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Le matériel à marchandises

W. E. De Pessemier.

vendredi 16 mai 2025, par Rixke

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 Composition du parc

Le parc des wagons se compose de cinq catégories :

  • Wagons du service commercial, pour le transport des marchandises confiées au rail par la clientèle ;
  • Wagons ferry-boats, pour le trafic avec la Grande-Bretagne. Ces wagons sont adaptés aux possibilités de circulation dans l’île, le gabarit des B.R. étant plus petit que celui des chemins de fer du continent ;
  • Wagons de service, pour les besoins propres du chemin de fer ; ce sont soit des wagons désaffectés du service commercial, soit des wagons spéciaux affectés à des transports déterminés (carburants, essieux, ballast, oxygène...) ;
  • Fourgons, utilisés quand l’exploitation l’exige, dans la plupart des cas pour permettre l’accompagnement des convois ;
  • Wagons de particuliers, propriétés de firmes (wagons-citernes, wagons destinés au transport de minerais, etc.). Les utilisateurs de ces wagons agréés par la S.N.C.B. bénéficient de tarifs spéciaux.

 L’évolution de l’effectif

Le tableau ci-après montre quelle fut l’évolution de l’effectif entre 1926, date de création de la S.N.C.B., et 1940.

Wagons du parc commercial : 1926 1940
- Fermés 39.407 30.875
- Tombereaux 72.075 56.516
- Plats 10.689 11.069
- Divers 826 449
- Total 122.967 98.909
Wagons de service 2.808 5.500
Wagons ferry-boats 1.014 593
Fourgons 2.455 2.129
Ensemble du parc 129.244 107.131
Capacité totale du parc 1.991.863 t 1.754.444 t
Capacité moyenne par wagon 16,198 t 17,727 t
Wagons étrangers (héritage 1914-1918) compris dans l’ensemble 64.000 48.000

La majorité des wagons-tombereaux servaient au transport des charbons (70.980 sur 72.045 en 1926). Le nombre des wagons spéciaux était minime.

En mai 1940, la S.N.C.B. a repris les lignes et le matériel de la Compagnie du Nord Belge.

Pendant la courte période de l’invasion de notre pays, un grand nombre de wagons ont disparu à l’étranger. Au 31-12-41, 7.318 véhicules ne nous étaient pas revenus. A la veille de la libération, 1.904 restaient introuvable !

Le recensement des wagons présents en Belgique au 31-12-44 donnait l’effectif suivant :

  • Tombereaux : 28.505.
  • Fermés : 6.552.
  • Plats : 3.472.

Cinquante-sept mille trois cents wagons se trouvaient à l’étranger, dont 44.000 en Allemagne et au-delà.

Sur notre réseau se trouvaient 11.300 wagons appartenant à des pays ennemis. Ce matériel, butin de guerre des armées, fut, par décision des autorités alliées, utilisé en commun, comme d’ailleurs tout le matériel de transport se trouvant sur la partie du continent contrôlée par les Occidentaux (à l’exception du matériel suisse et suédois).

Nonobstant les recherches, environ 20.000 wagons restaient introuvables à la fin de 1950. La perte finale peut être estimée à 15.000 wagons.

De 1945 à 1949, notre Société a acquis :

  • 2.388 wagons, dont la construction avait été entamée pour le compte des Allemands avant la fin de la guerre ;
  • 5.999 wagons achetés au Canada en 1945 ;
  • 9.500 wagons fournis, depuis 1947, par l’industrie privée belge.

Ces nouvelles acquisitions rajeunirent le parc et augmentèrent la capacité de transport moyenne par wagon ; celle-ci atteignit 19,77 t.

Dans la suite, la Société a procédé à la modernisation de son parc :

  • par le retrait de véhicules vétustes et de faible tonnage ;
  • par la transformation de types excédentaires ;
  • par la construction de nouveau matériel, dont une partie importante dans nos ateliers, suivant les normes établies par l’U.I.C. Les premiers de ces wagons datent de 1956 (wagons-tombereaux U.I.C. type 1, avec quatre portes latérales et deux pignons mobiles) ;
  • par la construction de wagons spéciaux.

