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Tournai - Lille, Courtrai - Lille

L. Gillieaux.

mercredi 1er août 2018, par rixke

A l’ouest, du nouveau !

 Les changements horaires de mai 1993 ont apporté pas mal d’innovations dans l’ouest de notre pays et en région lilloise : à la SNCF, inauguration du TGV Nord Europe ; chez nous, électrification de Tournai - Lille et intensification de la desserte, de même qu’un renforcement de la desserte sur Courtrai - Lille. C’est donc tout un éventail de nouvelles possibilités qui est proposé à la clientèle.

 Le TGV aux portes de la Belgique : 331,7 km de ligne nouvelle

Décidée en octobre 1987, la ligne TGV « Nord Europe » relie Paris à Lille pour se prolonger ensuite vers le tunnel sous la Manche, qu’elle rejoint à Fréthun, près de Calais.

En banlieue parisienne, elle se débranche de la ligne classique Paris - Saint-Quentin - Aulnoye à Gonesse, pour passer à proximité de l’aéroport de Roissy - il n’y a toutefois pas de gare TGV sur la ligne à cet endroit - et rejoindre ensuite l’autoroute A1 à hauteur de Verberie. La ligne est alors accolée à celle-ci, à son côté ouest, jusqu’à proximité de Lille. Au sud de cette agglomération, à Fretin, un triangle de bifurcations permet à la ligne, soit de continuer plein est vers la Belgique, distante à cet endroit de 12 km, soit de remonter vers le nord pour pénétrer dans Lille. La troisième branche du triangle permet les liaisons directes Belgique - Lille, qui seront utilisées à l’avenir entre autres par les TGV EUROSTAR desservant la relation Bruxelles - Londres.

L’agglomération lilloise est traversée du sud-est vers le nord-est. Une gare nouvelle, Lille-Europe, est édifiée sur le tracé, à proximité immédiate de la gare actuelle, rebaptisée Lille-Flandres, et qui sera aussi fréquentée par de nombreux TGV ayant pour origine ou destination Lille et sa région.

La gare de Lille-Europe, située à 500 mètres environ de Lille-Flandres, est en cours de finition. Elle s’intègre dans le complexe « EuraJille », un vaste quartier d’affaires en cours de développement et qui comportera des centres commerciaux, des hôtels, des services bancaires, un parc urbain arboré, des zones d’habitat, etc.

Au-delà de Lille, la ligne file vers le nord-ouest en direction du tunnel, en traversant la plaine de la Flandre française. L’entrée du tunnel est atteinte à Fréthun/Coquelles, à l’ouest de l’agglomération de Calais et des installations d’Eurotunnel.

De Gonesse à Frétin, la ligne compte 198 km, pour 111 de Frétin à Fréthun. S’y ajoutent les 12 km encore à construire en direction de la Belgique et les 10,7 km du raccordement d’Arras permettant la desserte de plusieurs villes du nord de la France (Arras, Douai, Valenciennes, Lens, Hazebrouck, Dunkerque) sans devoir passer par Lille.

La ligne TGV Nord Europe a été conçue pour une vitesse maximale de 350 km/h. Son profil en long comporte des rampes maximales de 25 ‰ tandis que le rayon courant des courbes est de 6 000 m, le rayon minimal étant de 4 000 m. La traversée de l’agglomération lilloise pour des TGV sans arrêt à Lille-Europe, tels certains EUROSTAR Bruxelles - Londres ou Paris - Londres s’effectuera néanmoins à la vitesse de 200 km/h.

Sa section Gonesse - Arras, longue d’environ 155 km, a été mise en service le 23 mai dernier. La relation Paris - Lille s’effectue depuis lors en 1 h 20. Le 26 septembre, la ligne sera complètement mise en service entre Gonesse, Lille et Fréthun/Calais. Le trajet Paris - Lille se fera alors en une heure à peine...

