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Des voitures à deux niveaux pour la première fois à la SNCB
H. Van Den Eynden.
lundi 21 avril 2008, par
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| Depuis plusieurs années, la SNCB est confrontée aux problèmes du trafic de navetteurs sur Bruxelles et de la saturation de la jonction Nord-Midi. Augmenter le nombre de trains est impossible puisque ce nombre est déjà très élevé ; allonger les convois est hors de question à cause des limites imposées par la longueur des quais. La SNCB a adopté des lors la solution des trains à deux niveaux. |
Le modèle : les voitures à deux niveaux de la SNCF
La SNCF a mis en service des trains à deux niveaux, depuis quelques années déjà, afin d’améliorer le trafic de navetteurs très important sur Paris.
La capacité en places assises est ainsi pratiquement doublée.
Les portes et plates-formes sont spacieuses afin de faciliter l’embarquement et le débarquement des voyageurs.
Cette solution a entièrement satisfait la SNCF ; c’est pourquoi la SNCB a adopté cette idée, moyennant quelques aménagements.
La rame à deux niveaux de la SNCB
La rame à deux niveaux belge est réversible ; elle est munie à une extrémité d’une locomotive et à l’autre d’une voiture pilote. La présence d’un étage suppose l’abaissement du « rez-de-chaussée » jusqu’à la limite du gabarit : aucun appareillage ne saurait donc être installé en dessous de la caisse. Et puisque l’espace est consacré exclusivement aux voyageurs, la rame est alimentée en énergie provenant de la voiture pilote (BDX) qui comprend le convertisseur d’énergie et la batterie d’accumulateurs basse tension. La composition maximale n’est que de 10 voitures, BDX comprise : sinon la puissance produite par le convertisseur d’énergie serait insuffisante et la tension trop basse pour la dernière voiture, du fait des chutes de tension le long des conduites électriques.
Les voitures
Les voitures doivent répondre à plusieurs critères :
- Convenir au trafic des navetteurs ;
- Garantir un confort optimal ;
- Avoir un prix de revient raisonnable ;
- Être livrée dans les meilleurs délais.
L’offre de confort
L’offre de confort est moindre que dans les voitures conventionnelles : les plates-formes sont plus spacieuses, la hauteur disponible est réduite et les porte-bagages sont impossibles à installer, surtout au premier étage.
Le plancher de l’étage inférieur est surbaissé (on y accède par un petit escalier) et se situe entre les longerons de la caisse qui constituent de ce fait une sorte de tunnel empiétant sur l’espace réservé aux pieds des voyageurs. Afin de pallier cet inconvénient on les a aménagés en repose-pieds. Les voitures de première et deuxième classe sont identiques ; la conception des compartiments est la même : son étude est ainsi simplifiée et les frais moins élevés ! Pour compenser le moindre confort, les voitures de seconde classe comptent 4 places de front, au lieu de cinq actuellement. En outre, le pas des compartiments (distance entre dossiers) a été augmenté par rapport à celui de la SNCF (bien qu’encore inférieur à celui du matériel SNCB conventionnel). La perte de place qui en résulte est compensée par une caisse plus longue. D’autre part, les rames doivent pouvoir circuler sur n’importe quelle ligne du réseau (et non pas sur quelques axes bien définis comme en France) ; la caisse répond donc au gabarit universel SNCB et c’est pourquoi la partie supérieure des longs pans (la paroi latérale de la caisse) est tellement inclinée. Il s’agit donc d’un projet qui diffère sensiblement du modèle français dont il reprend seulement les idées de base.
Cette étude a été réalisée par le constructeur dans un délai record, ce qui mérite d’être épingle.
Les bogies Y 36 P
Construits selon les plans de la SNCF, ils comprennent évidemment le frein et sont munis de roues d’un diamètre plus petit que normalement puisqu’ils sont installés sous un plancher plus bas. La capacité des voitures étant plus importante, seule une suspension à air comprimé est à même de supporter une telle charge, quand les voitures sont complètement occupées.
L’air comprimé de cette suspension est distribué par la locomotive, éventuellement assistée ou remplacée par un compresseur se trouvant dans la BDX.