 Le parc actuel

Actuellement (au 1-1-69), le parc des wagons commerciaux se compose comme suit :

  • Wagons couverts : 11.883
  • Wagons plats : 9.445
  • Wagons-tombereaux : 22.284

Total : 43.612

Cet effectif comprend 5.862 wagons spéciaux parmi lesquels :

  • 1.798 wagons couverts : wagons ferry-boats ; wagons pour le transport d’autos ; wagons pour le transport de denrées périssables (isolés contre l’influence de la température et, dans la plupart des cas, équipés d’une installation frigorifique) ; wagons pour le transport de marchandises pulvérulentes dont le déchargement peut se faire pneumatiquement ; wagons avec toiture et parois ouvrantes ; etc.
  • 2.235 wagons plats : wagons ferry-boats ; wagons pour le transport de tôles enroulées ; wagons pour le transport de containers de 5 t de charge utile ; wagons pour le transport d’autos ; wagons pour le transport de « transcontainers » de 20, 30 et 40 pieds de longueur ; wagons-chevalets équipés pour le transport de glaces en position verticale ; wagons surbaissés permettant le transport de marchandises indivisibles de grande hauteur ; wagons spécialement conçus pour les besoins de l’armée ; etc. ;
  • 1.829 wagons-tombereaux : wagons-trémies ; wagons autodéchargeurs avec ou sans toit ouvrant ; wagons à barres faîtières (barres longitudinales d’appui pour bâches) ; wagons à toiture ouvrante ; wagons à crémaillère pour le transport de glaces ; etc.

La capacité moyenne de chargement du parc commercial est passée à 25,5 t par wagon.

Suivant le régime de circulation, le parc des wagons commerciaux peut être décomposé comme suit :

Régime Tombereaux Couverts Plats Totaux
Nombre Tonnage Nombre Tonnage Nombre Tonnage Nombre Tonnage
Δ ordinaires 3.300 72.045 1.098 17.568 1.145 30.867 5.543 120.480
spéciaux - - - - 10 621 10 621
RIV ordinaires 7.423 195.382 1.844 32.898 4.919 162.810 14.186 391.090
spéciaux 1.829 54.268 1.798 39.289 2.225 62.420 5.852 155.977
EUROP ordinaires 9.732 265.808 7.143 150.003 - - 16.875 415.811
spéciaux - - - - - - - -
POOL ordinaires - - - - 1.146 35.516 1.146 31.516
spéciaux - - - - - - - -
Total ordinaires 20.455 533.235 10.085 200.469 7.210 225.193 37.750 958.897
Spéciaux 1.829 54.268 1.798 39.289 2.235 63.041 5.862 156.598
Total général 22.284 587.503 11.883 239.758 9.445 288.234 43.612 1.115.495
Δ Wagons utilisables uniquement en service intérieur. [1]

Le parc des wagons de service comprend 5.029 véhicules, et le parc des wagons de particuliers, 5.106 véhicules.

 Evolution qualitative de l’effectif

Au matériel de l’Etat et des anciennes compagnies sont venus s’incorporer du matériel étranger à la suite des guerres et du nouveau matériel destiné à remplacer le matériel détruit.

D’autre part, les progrès dans la manutention des marchandises ont amené les chemins de fer à mettre à la disposition de la clientèle des wagons présentant des dispositions spéciales : wagons-trémies à déchargement par gravité, wagons à toit ouvrant qui présentent les avantages du wagon fermé tout en permettant le chargement et le déchargement par appareils de levage, wagons à déchargement pneumatique, etc. On demande de plus en plus de wagons permettant de réduire les opérations terminales.

