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L’acte de naissance de la SNCB : la loi du 23 juillet 1926

P. Dirickx, conseiller juridique principal honoraire.

mercredi 10 juillet 2013, par rixke

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 Un double but

La Société nationale des Chemins de fer belges a été créée en vertu de la loi du 23 juillet 1926.

En créant la Société, l’Etat poursuivait un double but : « réaliser tout ensemble la consolidation d’une grande partie de sa dette flottante et une réforme administrative qui s’impose ». (Chambre, Doc. n° 418)

 Consolidation de la dette flottante

En 1926, le franc belge subissait une crise qui avait fait tomber sa valeur de 25 à 15 centimes-or ; en juin 1926, l’Etat se trouvait devant une dette flottante de près de 6 milliards de francs, représentée par des bons du Trésor à court terme (3 mois et 6 mois) ; en outre, l’Etat avait encore d’autres dettes, venant à échéance au cours des années 1927 à 1931, pour un montant total de 9 à 10 milliards.

L’Etat se trouvait donc devant une dette si considérable qu’il ne pouvait songer à l’amortir ni même à la consolider au moyen des ressources à fournir par l’impôt ou par un emprunt, exclu par l’ébranlement du crédit de l’Etat. C’est dans ces conditions que le Gouvernement proposa de mobiliser les capitaux investis par le Trésor public dans les chemins de fer de l’Etat, en créant une société nationale, à laquelle l’Etat ferait apport du droit d’exploiter ses chemins de fer pendant 75 ans ; en rétribution de cet apport, les actions de cette société, d’un montant total de 11 milliards de francs, seraient attribuées à l’Etat, qui les remettrait au Fonds d’amortissement de la dette publique chargé de l’émission de 10 milliards d’actions privilégiées, à offrir de préférence aux porteurs de titres de la Dette publique. En termes lapidaires, M. Anseele, ministre des Chemins de fer, déclara à la Chambre : « Voilà la caractéristique du projet au point de vue financier : c’est l’échange de papier belge d’un certain nom, contre du papier belge portant un nouveau nom. » (Chambre, Annales, p. 2294)

II convient de rappeler que la valeur du réseau (installations et matériel) était évaluée, en 1926, à 3 400 millions de francs-or (Ch., Ann., p. 2290) ou encore à environ 20 à 25 milliards de francs-papier (U. Lamalle - Histoire des chemins de fer belges, 1943, p. 146) et que la valeur du droit de jouissance et d’exploitation n’est fixée qu’à 11 milliards.

 Autonomie financière et administrative

Le second but poursuivi par le projet de loi était la réorganisation des chemins de fer de l’Etat.

Avant 1926, l’exploitation des chemins de fer par l’Etat avait fait l’objet de plusieurs critiques, concernant notamment l’ingérence de la politique, les lenteurs administratives, et surtout l’incorporation du budget des chemins de fer dans le budget général.

Plusieurs projets d’autonomie furent étudiés. En 1912, une commission installée par le ministre avait rédigé un projet de loi instituant une Régie des chemins de fer de l’Etat. Après étude par une autre commission, le Gouvernement déposa, en 1919, un projet de loi créant une Régie nationale des chemins de fer. Le 24 juillet 1924, la Chambre vota un autre projet, visant uniquement l’autonomie financière, mais ce projet fut, comme le précédent, rendu caduc par la dissolution des Chambres.

La gravité de la crise financière de 1926 fit s’évanouir toutes les objections contre la réforme proposée. Le projet de loi créant la Société nationale des Chemins de fer belges fut examiné et voté par le Parlement avec une remarquable diligence : le projet, déposé le 8 juillet 1926, fut examiné par la Section centrale de la Chambre, qui déposa son rapport le 15 juillet ; le texte fut longuement discuté le 16 et voté le 17 (sur 102 membres, 96 répondent oui, 4 non et 2 s’abstiennent) ; le Sénat l’adopta à l’unanimité le 22 juillet ; signée par le Roi le 23, la loi fut publiée dans le Moniteur du 24 juillet 1926.