L’intérieur
Les deux compartiments sont accessibles aisément par les larges escaliers dont la disposition diffère de celle de la SNCF et est due à une étude poussée des NS. Les essais ont en effet montré que la circulation des voyageurs se fait plus vite avec un escalier montant à gauche et un descendant à droite plutôt qu’un escalier montant central et deux escaliers descendants latéraux (comme ceux de la SNCF, qui va y renoncer dans ses nouvelles rames).
Le niveau supérieur
A l’étage supérieur, le plafond est très bas, les baies vitrées sont très inclinées mais la vue est superbe. Assis à la fenêtre, le voyageur se sent un peu opprimé du fait du gabarit réduit.
Les porte-manteaux se trouvent aux extrémités des tringles et sont donc sans danger pour les gens.
Il n’y a aucun porte-bagages et aucune tablette par manque évident de place. Les banquettes sont aussi plus rapprochées.
Deux bandes lumineuses de part et d’autre du plafond éclairent suffisamment le compartiment : 550 lux, soit 1/3 de plus que dans la M4, 1re classe.
Enfin, les compartiments fumeurs s’y trouvent toujours pour d’évidentes raisons d’hygiène.
Le niveau inférieur
L’escalier plus petit de droite conduit au niveau inférieur, dont l’assise surbaissée, procure une étrange impression. Ici aussi le plafond est très bas mais la perspective est corrigée par la présence de panneaux réfléchissants qui le recouvrent. Deux bandes lumineuses assurent ici au lecteur un éclairement de 650 lux.
Porte-bagages et colis sont également absents. Le compartiment est divisé en sa moitié par une porte vitrée afin d’éviter tout courant d’air, aucune porte ne l’isolant effectivement de la plate-forme.
Habillage des voitures
Les rames à deux niveaux étant destinées au trafic navetteurs à moyenne distance, leur aménagement a été conçu de manière à les rendre pratiques, gaies et agréables.
Les couleurs sont crème et topaze, la quincaillerie est recouverte d’une couche épaisse et résistante de « RILSAN » rouge. Deux lignes dans le même rouge bordent les luminaires.
En 1e classe, les banquettes sont recouvertes de tissu, et sont pourvues d’accoudoirs ; en seconde, le simili-cuir éprouvé des M4 remplace le tissu.
Les rideaux sont rouge orangé et encadrent les fenêtres qui s’ouvrent au moyen d’une manivelle jusqu’à leur moitié.
Chauffage et ventilation
Le chauffage est assuré par la ventilation d’air chaud, au niveau du plancher. Le système classique d’air soufflé au niveau des fenêtres est dans ce cas tout à fait exclu. Chaque niveau possède son installation propre et indépendante. La régulation dépend des températures intérieures et extérieures et celle-ci fonctionnera pour la seconde série de rames grâce à un micro-processeur (ou mini-ordinateur).
Dans le même temps, certaines pannes ou inconvénients seront mémorisés et aideront ainsi l’équipe d’entretien dans son intervention.
La voiture BDX
A maints égards, la BDX occupe une place importante dans la rame :
- Elle permet l’exploitation de la rame en réversibilité : le poste de conduite est équipé comme celui des locomotives récentes et c’est de là que sont envoyés les ordres du conducteur vers la locomotive (à travers les câbles multiconducteurs de la rame) si celle-ci doit pousser la rame.
- Pour la sécurité du conducteur, le poste de conduite est surélevé et muni d’un bouclier robuste pour résister le mieux possible aux collisions.
- La BDX abrite aussi le convertisseur d’énergie de 65 kW, seule source d’énergie de la rame. Sa tâche consiste à convertir l’alimentation en 3 KV continu, (captée par la locomotive à la caténaire) en une tension continue de 24 V et une tension alternative et triphasée de 220 V - 380 V. Le courant continu de 24 V sert à la charge de la batterie unique de la rame (montée dans la BDX) et à l’alimentation d’une partie de l’éclairage des voitures. La tension triphasée alimente les ventilateurs du chauffage ainsi que le compresseur d’air pour la suspension pneumatique. Le convertisseur et le compresseur se trouvent dans un compartiment du niveau inférieur et sont accessibles aussi bien de l’extérieur que du couloir central. Des cloisons et portes pare-feu protègent l’installation contre tout risque d’incendie.