 Les TGV R pour réseau

La desserte du TGV Nord Europe est assurée par une nouvelle génération de rames TGV, les « Réseau », qui ressemblent très fort au TGV Atlantique. En effet, elles en ont repris la forme et l’aérodynamique générale, de même que la livrée gris argent et bleu maintenant bien connue. Toutefois, le nombre de remorques a été ramené à 8 (au lieu de 10) et la formule des voitures « coach » (grand compartiment unique sur la longueur de la voiture) a été généralisée. Les TGV R offrent une capacité totale de 377 places, dont 257 en 2e classe. Du fait de leur nouvelle composition, les rames ont une longueur de 200 m, pratiquement identique à celle des rames TGV sud-est. La conjugaison de cette donnée avec certaines modifications aux moteurs et aux équipements de signalisation embarquée permet à ces TGV de circuler sur l’ensemble du réseau à grande vitesse, d’où leur appellation de TGV Réseau.

De plus, si, sur les 80 rames TGV composant le parc Réseau, 50 seront du type bicourant (25 000 volts en courant alternatif/1 500 volts en continu) à l’instar des autres TGV déjà en service, les 30 autres seront quant à elles du type tricourant, disposant en outre de la tension de 3 000 volts en courant continu du réseau classique belge. Cet équipement leur permettra de venir jusqu’à Bruxelles voire au-delà et d’assurer au départ de la Belgique des relations directes vers Paris, voire au-delà.

 La mise en place d’un réseau, en France et en Europe

La mise en service du TGV Nord Europe ne signifie pas seulement une amélioration des dessertes ferroviaires entre Paris et le nord de la France. Elle représente en réalité une étape importante dans la mise en place progressive d’un nouveau réseau ferroviaire en France et en Europe, réseau qui nous intéresse d’ailleurs directement à plus d’un titre.

En effet, des relations directes entre Lille ou Bruxelles et des régions françaises situées au-delà de Paris vont être rendues possibles par la réalisation, à partir de 1994, d’un autre volet du projet TGV Nord, à savoir la construction d’une ligne à grande vitesse - dite d’interconnexion - contournant la région parisienne par l’est et se greffant aux environs de Melun sur la ligne à grande vitesse Paris - Lyon et ses prolongements. Ultérieurement, cette ligne d’interconnexion sera prolongée vers le sud-ouest, permettant une jonction avec le réseau Atlantique, desservant l’Aquitaine et la Bretagne. De nombreuses possibilités de dessertes nouvelles, y compris au départ de la Belgique, vont ainsi se mettre progressivement en place.

Ce nouvel essor du rail ne s’arrêtera toutefois pas là puisqu’en même temps s’amorcent en Belgique les travaux de construction des nouvelles liaisons TGV, qui situeront notre pays au cœur d’un réseau à grande vitesse permettant des relations fréquentes et rapides, non seulement avec la France, mais aussi avec la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et l’Allemagne. Une nouvelle carte des relations ferroviaires européennes commence ainsi à voir le jour.

 Tournai - Lille : modernisation et électrification

L’électrification complète de l’étoile de Tournai

La ligne Tournai - Lille, longue de 21 km a été mise en service en 1865. Elle se débranche à Froyennes, dans la banlieue nord-ouest de Tournai, de la ligne 75A qui relie cette ville à Mouscron et, au-delà, à Courtrai.

Son électrification parachève la modernisation des lignes ferroviaires classiques dans la région puisque, outre la relation Mouscron - Tournai, les lignes partant de cette ville vers Mons d’une part, et vers Bruxelles via Ath d’autre part, avaient elles aussi été modernisées et électrifiées il y a quelques années.

