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50 ans d’histoire : chemins de fer luxembourgeois
René Danloy.
mercredi 24 novembre 2021, par
Le samedi 7 septembre dernier, les Chemins de fer luxembourgeois (CFL) ont fêté avec faste leur cinquantième anniversaire en organisant une rencontre de locomotives à vapeur au dépôt de Luxembourg. Matériel ancien réparti dans la rotonde, vente de souvenirs, circulations en train à vapeur, modèles réduits, tout avait été prévu pour séduire le visiteur pris en charge dès la gare de Luxembourg où un service de navette vers le dépôt avait été mis sur pied. Voyons donc comment naquirent les CFL mais aussi quelle fut leur évolution.
De Guillaume-Luxembourg et Prince Henri à la SNCFL
Les quatre premières lignes ferroviaires du grand-duché furent mises en service entre 1859 et 1867. Elles avaient pour destination Arlon, Thionville, Wasserbillig et Gouvy. Elles allaient constituer en fait la trame du réseau, lequel était à l’époque exploité par les compagnies Guillaume-Luxembourg et Prince Henri.

Le projet d’une unité ferroviaire nationale n’allait cependant aboutir qu’au terme de la Seconde Guerre mondiale et, le 17 avril 1946, la signature de la convention belgo-luxembourgeoise relative à l’exploitation des chemins de fer du grand-duché mettait fin à nonante années de tergiversations diplomatiques, de prises d’intérêts économiques, de crises politiques et de marchandages à l’égard du rail luxembourgeois.

Était désormais constituée – pour une période de cent ans – la Société nationale des chemins de fer luxembourgeois (SNCFL) à laquelle était confiée la gestion du réseau enfin unifié, ce avec la participation du grand-duché, de la Belgique et de la France. Cela signifiait donc que s’installait une coopération étroite entre les sociétés ferroviaires des trois nations...
Une naissance difficile
Effectivement, les choses, au départ, ne furent pas simples. La guerre avait laissé de graves séquelles : un cinquième des installations techniques, des ouvrages d’art et du matériel roulant était inutilisable à la suite des bombardements aériens. Plus de la moitié des ateliers de réparation et des dépôts de locomotives étaient détruits.

Quelque 82 ouvrages d’art, plus de 40% de l’outillage, de même qu’une grande partie des installations de sécurité et des communications avaient été anéantis. À lui seul, le réseau Prince Henri avait perdu quelque 60% de ses locomotives, voitures et fourgons ainsi que 87% de ses wagons.
Dès le 27 septembre 1944, via les journaux, les cheminots luxembourgeois furent invités à regagner leur poste de travail. La remise en état provisoire des infrastructures ferroviaires fut partiellement réalisée par les troupes du génie et des armées alliées.

Or, si le grand-duché avait jugé bon d’intéresser la Belgique et la France à l’exploitation de son réseau afin que la circulation internationale n’en fût point détournée, il fallut également se soucier des premiers problèmes d’urgence, à savoir la pénurie d’engins de traction lourds. C’est ainsi que, dès 1946, les CFL mettaient en service dix locomotives à vapeur de la série 47 « Libération » et dix autres de la série 56. L’année suivante, un deuxième lot de dix unités de la série 56 fut livré puis une vingtaine de locomotives de 1 695 ch de la série 55 vinrent compléter le parc à vapeur en 1949.
La première électrification
Déjà, les dirigeants des CFL avaient bien compris que l’ère de la vapeur touchait à sa fin et, la même année, dix autorails « De Dietrich » à moteurs diesel de 320 ch faisaient leur apparition, bientôt suivis – deux ans plus tard – de dix autorails légers « Ürdingen » de 110 ch. En 1953, l’acquisition de treize locomotives diesel d’une puissance variant entre 450 et 800 ch permit de retirer des faisceaux de triage les engins à vapeur lourds et peu aptes à des opérations de manœuvre. Et, en 1955, les quatre premières locomotives diesel de ligne sillonnaient alors le réseau : les fameuses AFB de 1 600 ch qui restèrent en service près de quarante ans.
Cependant, les lignes à voie étroite – déjà déficitaires avant la guerre – pesaient de plus en plus lourd dans la balance et, progressivement, à partir de mai 1948, la circulation y fut assurée par un service routier. Quant aux lignes secondaires à voie normale, elles connaissaient les mêmes problèmes et, dans les années 50, la route s’y substitua au rail sur une longueur totale de 127 km.
Bientôt il convint aussi de penser à l’électrification, les pays limitrophes – dont le nôtre – s’étant déjà fortement engagés dans la traction électrique. En effet, le grand-duché ne voulut pas courir le risque, en demeurant un îlot où régnerait le moteur diesel, de voir les trains internationaux en direction de l’Italie prendre d’autres itinéraires. C’est ainsi que la première phase du projet d’électrification du réseau, soit la ligne Zoufftgen (frontière française) - Luxembourg - Kleinbettingen (frontière belge) fut approuvée le 21 décembre 1953. Un peu moins de trois ans plus tard avait lieu l’inauguration officielle.
Des CFL partenaires de l’avenir
La période des années 70 fut caractérisée par une activité économique débordante et, de 1973 à 1974, les transports de marchandises par rail augmentèrent de 10,2% avec un record de 23 millions de tonnes acheminées sur un réseau de 271 km en 1974 ! Survint alors le choc de la première crise pétrolière et les responsables des CFL se tournèrent une fois encore vers une modernisation de leur outil afin de comprimer les coûts. Ainsi fut aménagé le triage central de Bettembourg-Dudelange dont l’inauguration eut lieu le 15 octobre 1982. Deux ans plus tard, la reprise tant attendue était au rendez-vous et, la lente progression qui suivit culmina en 1994 avec 19,2 millions de tonnes transportées, ce qui représentait la meilleure performance depuis vingt ans !

Aujourd’hui, les CFL occupent environ 3 200 personnes et exploitent 275 km de lignes, auxquels il faut ajouter 395 km de lignes desservies par des autobus. Ils assurent tous les jours quelque 8% de l’ensemble des déplacements au sein du pays, participant encore à l’acheminement d’une part grandissante des 60 000 « navetteurs » frontaliers travaillant au grand-duché. Les CFL sont également prêts à relever tous les défis que l’avenir réserve à un rail en pleine mutation. À preuve, cette commande de vingt locomotives électriques d’une nouvelle génération, émise conjointement à celle de soixante engins du même type faite par la SNCB...
Source : Le rail, novembre 1996