La discussion avait été animée, mais parfois teintée d’humour ; ainsi M. Fischer (soc.) déclara : « Messieurs, j’avais quelques considérations à faire valoir à propos du projet de loi dont nous sommes saisis, mais par contre j’ai d’autres raisons qui me poussent à renoncer à la parole... Tout à l’heure, deux orateurs ont émis, à propos du caractère de ce projet de loi, deux thèses totalement opposées. En effet, M. Jacquemotte (comm.) s’est écrié : « Vous livrez le chemin de fer aux capitalistes ! », et M. Strauss (lib.) nous a dit : « Vous livrez les chemins de fer aux socialistes ! » Eh bien, Messieurs, je suis tellement désireux d’être fixé sur ces deux opinions manifestées avec une égale virulence que je préfère me rasseoir et écouter plutôt que de parler. » (Ch., Ann. p. 2282)

 Une triple préoccupation

Dans son Rapport à la Chambre, M. Brusselmans s’exprime comme suit : « Création d’un organisme industriel, fort et indépendant, avec tous les gages d’une belle prospérité, maintien des droits essentiels de contrôle de l’Etat, garantie de droits acquis à un personnel nombreux et fidèle, voilà les trois pensées qui sont à la base du projet qui vous est soumis. » (Ch. Doc. n° 418.)

Le régime instauré par la loi du 23 juillet 1926 accorde à la Société nationale à la fois l’autonomie financière et l’autonomie administrative.

La Société nationale est un organisme autonome, ayant une personnalité juridique indépendante de l’Etat. (Exposé des motifs, Ch., Doc. n° 384 et Rapport, Ch. Doc. n° 418.)

L’autonomie financière est assurée par un capital de 11 milliards de francs, constitué de 10 millions d’actions ordinaires de 100 F chacune (1 milliard de francs), nominatives et inaliénables par l’Etat, et de 20 millions d’actions privilégiées de 500 F chacune (10 milliards de francs) ; les actions privilégiées sont au porteur. Les actions privilégiées ont droit à un dividende fixe, déterminé par le Gouvernement, à charge de l’Etat et à la moitié des bénéfices nets ; les actions ordinaires ont droit à l’autre moitié des bénéfices nets.

Le bilan et le compte de profits et pertes sont établis par le Conseil d’administration et soumis à l’approbation de l’assemblée générale des actionnaires ; ils sont communiqués aux Chambres.

L’autonomie administrative est assurée par la création d’organes propres à la Société : le Conseil d’administration et l’assemblée générale des actionnaires. L’assemblée générale est composée des titulaires d’actions ordinaires et privilégiées ; chaque action ordinaire donne droit à une voix, chaque groupe de dix actions privilégiées donne droit à une voix ; l’Etat, titulaire de 10 millions d’actions ordinaires, a donc 10 millions de voix, tandis que les porteurs des 20 millions d’actions privilégiées, représentant 10 milliards de francs, ne disposeraient que de 2 millions de voix, même s’ils étaient tous présents ou représentés.

Le Conseil d’administration est composé de 21 membres : 10 membres sont nommés par le roi et choisis à raison de leur compétence particulière, 5 membres sont nommés par le roi, sur une liste double de candidats présentés par le Fonds d’amortissement de la Dette publique (actuellement par les ministres des Finances et des Communications), 3 membres sont nommés par le roi sur une liste double de candidats présentés par le Conseil supérieur des Classes moyennes, les membres employés et ouvriers du Conseil national du Travail, et le Conseil supérieur de l’Agriculture, 3 membres sont nommés par le personnel. Le ministre des Communications assiste avec voix délibérative, lorsqu’il le juge convenable, aux réunions du Conseil d’administration ; dans ce cas, il préside la réunion.

 La représentation du personnel

L’article 7, 4° de la loi prévoit que « trois membres (du Conseil d’administration) sont nommés par le personnel ». Le Rapport à la Chambre notait à ce propos : « La Section centrale entend que les membres du Conseil d’administration à désigner par le personnel, le seront par les organisations syndicales, comme la pratique existe déjà au Département des chemins de fer. » (Doc. n° 418.)

Lors de la discussion des articles, M. De Bruyn proposa un amendement tendant à préciser cette disposition comme suit : « Trois membres seront nommés par les organisations syndicales groupant toutes les catégories de personnel, fonctionnaires, employés et ouvriers. »

M. Brusselmans, rapporteur, déclara à ce propos : « Je vois avec plaisir que le principe de la représentation du personnel dans le Conseil d’administration ne semble être contesté par aucun des groupes politiques de cette Chambre. La seule difficulté est de savoir comment la représentation du personnel sera réalisée. On peut la concevoir de deux façons : ou bien une représentation des organisations syndicales, ou bien une représentation résultant du scrutin de tous les agents organisés en collèges électoraux. Ce second mode de désignation entraînera un système d’élections fort compliqué. Après examen, c’est la première manière que nous avons adoptée... » (Ann., p. 2298.)

