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Isolation thermique et acoustique des voitures

W. van Rijn, ingénieur principal.

mercredi 13 avril 2011, par rixke

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Les administrations de chemin de fer veulent offrir plus de confort à leurs clients et, au cours des dernières années, elles ont réalisé des progrès sensibles dans ce domaine. Malgré l’augmentation des vitesses de circulation, les techniciens sont parvenus à améliorer les qualités de roulement des véhicules. Les dimensions des compartiments, la décoration des parois, l’agrément des sièges, l’éclairage contribuent aussi à créer la sensation de confort. Mais cette sensation peut être fortement atténuée si l’atmosphère de la voiture est irrespirable, trop froide ou trop chaude, et si des bruits, en pénétrant dans les compartiments, dérangent les voyageurs et les empêchent de se comprendre sans forcer la voix. Il convient donc d’insonoriser les véhicules et de les munir de systèmes leur assurant la meilleure ambiance. Or, il se trouve que la plupart des dispositions prises pour l’isolation acoustique contribuent aussi à isoler les voitures au point de vue thermique. C’est pourquoi nous allons vous parler de cette double isolation, en sachant bien que l’isolation thermique ne fait que compléter les systèmes de chauffage, d’aération et, sur certains trains, de conditionnement de l’air.

 Importance de l’isolation thermique.

Au point de vue thermique, de nombreux essais avaient déjà été entrepris par différentes administrations, lorsque l’U.I.C. décida, en 1959, de construire, à Vienne, une station d’essais spécialement équipée pour mesurer les déperditions de chaleur dans les véhicules. Cette installation permet d’exécuter des essais statiques et dynamiques, c’est-à-dire, d’une part, des essais à l’arrêt, avec température extérieure réglable entre - 40° C et + 50° C, et, d’autre part, grâce à une circulation d’air forcée, des essais dans les circonstances de marche ; pour la vitesse de 120 km/h, la température extérieure peut varier de - 15° C à + 50° C ; pour des vitesses plus faibles, la température peut être abaissée jusqu’à - 40° C.

Les essais effectués avec des véhicules récents ont permis de déterminer quelle est l’importance des déperditions calorifiques et quels facteurs influencent ces pertes.

On a constaté :

  • que la quantité de chaleur qui se perd en traversant les parois extérieures d’un véhicule convenablement isolé n’augmente que légèrement avec l’accroissement de la vitesse, alors que la quantité de chaleur évacuée par les orifices de ventilation et par les défauts d’étanchéité augmente sensiblement avec la vitesse ;
  • qu’en conséquence, les pertes calorifiques totales peuvent, dans certains cas, être doublées à partir de 80 km/h, et que la consommation d’énergie nécessaire pour maintenir une température convenable à l’intérieur du véhicule croîtra de la même manière.

On en conclut qu’il ne suffit pas de munir les véhicules d’une bonne isolation des parois, mais qu’il faut, en outre, les rendre aussi étanches que possible.

 Importance de l’isolation acoustique.

On a tenté de combattre le bruit à son origine, c’est-à-dire dans les vibrations produites par le contact du bandage en acier sur le rail et dans les vibrations des roues elles-mêmes. Malheureusement, aucun remède à la fois sérieux et économique ne semble pouvoir être apporté à ce mal. Il faut, dès lors, s’attacher à étouffer au maximum l’énergie sonore qui pénètre à l’intérieur des véhicules. Pour résoudre ce problème, il faut savoir comment cette pénétration se produit.

Comment se transmettent les vibrations sonores (Fig. 1).

Les déformations du rail et de la roue provoquent des vibrations sonores qui se propagent dans l’air entourant toute la caisse du véhicule. Les plus importantes se trouvent à proximité de la source du bruit, c’est-à-dire sous le plancher (fig. 1).

Les vibrations se transmettent aussi depuis la roue, à travers le bogie, jusqu’au châssis et à la caisse du véhicule, aussi bien dans l’ossature que dans les tôles de revêtement.

