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L’électrification Anvers - St-Nicolas
M. Tuypens.
samedi 17 mai 2025, par
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On a dit que l’Egypte est un présent du Nil. On pourrait suggérer de la même manière qu’Anvers est un présent de l’Escaut.
Mais si ce dernier a merveilleusement favorisé le développement de la métropole, l’extension s’est limitée jusqu’en ces dernières années à la rive droite, tandis que la rive gauche restait isolée.
Cet isolement s’est traduit dans tous les domaines, et notamment dans le réseau ferroviaire. Jusqu’il n’y a guère, il fallait remonter le fleuve jusqu’à Tamise pour trouver le premier passage ferré, le pont de la ligne Malines - Terneuzen. L’axe Gand - Anvers venait mourir dans la gare de la rive gauche, ne laissant aux voyageurs que la possibilité de gagner par leurs propres moyens la terre promise, c’est-à-dire la rive droite.
Mais si forte est l’attraction de notre grand port que des milliers de travailleurs originaires du pays de Waas, foyer inépuisable de main-d’œuvre, débarquaient chaque jour à Anvers Rive gauche, pour traverser l’Escaut et gagner qui les quais, qui les anciens ou les nouveaux bassins.

Il a fallu quelque quarante ans pour saturer le premier tunnel routier sous l’Escaut. Depuis quelques mois, un second ouvrage, le tunnel Kennedy, est ouvert à la circulation. D’ici peu de jours, son pertuis ferroviaire va combler l’hiatus séculaire : le rail venant de St-Nicolas, après avoir négligé Anvers Rive gauche et franchi le fleuve, se prolongera par les anciens remparts pour rejoindre le nœud d’Anvers à Berchem, où la gare a été complètement remaniée pour la circonstance, comme on a pu le lire dans « Le Rail » de décembre 1969.
Quand, le 24 septembre prochain, Monsieur le Ministre des Communications coupera, à Anvers Central, le ruban symbolique, il inaugurera à la fois plus et moins qu’une électrification.
Plus qu’une électrification, parce que l’œuvre magnifiée sera non seulement un maillon supplémentaire livré à cette traction moderne, mais en vérité une refonte complète de l’ancienne ligne de la rive gauche et son prolongement par la ligne des remparts.
Moins qu’une électrification, parce que la section inaugurée n’est qu’une première partie de la liaison entre les deux grandes villes flamandes d’Anvers et de Gand.

En attendant l’équipement complet jusqu’à Gand, l’électrification Anvers Central - St-Nicolas constitue pour notre économie un élément majeur. La métropole va désormais faire participer à sa prospérité le pays de Waas qui est son complément économique naturel.
Se rend-on bien compte de ce que représentera, pour des milliers de personnes, la possibilité, au départ de la florissante ville de St-Nicolas, de joindre Anvers Central en une vingtaine de minutes, ou bien, moyennant quelques minutes de plus, Anvers (Luchtbal), à proximité des bassins ?
Voilà l’étoile ferroviaire d’Anvers dotée d’une branche supplémentaire, à travers une région parmi les plus peuplées du pays, sans compter l’antenne Anvers Sud - Boom, où, en attendant l’électrification envisagée, sera instaurée une desserte « voyageurs » intensifiée, également axée sur Anvers Central.

Autre bienfait indirect pour l’agglomération anversoise, la disparition de l’ancienne ligne des forts, de Hoboken à Wilrijk, dont les multiples passages à niveau ont énervé des générations d’automobilistes.
Entre le tunnel Kennedy et St-Nicolas, c’est une ligne complètement modernisée que parcourront les premiers trains électriques. Mise à double voie, portée à 140 km/h, débarrassée, grâce à la construction de ponts, de ses passages à niveau les plus importants, les autres étant équipés de sécurités automatiques, munie du block automatique, jalonnée par des gares – telles Zwijndrecht et Beveren – entièrement remaniées, la ligne Anvers - St-Nicolas est prête à affronter la croissance de clientèle qui ne peut manquer de se produire.
Au départ, chaque heure verra passer dans chaque sens un train direct et un train omnibus, en correspondance à Berchem avec les convois de la direction de Bruxelles. De plus, des trains supplémentaires aux heures de pointe auront le Luchtbal comme terminus.
L’accélération des relations sera telle que de St-Nicolas, on joindra plus vite Anvers Central qu’actuellement Anvers Rive gauche. Alors que maintenant, par bus, Anvers Central est à 55 minutes de St-Nicolas et à 30 minutes de Beveren, elle ne sera plus, par train omnibus, qu’à 29 minutes et 19 minutes de ces deux centres du pays de Waas.
Le travailleur de St-Nicolas sera rendu au Luchtbal dans un temps à peine supérieur à celui qu’il lui faut pour atteindre Anvers Rive gauche.
L’aménagement de St-Nicolas
En dehors des travaux terminés d’Anvers et de ceux largement entamés de la ceinture de Gand, l’aménagement de St-Nicolas constitue le fleuron de la modernisation de l’artère Anvers - Gand.
L’ancienne gare de St-Nicolas était indigne d’une ville de 50.000 habitants. Le chemin de fer au niveau du sol constituait une barrière qui entravait les relations entre les quartiers nord et sud ; les multiples passages à niveau ralentissaient considérablement la circulation urbaine.

La refonte complète en cours comporte fondamentalement la suppression de tous les passages à niveau par relèvement du chemin de fer, en partie sur viaduc, la création de nouvelles traversées dans le talus, le transfert des installations à marchandises dans un chantier tout nouveau côté Anvers, le ripage et la reconstruction des quais à voyageurs à la lisière nord des terrains de l’Etat, l’érection d’un bâtiment moderne avec locaux pour les voyageurs, les services et diverses activités commerciales, et le dégagement côté centre d’une vaste place de stationnement avec gare d’autobus, emplacement de taxis, parc de stationnement pour 300 voitures, sans parler des aménagements pour faciliter la circulation des voitures et des piétons.

Ce vaste projet a été entamé de manière à hâter l’achèvement de la phase nécessaire à la mise en service de l’électrification St-Nicolas - Anvers.
La nouvelle gare à marchandises, à 1.500 m à l’est, est suffisamment avancée pour reprendre le trafic. Elle comprendra en situation définitive un centre routier, un entrepôt, une cour et 8.000 m2 de terrains à louer à des clients du chemin de fer.
Le train électrique inaugural venant de la métropole sera reçu à St-Nicolas dans la nouvelle gare haute à 3 voies qui constitue l’embryon de la gare définitive, 3 voies anciennes subsistant temporairement au niveau bas pour les trains de Tamise. Côté Gand, la construction du viaduc exige pendant deux ans l’interruption jusqu’à St-Nicolas ouest du trafic ferroviaire, lequel sera remplacé durant cette période par une navette d’autobus assurant les correspondances voulues.
Conclusion
Depuis l’indépendance, le chemin de fer vit et se développe avec le port d’Anvers, dont il prolonge les trafics maritimes. L’ouverture et l’électrification de la ligne de St-Nicolas constituent une étape nouvelle et brillante de la collaboration séculaire féconde de ces deux branches complémentaires fondamentales de l’économie belge et européenne.
Source : Le Rail, septembre 1970