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Application de la télévision à la S.N.C.B.

H. A. Vandevelde.

mercredi 22 mai 2013, par rixke

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Par télévision, nous entendons généralement la « télévision domestique » qui connaît un grand essor depuis dix ans. Il existe cependant une autre sorte de télévision, moins connue du grand public, mais qui peut rendre d’inestimables services : on l’appelle généralement la « télévision en circuit fermé ».

En quoi diffèrent ces deux systèmes ? Dans la télévision domestique, on fait usage d’émetteurs pour transmettre l’image aux antennes de réception qui ornent nos toits ! Dans la télévision en circuit fermé, un câble assure la liaison directe entre la caméra et le récepteur, appelé moniteur ; l’image captée n’est pas diffusée dans l’éther, mais elle parvient par la voie du câble jusqu’à l’endroit où elle doit être reproduite par le moniteur ; avec ce système, l’appareillage est beaucoup moins compliqué, étant donné que l’émetteur et la partie haute fréquence du récepteur sont supprimés. La transmission par câble présente en outre l’avantage d’éliminer les parasites électriques extérieurs.

Toute installation de télévision en circuit fermé comporte trois parties principales : la caméra, le câble de liaison et le moniteur.

La caméra capte l’image, la transforme par un jeu de lentilles en oscillations électriques et amplifie celles-ci. Le câble conduit cette énergie au moniteur, en subissant un certain affaiblissement en cours de route. Le moniteur amplifie les signaux et reconvertit les oscillations électriques en une image sur un tube cathodique.

Vue de deux moniteurs en fonctionnement.

Avec des moyens simples, une image peut être transmise jusqu’à une distance d’environ un kilomètre. En utilisant des câbles spéciaux, qui limitent la perte électrique, cette distance peut être portée à quatre kilomètres. On peut atteindre de plus grandes distances encore (environ 20 km) en scindant le câble en sections et en plaçant, après chaque section, un amplificateur intermédiaire qui annule l’affaiblissement dans la partie du câble qui le précède.

La télévision en circuit fermé offre une multitude d’applications : ce système permet de « placer des yeux » là où on le désire. Ainsi on peut obtenir des images d’endroits inaccessibles ; c’est le cas notamment pour suivre le processus de combustion ou de fusion dans un four, étudier à distance des interventions chirurgicales ou transmettre des images abyssales. On peut aussi placer des « yeux de télévision » à des endroits où l’homme est exposé à des dangers, par exemple lors d’essais de moteurs à réaction ou d’opérations chimiques dangereuses.

En outre, il y a beaucoup de domaines dans lesquels la télévision en circuit fermé permet des améliorations ou de réaliser des économies. Une application typique : la signalisation routière. Dans bien des villes, la régulation du trafic est devenue inimaginable sans l’intervention de caméras, placées aux carrefours et le long des routes fort encombrées. En cas de saturation ou d’accident, le régulateur central des circulations, équipé de moniteurs et d’une télé-commande des signaux routiers, peut faire dévier le trafic sur-le-champ. Dans de longs tunnels à trafic intense, on fait aussi usage du contrôle télévisé pour prévenir des embouteillages.

Notre Société utilise jusqu’à présent deux sortes d’installations de télévision en circuit fermé : pour la surveillance à distance des passages à niveau et pour la manœuvre à distance de ponts-rails mobiles.

De nombreuses gares sont entourées de plusieurs passages à niveau. Le contrôle télévisé permet au service des passages à niveau de faire commander les barrières à distance et de centraliser dans la gare la desserte de plusieurs passages à niveau.

A chaque passage à niveau, on place généralement deux caméras ; chaque caméra contrôle toute la superficie du passage à niveau, ainsi qu’une des voies d’accès. Dans le poste centralisateur, chaque caméra étant reliée à un moniteur, l’agent responsable est donc à même de fermer le passage au moment propice avec la certitude que ni des personnes, ni des véhicules ne seront enfermés entre les barrières.

Semblables installations existent à Gand Muide, Roulers, Ath, Bressoux, Lierre et bientôt à Menin, Namur et Blandain.

Pour ce qui concerne les ponts-rails mobiles, deux d’entre eux ont, jusqu’à présent, été équipés de la télévision : à Kapelle o/d Bos (pont-rail tournant au-dessus du canal Bruxelles - Willebroek) et à Furnes (pont-rail levant sur le canal Nieuport - Dunkerque). L’agent responsable doit avoir une vue complète sur les mouvements de la navigation, veiller à ce que ces ponts soient ouverts à temps et s’assurer qu’au moment de la fermeture, aucun bateau ne soit mis en danger.

Vue des deux moniteurs encastrés dans le pupitre de commande du pont levant de Furnes.

Les installations de télévision précitées sont généralement utilisées jour et nuit. Pour obtenir des images de nuit dans l’état actuel de la technique, on est obligé d’éclairer les zones à observer avec une intensité lumineuse de 10 à 50 lux, ce qui correspond à un bon éclairage de rue. On peut admettre que pour un faible éclairage, la sensibilité des installations de télévision actuelles correspond environ à celle de la vue humaine. Moyennant l’utilisation de lentilles très coûteuses à grande ouverture, on peut obtenir une plus grande sensibilité que celle de nos yeux ; néanmoins on est malgré tout obligé d’utiliser des intensités lumineuses d’environ cinq lux. Dans les cas où les zones à éclairer sont étendues, l’éclairage supplémentaire entraîne indiscutablement des frais permanents.

L’idéal serait de pouvoir obtenir des images de nuit sans éclairage supplémentaire. Il y a deux ans, c’était une utopie. Grâce à des recherches récentes et au développement d’optiques à fibres de verre, couplées à des amplificateurs électroniques, on est parvenu à augmenter la sensibilité de 50.000 fois, ce qui permettrait de recevoir des images parfaites sur un moniteur avec un éclairage de 0,001 lux (ce qui correspond environ à l’éclairage produit par les étoiles sans clair de lune). Bien que ces amplificateurs d’images restent jusqu’à présent réservés aux applications militaires, il ne faudra probablement plus longtemps avant qu’ils soient disponibles sur le marché, ce qui ouvrirait de toutes nouvelles perspectives à la télévision en circuit fermé.

Caméra installée sur un poteau avec plate-forme à proximité du pont tournant de Kapelle o/d Bos.

Source : Le Rail, juin 1969