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L’attelage automatique pour 1976-1980 ?

mardi 9 février 2010, par rixke

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Deux wagons plats, quelques instants après le désaccouplement des têtes d’attelage.

Le Comité de gérance de l’Union internationale des Chemins de fer, composé des directeurs généraux de quatorze réseaux européens, qui se réunit sous la présidence de M. L. Lataire, directeur général de la S.N.C.B., voudrait obtenir la réalisation de l’attelage automatique des wagons à marchandises entre 1976 et 1980. Un type d’attelage automatique adapté aux conditions des réseaux européens a été créé en collaboration avec un groupe industriel international. Des essais sont en cours et se déroulent favorablement. Les problèmes financiers poses ont déjà été abordés et des solutions communes ont été esquissées. Ces problèmes ne pourront être définitivement résolus qu’avec Ie concours des gouvernements.

Voici, à titre documentaire, l’avis de M. Louis Armand :

« Voir des wagons ultra-modernes, dans un triage ultra-moderne, être attelés à la main, c’est un peu comme si l’on voyait une duchesse aller au bal de l’Opéra chaussée d’espadrilles » ; c’est ce qu’écrivait récemment, non sans humour, un journaliste américain qui venait de visiter les chemins de fer européens.

Il est exact qu’a l’époque où Ie chemin de fer s’apprête à introduire la cybernétique dans ses méthodes de gestion et d’exploitation, l’attelage manuel constitue un anachronisme. Depuis longtemps, l’Union internationale des Chemins de fer (U.I.C.) s’est attachée à résoudre ce problème de l’attelage automatique des véhicules. Or, aujourd’hui, l’on peut considérer les problèmes techniques comme pratiquement résolus.

Ils étaient pourtant difficiles : l’Europe doit, en effet, réaliser un attelage automatique qui soit différent des attelages existant en Amérique, en Russie, au Japon, car ces attelages datent du siècle précédent et, aujourd’hui, l’attelage doit comporter l’automaticité de l’accouplement des conduites de freins et des conduites électriques. Il fallait donc un principe différent d’attelage, non pour vouloir perfectionner à tout prix, mais simplement parce que celui qui réalise en dernier doit tenir compte des problèmes du jour. Les Américains étudient la transformation de leur attelage, les Russes également ; ces derniers l’étudient d’ailleurs dans le même esprit que nous puisque l’attelage automatique européen sera accouplable avec l’attelage russe, supprimant ainsi l’hiatus entre les réseaux du continent, même si l’écartement des voies est différent.

Les programmes que nous avons établis prévoient que l’application de l’attelage automatique pourrait commencer dès Pâques 1976. La semaine de Pâques est une de celles durant lesquelles le trafic « marchandises » est en général moins fort, et la transformation pourrait se faire sans perturber notablement l’économie des pays. 1976 est donc la date à laquelle l’attelage automatique serait mis en place pour le trafic international. Progressivement, l’équipement se poursuivrait dans les réseaux, à des cadences qui dépendraient des possibilités de financement de chacun d’eux ; la fin de l’équipement se situerait entre 1980 et 1990.

  1. le levier de déverrouillage de l’attelage automatique.
  2. Le coupleur des canalisations électriques.
  3. Les coupleurs des canalisations pneumatiques.
  4. Les couvercles de protection des coupleurs.
  5. Les couvercles rabattus.

Il est maintenant reconnu, et les réactions américaines sont absolument nettes à ce sujet, que le chemin de fer, pour le service des marchandises, peut devenir un outil parfaitement automatisé car, par sa nature, il peut l’être aussi facilement qu’un simple ascenseur.

Pour automatiser entièrement le chemin de fer, il n’est nul besoin d’attendre les progrès de la cybernétique, des ordinateurs, du télétraitement, car nous disposons, dès à présent, de tout ce qu’il faut pour y parvenir.

Nous en sommes au point où nous cherchons plutôt à définir une méthode globale d’automatisation sans pousser plus loin les progrès qu’on peut appeler sectoriels, tels que la commande automatique des trains, des locomotives (cela pourra être réalisé dès qu’on le voudra), la commande entièrement automatique des triages (ceci peut aussi être fait à volonté), la circulation automatique sur une ligne (elle existe et on peut la perfectionner). Ce qu’il faut, c’est concevoir une architecture, bâtir l’ensemble d’un chemin de fer entièrement automatisé, dans lequel les machines donneront, avec certitude, aussi bien les prix de revient que l’ordre de circulation des convois.

Dans ce chemin de fer de demain, où le wagon sera utilisé deux fois mieux qu’aujourd’hui, avec un personnel notablement réduit, l’attelage automatique n’est qu’un des éléments de l’ensemble, et c’est la un fait essentiel.

Il ne faut pas séparer la notion de rentabilité de l’attelage automatique, et la plus grande erreur que pourraient commettre les économistes serait de considérer l’attelage automatique comme une opération isolée ; c’est, en effet, une opération qui fait partie d’un ensemble. Il convient donc bien de prendre en considération l’attelage automatique comme une des conditions préalables à l’automatisation générale des chemins de fer (...).

L’année 1976, date prévue pour l’application de l’attelage automatique, apparait comme une date raisonnable qu’il faut respecter, plutôt que de retarder l’opération jusqu’a la fin du siècle, en arguant la dépense importante qu’elle représente. Cette dépense peut être sensiblement réduite si les réseaux ont la sagesse de décider que tous les wagons ne doivent pas obligatoirement être équipés, les uns parce qu’ils sont trop vieux, les autres parce qu’ils doivent figurer dans la composition des futurs « trains-blocs », où l’attelage automatique complet sera inutile (...).

Les chemins de fer européens des pays de l’Est ont prévu, eux aussi, l’équipement de leurs véhicules pour 1976. Ces réseaux ont une importance considérable ; c’est ainsi que les chemins de fer polonais assurent un trafic « voyageurs » égal a celui de la S.N.C.F. et un trafic « marchandises » sensiblement supérieur ; que les chemins de fer roumains ont un très fort trafic « marchandises ». L’ensemble de ces chemins de fer a planifié l’attelage automatique pour 1976 ; il serait regrettable que les réseaux de l’Europe occidentale fussent en retard dans l’équipement du parc « marchandises » européen. C’est pourquoi une décision en ce domaine apparait éminemment souhaitable... " »


Source : Le Rail, février 1970