Perspective TGV et nouvel avenir

Dans le cadre du projet TGV en Belgique, l’Etat belge et la SNCB ont décidé, en concertation avec la SNCF et les autorités françaises, de moderniser et d’électrifier la ligne Tournai - Lille. Ces travaux permettaient en effet d’obtenir un itinéraire intéressant pour la circulation des rames TGV EUROSTAR devant relier Bruxelles à Londres via Lille et ce, dès l’été 1994 - moment prévu pour le début du service EUROSTAR - jusqu’à la mi-1996, lorsque la ligne nouvelle à grande vitesse entrera en service entre Lembeek/Tubize et la frontière française.

Néanmoins, dès à présent, cette électrification a permis de porter à 15 (contre 11 auparavant) le nombre de trains parcourant la ligne. En outre, ces travaux offrent aussi la possibilité de créer à terme des relations directes entre des grandes villes situées sur la dorsale wallonne et Lille. En amorce de cette perspective, quelques trains Mons - Lille sont d’ailleurs prévus à partir de septembre prochain.

Modernisation de la ligne

Les installations de voies ont été modernisées. Dans cette optique, les rails et les traverses existants ont été remplacés par des traverses en béton supportant de longs rails soudés. La plate-forme des voies a en outre été drainée et élargie, un nouveau câble de signalisation et de télécommunications ayant été installé dans un caniveau mis en place à cette occasion. Quatre passages à niveau ont aussi été supprimés, les voiries étant adaptées pour amener la circulation vers les points de croisement subsistants. Un passage supérieur a été supprimé et un autre reconstruit, compte tenu du gabarit à dégager pour les caténaires.

Par ailleurs, la bifurcation de Froyennes a fait l’objet d’importants aménagements, en vue de porter la vitesse de la branche déviée (vers Lille) de 60 à 90 km/h et d’accélérer ainsi les circulations. En outre, les aiguillages ont été équipés du chauffage afin de pouvoir en assurer l’exploitation en tout temps. Dans le cadre de ces travaux, les quais du point d’arrêt de Froyennes ont été déplacés et réaménagés, la halte étant dotée d’un couloir sous les voies.

Les installations de signalisation de la ligne ont elles aussi été adaptées, compte tenu, entre autres des circulations de TGV qui y sont prévues. De même, certains travaux d’adaptation des voies, de la signalisation et des caténaires ont été réalisés en gare de Tournai, afin que les TGV EUROSTAR puissent la traverser à 60 km/h, sans y marquer d’arrêt.

Electrification

Pour la liaison Tournai - Lille, il a fallu prévoir une électrification qui réalise la jonction entre les tensions belge (3 000 volts en courant continu) et française (25 000 volts en courant alternatif). A cette fin, il a été décidé que la ligne serait électrifiée en 3 000 volts en continu sur une distance de 800 m au-delà de la bifurcation de Froyennes. Suit alors une courte section « neutre », non alimentée, de quelque 150 m, qui est parcourue par les trains sur leur lancée, après quoi commence la section alimentée en 25 000 volts en alternatif. Cette alimentation est réalisée au départ d’une sous-station située en région lilloise, un dispositif de comptage d’énergie étant installé à la frontière, de façon à répartir les charges entre les réseaux.

De ce fait, notre réseau compte dès à présent une section de ligne de près de 6 km electrifiée en courant alternatif de 25 000 volts. Ce n’est cependant pas la première apparition de cette tension sur notre réseau puisqu’elle est déjà présente à la sortie de la gare de Mouscron jusqu’à la frontière française, sur 2,5 km, de même qu’en gare de Quévy, sur la ligne Mons - Aulnoye et en gare d’Athus ainsi que sur les deux antennes qui, de cette gare, rejoignent, l’une les CFL (sur 1,1 km vers Rodange), et l’autre la SNCF (sur 1,5 km en direction de Mont-Saint-Martin). Relevons que le courant alternatif de 25 000 volts va encore servir pour d’autres électrifications à réaliser sur notre réseau : les lignes nouvelles à grande vitesse, la ligne 42 Rivage - Gouvy ainsi que les lignes 166 et 165 Dinant - Bertrix - Virton - Athus.