- La BDX se distingue à peine des autres voitures de seconde classe ; elle compte néanmoins un local réservé au chef garde et un compartiment spécial pour handicapé en chaise roulante accessible par un plan incliné et dans lequel les banquettes ont été remplacées par des strapontins.
Conclusion
Les rames à deux niveaux sont une petite révolution dans le domaine ferroviaire.
Puissent-elles conquérir le public malgré un confort compromis par sa conception et résoudre les problèmes de trafic au mieux des intérêts de la SNCB et des voyageurs.
Comparaison avec voitures et automotrices classiques
| M5 | M4 | AM80 | |||
| 1e et 2e cl. | 1e cl. | 2e cl. | 1e cl. | 2e cl. | |
| Largeur véhicule | 2 830 | 2 928 | 2 928 | 2 900 | 2 900 |
| Pas de sièges | 1 650 | 2 000 | 1 700 | 1 877 | 1 740 |
| Distance entre nez des sièges | 550 | 510 | 600 | 497 | 500 |
| Profondeur de l’assise | 420 | 470 | 420 | 470 | 420 |
| Largeur siège (accoudoirs non compris) | 472,5 | 480 | 433,5 | 480 | 457,5 |
| Profondeur totale du siège | 550 | 720 | 550 | 690 | 620 |
| Hauteur du plafond | 1 949,5 (sup.) 1 954,5 (inf.) | 2 352 | 2 207 | 2 280 | 2 280 |
(les mesures sont données en mm)
Caractéristiques techniques des voitures M5 à double niveau
| 1e classe | 2e classe | 2e classe pilote | |
| Constructeur | Constructions ferroviaires et métalliques (BN) | ||
| Nombre d’unités | deux séries de 65 voitures | ||
| Longueur totale | 26,4 m | 26,4 m | 26,85 m |
| Poids | 44 t | 44 t | 49 t |
| Nombre de places assises : total | 142 | 146 | 121 |
| fumeurs | 66 | 33 | 33 |
| non-fumeurs | 76 | 113 | 85 (+ 3 strapontins) |
| Nombre de places debout | 160 | 160 | 143 |
| Bogie type | y 36 P | y 36 P | y 36 P + y 36 Px (PC) |
| Poids | 5,8 t | 5,8 t | 5,8 t + 5,9 t |
| Diamètre de la roue | 840 mm | 840 mm | 840 mm |
| Suspension secondaire | pneumatique | ||
| vitesse maximum | 140 km/h | ||
| Frein à disque | Oerlikon E St 3 f | ||
| Fournisseur d’énergie (voiture BDX) | convertisseur statique ACEC | ||
| puissance | 65 kW | ||
| tension d’entrée | 3 000 V DC | ||
| tension de sortie | 24 V DC (13,5 kW) 380 V AC 50 Hz (51,5 kW) 3 phases + neutre |
||
| Batterie (sur voiture BDX) | 320 Ah - 24 V Cadmium-Nickel |
||
| Chauffage | électrique | ||
| Type | air soufflé sous banquettes de Manta-Friedmann | ||
| Puissance | 2 x 26,4 kW sous 3 000 V DC | ||
| Débit d’air | 2 x 1 000 m³/h en service normal 2 x 2 000 m³/h en été | ||
| Régulation | BDC | ||
| Eclairages locaux | tubes flurescents TLD 18 W et 36 W | ||
| Puissance | 1 548 kW | 1 548 kW | 1 484 kW |
| Niveau d’éclairage : | |||
| Compartiments supérieurs | 550 lux | ||
| Compartiments inférieurs | 650 lux | ||
| Armoires d’appareillages | système modulaire 19 pouces | ||
| Sonorisation | Neumann, permettant : des annonces parlées une liaison personnel/train/conducteur une liaison personnel/train/dispatching | ||
Source : Le Rail, juillet 1986
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