Les vibrations sonores qui entourent la caisse s’ajoutent aux vibrations qui sont transmises par voie métallique, et la caisse elle-même entre donc en vibration sous l’effet combiné de ces deux modes de transmission. De ce fait, le revêtement intérieur, qui est nécessairement fixé sur l’ossature, reçoit la somme de ces vibrations et les transmet finalement à l’intérieur des compartiments.

Les vibrations sonores extérieures peuvent encore pénétrer à l’intérieur des véhicules par tous les défauts d’étanchéité, tels que ceux des fenêtres, des portes, des appareils de ventilation, des entrées de canalisation.

Il faut enfin songer à toutes les sources de bruit qui se trouvent dans le véhicule lui-même.

Ce sont tous les organes qui, sous l’action des trépidations de la marche, peuvent entrer en vibration ou s’agiter dans leurs supports (timonerie de frein, portes coulissantes, garnitures métalliques, etc.).

 Réalisation de l’isolation.

Comment peut-on dès lors concevoir l’isolation thermique et acoustique des véhicules ?

Au point de vue calorifique, il suffit de placer des matériaux isolants sur les parois extérieures, d’éviter autant que possible les ponts thermiques et de colmater les orifices. Certains de ces derniers, ceux des appareils de ventilation, par exemple, ne peuvent être rendus entièrement étanches, et il faut accepter les pertes que cette situation entraîne ; il en découlera un supplément d’énergie nécessaire pour le chauffage.

Pour l’acoustique, il en va tout autrement. Les moindres orifices peuvent devenir de véritables ennemis de l’isolation. Ceux qui ne peuvent être supprimés doivent être conditionnés de telle manière que la pénétration du bruit soit en tout cas réduite, par exemple en disposant des chicanes. Mais de toute façon, certains éléments de la caisse, tels que les fenêtres et les portes, laisseront passer une certaine puissance sonore ; le niveau acoustique global ne pourra donc jamais être amené plus bas que celui qui est inhérent à ces imperfections inévitables.

L’insonorisation s’obtient par deux genres de mesures : d’une part, des solutions de continuité dans les liaisons métalliques et, d’autre part, des écrans de matériaux d’isolation dont on garnit les parois et le plancher.

Solutions de continuité.

Pour contrecarrer la transmission des vibrations métalliques, on intercale des supports élastiques. Des coussins en caoutchouc sont ainsi généralement prévus aux liaisons des divers organes des bogies et aux pièces d’appui de la caisse. Dans la caisse même, des supports en caoutchouc ou en liège sont placés à tous les points d’attache du garnissage intérieur, tant pour les parois et les planchers que pour les sièges et les cloisons (Fig. 2). Dans la plupart des cas, il faut cependant réaliser des liaisons relativement rigides, ce qui limite l’efficacité de ces intercalaires.

  1. Produit antivibrant.
  2. Ouate de verre.
  3. Induit bitumineux avec liège granulé.
  4. Vitrage double.
  5. Tôle de revêtement.
  6. Elément d’ossature.
  7. Fourrure en bois.
  8. Intercalaire.
  9. Revêtement intérieur.
  10. Linoléum.

La transmission des vibrations métalliques aux éléments de garnissage intérieur étant difficile à éviter complètement, il y a intérêt à limiter autant que possible les vibrations métalliques elles-mêmes. C’est le rôle des produits antivibrants (antidrumming), qui absorbent une partie de l’énergie vibratoire par frottement interne de leurs particules. Ces produits contiennent généralement des matières inorganiques, ou parfois du liège, enrobées dans un liant à base de résine synthétique, de caoutchouc ou de bitume. Parmi les matières inorganiques, la vermiculite est l’une des plus utilisées. Les résines sont généralement des dérivés vinyliques ou acryliques.

Tous ces matériaux antivibrants sont généralement appliqués par projection sur les tôles et les éléments d’ossature en épaisseurs quasi identiques. Leur effet est donc plus sensible sur les tôles que sur les éléments profilés.

Les matériaux antivibrants présentent aussi toujours un certain pouvoir absorbant vis-à-vis des vibrations transmises par l’air. Ils peuvent même intervenir en partie pour l’isolation thermique.


Source : Le Rail, juillet 1965.