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Comment l’A.C. Cuesmes répare les ressorts

C. Dohet, ingénieur principal.

mercredi 17 août 2011, par Rixke

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 Pourquoi l’A.C. Cuesmes fut choisi

Avant 1934, la révision des ressorts du matériel moteur et de transport de notre Société était assurée par chacun des ateliers centraux pour les types de locomotives, de voitures et de wagons qu’ils avaient à réparer ; cette organisation, qui avait l’avantage de la simplicité, présentait de sérieux inconvénients : les procédés et les normes de réparation différaient d’un atelier à l’autre, et la qualité du travail laissait parfois à désirer parce que l’outillage était rudimentaire, particulièrement pour le traitement thermique des aciers à ressorts.

Comme l’importance de la production ne permettait pas d’installer, dans chaque atelier contrai, un outillage perfectionné et coûteux, il fut décidé d’équiper convenablement un seul atelier et d’y concentrer la réparation de tous les ressorts ; l’atelier central de Cuesmes fut choisi en raison de l’effectif important de wagons qu’il était chargé de réparer.

L’équipement fut terminé vers 1935 ; il a subi, depuis, quelques modifications, dont la principale a été la substitution du mazout au gaz de ville pour chauffer les fours.

 L’implantation des chantiers

L’implantation des chantiers a été conçue pour réaliser un cheminement logique des pièces au cours de la fabrication, évitant tout rebroussement et réduisant les transports au minimum ; d’autre part, l’atelier a été équipé des engins de levage ou de manutention adéquats.

Le hall de préparation

Les ressorts avariés sont déchargés et classés dans le parc par pont roulant ; ils sont repris par série, amenés par transporteur à chaînes à l’intérieur de l’atelier, puis placés, par poutres roulantes et palans, sur les presses hydrauliques, grâce auxquelles les ressorts seront débridés. L’eau à 80 kg. de pression, nécessaire au fonctionnement de ces presses et d’autres machines hydrauliques, est fournie par un groupe de trois pompes à pistons et de trois accumulateurs.

Débridage des ressorts et visite des lames. Dans le fond : les trois accumulateurs.

 La préparation

Cette section répare les pièces de remploi et fabrique les pièces neuves de remplacement.

Son outillage comprend :

  • Une presse de 300 tonnes pour cisailler à froid, aux dimensions d’utilisation, les barres d’acier fournies par le laminoir ;
    La presse de 300 tonnes à cisailler
  • Une presse multiple pour cisailler à chaud les lames traitées à remployer ;
  • Une machine à enrouler les œillets d’extrémité ;
  • Une presse hydraulique pour le refoulement des lardons d’extrémité ;
  • Une tétonneuse à centrage automatique pour la formation des étoquiaux ;
  • Des pilons, des postes de soudure et des mortaiseuses pour la réparation des colliers ;
    Le calibrage des brides au pilon.
  • Des fours à créneaux pour la chauffe des lames.

 Le montage

Dans le hall de fabrication, les lames reçoivent le traitement thermique adéquat aux aciers silicomanganeux, traitement qui leur donnera la résistance nécessaire.

Trois fours de trempe de 5,70 m. de longueur occupent le centre du hall ; ces fours sont chauffés au mazout, et la température, au défournement des lames, est maintenue à 875°, avec une tolérance de ± 10°. Les températures à l’enfournement et au défournement sont mesurées par cannes pyrométriques ; elles sont indiquées et enregistrées sur graphiques par des potentiomètres. Suivant le réglage voulu, ceux-ci commandent automatiquement des électrovalves placées sur les conduites de mazout et d’air des brûleurs.

Les lames, placées à plat sur un chariot de chargement, sont déposées dans l’avant-four fermé, sur deux longerons animés d’un mouvement d’excentrique réglable, qui, à chaque rotation, posent les lames sur la sole et les reprennent ensuite pour les avancer. La production possible par four est de 150 ressorts en moyenne par 24 heures.

A la sortie du four de trempe, on place immédiatement la lame dans une des trois machinée à cintrer et à tremper, contre un gabarit souple, qui, en se fermant, l’applique contre un ressort-matrice de courbure réglable. Quand le gabarit se ferme, la machine bascule dans le bac d’eau de trempe ; en même temps, un second gabarit souple s’ouvre de l’autre côté, et la lame trempée à l’opération précédente est éjectée.

Après vérification de la courbure, les lames sont « revenues » à 450° pendant vingt minutes, de façon à supprimer la fragilité de la trempe. Le four de revenu est automatique, la sole étant formée d’un tablier métallique entraîné par chaîne ; la température est contrôlée comme celle des fours de trempe.

Sa production possible est de 20 ressorts à l’heure.

Immédiatement après revenu des lames, ou profite de leur échauffement pour corriger à la main celles qui sont déformées par le traitement thermique.

Après enduisage d’un mélange de vaseline et de graphite, les lames devant constituer un ressort sont serrées dans un étau hydraulique pivotant, pour permettre le passage de la bride, préalablement chauffée.

Après placement des cales, vérification et centrage, la bride, toujours chaude, est serrée sur les quatre faces, dans une presse de 80 tonnes à deux cylindres (horizontal et vertical).

Deux presses d’essai permettent la vérification des ressorts par application des flexions statiques et dynamiques et par mesure de la flèche sous différentes charges.

Les ressorts sont ensuite peints et déposés en magasin.

Au cours de ces opérations, les ressorts sont manutentionnés au moyen de palans électriques, de transporteurs à rouleaux, de vérins pneumatiques tournant et roulant, de transporteurs mécaniques, de pont roulant.

 La production

L’atelier des ressorts utilise 60 ouvriers et fournit journellement une centaine de ressorts aux services du réseau. Cette fourniture comprend approximativement : 30 ressorts de locomotives, 10 de voitures, 60 de wagons.

Les services du réseau sont ravitaillés, toutes les quinzaines, par dix wagons, expédiés suivant un calendrier bien défini ; ces wagons ramènent les ressorts avariés.

L’atelier des ressorts répond aux buts poursuivis : son personnel spécialisé et son équipement garantissent la fourniture de produits de qualité à un faible prix de revient. Il fait honneur à ceux qui l’ont conçu et organisé.


Source : Le Rail, janvier 1958