Enfin, la possibilité d’augmenter le poids total au rail autorisé et l’application de nouvelles méthodes de construction permettant de diminuer la tare ont rendu possible l’accroissement de la charge utile. Soucieux d’augmenter la rapidité du transport, les chemins de fer ont cherché à élever la vitesse des trains, la tendance étant de faire circuler des trains de marchandises entre des trains de voyageurs pour augmenter la capacité d’exploitation des lignes ; cela ne se réalise pas sans imposer au matériel des exigences de plus en plus sévères.

En résumé, les wagons deviennent plus spécialisés, d’une plus grande capacité de chargement et aptes à rouler plus vite.

 Evolution quantitative de l’effectif

L’effectif a évolué quantitativement par suite :

  • de l’évolution du transport confié au chemin de fer (diminution de la production charbonnière, diversité de la production belge, nouveaux courants internationaux) ;
  • de l’augmentation de la capacité des wagons ;
  • de l’amélioration du rendement d’utilisation ;
  • de la coopération entre les administrations ferroviaires.
Evolution de l’effectif du parc commercial
Graphique 1

Déjà en 1921 fut créée l’Union RIV [2] pour l’exploitation en commun de wagons à marchandises appartenant à différents réseaux. Par cet accord, les membres s’engagent à réutiliser autant que possible le matériel étranger après déchargement ; toutefois, cette réutilisation se fait uniquement en direction du pays de l’administration propriétaire. Pour cette raison, le coefficient de réutilisation est resté relativement bas. En effet, entre réseaux voisins, il n’y a pas de balance du volume des importations et des exportations pour lesquelles le même type de wagon peut être utilisé. D’autre part, les demandes de véhicules pour transports internationaux ne sont pas nécessairement introduites dans une gare au moment où des wagons étrangers y sont disponibles.

En 1953, pour remédier à ces inconvénients, les réseaux signataires de la « Convention EUROP », en mettant en commun une partie de leur parc, ont permis que des wagons soient utilisés par chacun des réseaux membres comme ses propres wagons. Ce matériel n’est plus renvoyé au réseau propriétaire que pour « révision périodique ». Cette mise en commun permet d’assurer le même volume de transport avec moins de véhicules, d’où diminution des investissements et augmentation du rendement du matériel.

Evolution de l’effectif du parc commercial
Graphique 2

La « Convention EUROP » a été possible grâce à une politique de normalisation, qui s’est étendue à l’échelle européenne depuis la fin de la guerre, mais qui fut limitée au début aux wagons-tombereaux et fermés. L’effectif intéressé était de 180.000 wagons (dont 19.500 S.N.C.B.) ; actuellement, le parc EUROP se compose de 210.304 wagons, dont 16.700 wagons S.N.C.B. (situation au 30-11-69).

En 1968, la normalisation des wagons plats étant suffisamment avancée (sauf en Autriche), une nouvelle convention fut signée : la « Convention-POOL », qui ne diffère de la convention « EUROP » que par l’absence des O.B.B. 38.000 wagons plats à deux essieux, du type U.I.C., furent mis en commun (dont 1.311 S.N.C.B.).

Capacité de chargement
Graphique 3

En 1949, une autre forme de coopération entre chemins de fer avait été adoptée, visant l’utilisation plus rationnelle du matériel : la « Société coopérative internationale de Transports frigorifiques INTERFRIGO » (de droit belge). Cette société diffère des autres formes de coopération par le fait que, « propriétaire » de wagons et de containers conçus pour le transport de denrées périssables, elle les met à la disposition de ses membres quand ils en ont besoin. En outre, l’INTERFRIGO gère le transport international effectué avec les wagons réfrigérants appartenant aux réseaux membres. Ainsi, cette organisation décharge les administrations de l’achat et du maintien en service d’un grand nombre de véhicules coûteux, dont l’utilisation serait limitée aux courtes périodes des récoltes. La société INTERFRIGO possède près de 4.100 wagons réfrigérants ou frigorifiques et gère le transport international effectué avec les quelque 18.200 wagons de cette espèce qui appartiennent aux réseaux membres.

