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L’organisation des transports dans la C.E.E.
G. M.
samedi 4 janvier 2025, par
Est-il possible d’établir un Marché commun sans coordonner les transports à l’échelle des six pays de la Communauté ? C’est à cette question que M. André Fischer s’est efforcé de répondre dans son ouvrage « L’Organisation des Transports dans le cadre de l’Europe des Six » (323 p., Editions A.W. Sijthoff, Doezastraat, 1, Leyde).

Après avoir montré que les voies de communication et les moyens de transport sont l’indispensable fondement du développement économique, l’auteur expose avec précision les différentes politiques nationales de transport suivies par les six pays de la C.E.E. Les régimes juridiques, fiscaux et tarifaires varient d’Etat à Etat et diffèrent même dans chacun d’entre eux selon qu’ils s’appliquent à un mode de transport ou à un autre. Il en va de même pour le choix des investissements ainsi que dans l’élaboration des réglementations techniques. Nulle part les transports ne sont régis par les seules lois économiques. L’intervention des pouvoirs publics, qui s’est toujours manifestée en fonction d’intérêts localisés, aboutit à l’existence de nombreuses discriminations entre les divers modes de transport, tant sur le plan intérieur que sur le plan international.
André Fischer dresse ensuite le bilan général des transports de marchandises aussi bien sur les réseaux ferroviaires et routiers que sur les voies navigables et les réseaux d’oléoducs et de gazoducs. Les nombreux tableaux de statistiques sont révélateurs. Le chemin de fer ne prédomine qu’en France et en Allemagne fédérale, alors que la route réalise plus de tonnages kilométriques en Belgique, aux Pays-Bas et surtout en Italie, où le transport routier est devenu le plus important des modes de transport au sol.
Après avoir analysé les caractères techniques et économiques propres à chaque mode de transport, l’auteur ne trouve guère souhaitable de parler de « domaines naturels » et encore moins de « domaines réservés » pour la répartition des trafics. Compte tenu du produit, de la distance et du degré de « substitualité », tout au plus peut-on parler de « domaine d’élection ». Encore eût-il fallu que les positions concurrentielles « originelles » de chaque mode de transport n’eussent pas été modifiées par les décisions discriminatoires des pouvoirs publics.
Malgré la normalisation des comptes et l’application de la T.V.A., les problèmes de la concurrence restent d’une grande complexité.
En ce qui concerne les problèmes de la coordination dans les transports européens, l’auteur se demande s’ils seront résolus tant que les Etats considéreront les transports comme un instrument de leur politique économique et sociale.
Entre-temps, l’importante réorganisation effectuée dans les transports routiers et ferroviaires ainsi que les recherches d’une meilleure harmonisation ont abouti à un bilan qui est loin d’être à la mesure des efforts déployés.
Après avoir rappelé les nombreux organismes internationaux spécialisés qui ont été créés, particulièrement dans le domaine ferroviaire, pour assurer une collaboration parfaite entre les différents réseaux et les différents Etats sur les plans technique, administratif et juridique, l’auteur s’étend longuement sur le rôle que pourrait jouer la Communauté économique européenne (C.E.E.), qui s’était proposé non pas une simple coordination mais une véritable intégration des transports européens ; il n’est guère optimiste et ne prévoit pas que le Traité de Rome puisse établir un véritable marché commun du transport. Il pense plutôt, et c’est là sa conclusion, que l’intégration des transports ainsi que l’élaboration d’une politique commune exigent, pour avoir quelque chance de se réaliser, que soit mise sur pied une commission européenne des transports dotée de pouvoirs supranationaux. Mais on sait qu’il est bien difficile aux gouvernements de céder la moindre parcelle de leurs prérogatives.
L’œuvre de M. André Fischer est une somme que consulteront avec profit tous ceux qui s’intéressent aux transports et qui désirent donner des réponses éclairées aux questions relatives à cette partie primordiale de l’économie.
Source : Le Rail, mai 1969