieur de la gare
Athus Gare

Source : Le Rail, Décembre 1994