Décomposition du parc de wagons commerciaux par tranches d’âge de 5 ans
Graphique 4

Créée récemment, la « Société coopérative INTER-CONTAINER » (de droit belge) s’est spécialisée dans le transport de « transcontainers ». Elle apparaît comme un grossiste achetant aux chemins de fer des services sous forme de trains complets ou de rames, de façon à obtenir des prix de traction aussi réduits que possible ; ce grossiste revend ensuite, en demi-gros ou en détail, ses services aux utilisateurs. Par l’organisation de « trains blocs » (appelés freightliners en Angleterre), le rendement des wagons transporteurs a considérablement augmenté. Par la création de son propre parc de wagons, la S.C. INTER-CONTAINER contribue à la normalisation d’un matériel spécialisé et limite ainsi les effectifs des administrations membres.

 Et demain ?

La limite d’âge d’un wagon ne devrait pas dépasser 40 ans. Or, le graphique 4 montre que l’effectif des wagons commerciaux comprenait, au 1-1-69, 9.571 wagons de 40 à 85 ans d’âge qui devraient être éliminés rapidement, leur entretien étant coûteux. En outre, environ 3.300 wagons de service ont aussi plus de 40 ans.

Environ 8.000 wagons commerciaux sont toujours équipés de boîtes d’essieux qui ne répondent plus aux conditions imposées par le RIV pour la circulation, depuis le 1-1-70, dans les trains internationaux. Ils devraient être équipés de boîtes à rouleaux. Or, leur état ne justifie plus cette transformation coûteuse. Utilisables temporairement en service intérieur, ils devront disparaître avant 1973.

L’application prochaine de l’attelage automatique implique la transformation du châssis des wagons construits avant 1965. Parmi les wagons n’ayant pas encore atteint 40 ans d’âge, quelque 13.000 wagons sont considérés comme inaptes à l’application de cet attelage.

Les wagons de service, du moins ceux dont l’acheminement devra se faire par trains ordinaires, devront être équipés, comme les wagons commerciaux, de boîtes à rouleaux et de l’attelage automatique ; bon nombre d’entre eux ne sont plus aptes à subir ces transformations ; ils devront être remplacés.

Le parc va donc évoluer d’une façon spectaculaire. On estime que l’effectif futur devra être au moins de 41.000 wagons commerciaux et de 3.000 wagons de service. En tenant compte de cette estimation et des impositions techniques énoncées ci-dessus, notre Société devra acquérir quelque 25.500 nouveaux wagons et approprier 14.500 wagons à l’attelage automatique avant le 1-1-1980.

Le programme de construction devra tenir compte :

  • des avantages offerts par les wagons à bogies ;
  • de l’augmentation possible du poids total au rail ;
  • de la spécialisation du matériel ;
  • de la normalisation du matériel afin de faciliter l’utilisation en commun ;
  • du progrès de l’exploitation de certains trafics par « train bloc », permettant de pousser au maximum le rendement du matériel approprié ;
  • de l’extension de la « containerisation ».

Au fur et à mesure de la réalisation de ce programme, l’exploitation du parc du matériel à marchandises, géré avec l’aide de l’électronique, évoluera pour le plus grand intérêt de la communauté. Car si chaque mode de transport a son utilité, c’est le chemin de fer qui peut augmenter sa production de transporteur de masses à moindres frais. Il peut le faire sans gêner personne et sans devoir demander au pays des investissements importants en matière d’infrastructure.


Source : Le Rail, août 1970


[1Ces chiffres comprennent 2.190 véhicules retirés du service commercial étant donné leur vétusté. Ils seront soit démolis, soit déclassés comme wagons de service.

[2« Regolamento Internazionale Veicoli » (Règlement pour l’emploi réciproque des wagons en trafic international).