Davantage de trains et correspondances TGV

La nouvelle desserte offre de bonnes correspondances avec les trains IC de la dorsale wallonne, assurant ainsi, pour nombre de villes de cette région, des relations fréquentes avec Lille. Les correspondances de et vers Bruxelles via Ath ne se présentent toutefois pas de façon aussi optimale et ce, pour différentes raisons.

  • Ainsi, la grille de desserte doit tenir compte des caractéristiques de circulation de nombre de trains en France, lesquels ne sont pas toujours cadencés pour des raisons d’organisation des services propres à la SNCF. En outre, il a fallu tenir compte des possibilités de réception des trains en gare de Lille-Flandres, qui est une gare en « cul-de-sac » et qui accueille maintenant davantage de trains depuis la mise en service des TGV en provenance de Paris.
  • Par ailleurs, les horaires de la ligne 94 Mouscron - Tournai - Ath ont dû être un peu détendus pour quelques années, afin de permettre le déroulement, à partir de la fin 1993, des travaux d’infrastructure destinés au projet TGV sur la section Hal -Bruxelles.

Enfin, la relation Lille - Tournai donne maintenant correspondance à plusieurs TGV Paris - Lille et vice-versa en gare de Lille-Flandres. Grâce à ces nouvelles possibilités, Tournai et l’ouest du Hainaut se trouvent ainsi plusieurs fois par jour à moins de deux heures de Paris, ces perspectives devant encore s’améliorer en septembre, lorsque la relation Paris - Lille sera accélérée de 20 minutes. Au-delà, d’autres possibilités apparaîtront encore, lors de l’arrivée des TGV EUROSTAR accessibles à Lille et lorsque la mise en service de l’interconnexion autour de Paris permettra nombre de relations TGV directes entre Lille et les diverses régions du sud et de l’ouest de la France.

 Courtrai - Mouscron - Lille : intensification de la desserte

La ligne 75

La ligne 75 rejoint Gand à Lille via Courtrai et Mouscron. Modernisée et électrifiée en 1980 et 1981, elle a permis de tracer des relations IC directes toutes les deux heures entre Anvers et Lille via Gand (IC C). Ces relations sont assurées par des rames tractées ou poussées selon le sens de circulation par des locomotives bicourant de la SNCB du type 12, capables de circuler sous 3 000 volts en continu ou sous 25 000 volts en alternatif.

Pénétrant en France à Tourcoing, les trains desservent aussi toutes les gares intermédiaires jusqu’à Lille-Flandres, à savoir Roubaix, Croix-l’Allumette et Croix-Wasquehal.

Amélioration de la desserte et correspondances TGV

Des échanges de vues ont eu lieu entre la SNCB et la SNCF en vue d’améliorer les relations entre Courtrai et Lille, spécialement en vue de l’arrivée du TGV en région lilloise en mai 1993 : le nombre de relations entre les deux villes a pratiquement pu doubler depuis l’horaire d’été 1993, offrant ainsi presque toutes les heures une relation entre les deux villes. En outre, plusieurs de ces trains donnent correspondance à des TGV, soit en gare de Lille-Flandres, soit, pour quelques-uns d’entre eux, en gare de Tourcoing où sont amorcées certains relations TGV vers Paris.

De ce fait, Courtrai se trouve plusieurs fois par jour à quelque 2 heures de Paris. Là également, des perspectives plus intéressantes encore apparaîtront à la fin septembre 1993, lorsque la relation Paris - Lille aura été accélérée de 20 minutes grâce à l’ouverture complète de la ligne à grande vitesse. Et ces améliorations seront suivies d’autres, à terme, avec l’arrivée des TGV EUROSTAR dès 1994 et la mise en service de la ligne d’interconnexion autour de Paris permettant des relations avec de nombreuses destinations provinciales en France.


Source : Le Rail, Août 1993