Après un nouvel échange de vues, M. De Bruyn retira son amendement.

 Le contrôle de l’état

Le Gouvernement précisa à plusieurs reprises que l’Etat conservait la propriété du réseau, et que la Société n’obtenait que le droit d’exploitation subordonné à un contrôle de l’Etat.

Un amendement de M. De Bruyn tendait à remplacer les mots « Société nationale des Chemins de fer belges » par « Société nationale pour l’exploitation des chemins de fer de l’Etat belge » ; après intervention du rapporteur, M. Brusselmans, concernant « cette formule assez malaisée, et qu’il faudrait reproduire sur tous les documents », cet amendement, mis aux voix, fut rejeté. (Chambre, Ann., p. 2280, 2293, 2296.)

Le droit de contrôle de l’Etat est prévu dans plusieurs dispositions de la loi de 1926 :

  • les Chambres nomment les six membres du Collège des commissaires et autorisent les emprunts ;
  • le roi établit et modifie les Statuts, nomme 18 des 21 administrateurs, fixe leur traitement et celui des commissaires, approuve les extensions de réseau et les suppressions de lignes, fixe le dividende alloué aux actions privilégiées ; il peut interdire le relèvement des tarifs de transport ou en exiger l’abaissement ;
  • le ministre des Communications préside le Conseil d’administration, avec voix délibérative s’il y assiste ; il préside également l’assemblée générale et la commission paritaire nationale ; il approuve les délibérations du Conseil d’administration concernant les achats et ventes d’immeubles dont la valeur dépasse un certain montant, et les adjudications et marchés d’une certaine durée ou importance ;
  • le ministre des Finances fixe les conditions d’émission des actions privilégiées et des emprunts ; il approuve le placement des fonds disponibles.

Ces mesures ont encore été renforcées par la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains organismes d’intérêt public, par la loi du 1er août 1960 et par l’arrêté royal n° 89 du 11 novembre 1967.

 La garantie des droits acquis du personnel

La garantie des droits acquis du personnel des Chemins de fer de l’Etat, en fonction en 1926 et passant au service de la Société nationale, fit l’objet des préoccupations du Gouvernement et du Parlement.

L’article 13 de la loi prévoit que « la situation du personnel actuellement attaché à titre définitif à l’Administration des chemins de fer de l’Etat sera réglé en substance de la manière suivante : ... la commission paritaire établira le Statut du personnel. » Le Rapport de la Section centrale de la Chambre précisa que « le Gouvernement désire assurer à ce personnel le respect scrupuleux des droits acquis par une longue carrière de loyaux services à l’Etat. » (Chambre, Doc. n" 418.) Le Rapport des Commissions réunies des Finances et des Chemins de fer du Sénat confirma ce point, et ajouta : « II doit être entendu que le personnel en général peut avoir l’assurance de n’être pas moins bien traité par la Société nouvelle qu’il ne le serait s’il restait au service de l’Etat. » (Sénat, Doc. n’227.)

Lors de la discussion du projet, M. De Bruyn proposa d’ajouter aux mots « La Commission paritaire établira le Statut du personnel, « la précision » lequel consacrera les droits acquis ». Cet amendement fut retiré après les explications rassurantes du ministre Anseele, de M. Heyman et de M. Van Isacker ; ce dernier déclara notamment : « Nous croyons que les garanties que l’on accorde au personnel sont suffisantes. Rien n’est perdu de ce que l’Etat a accordé à ses ouvriers et employés. Chaque droit acquis reste conservé. Plus encore, dans un statut à établir par une commission paritaire composée de représentants du personnel et de l’administration, les conditions de travail favorables existant actuellement seront fixées et obtiendront ainsi force de loi. » (Chambre, Ann., p. 2269, 2280, 2281, 2293, 2301, 2302.)

Le contenu de ces droits acquis fut précisé au Sénat par M. Toch : « II y a pour les travailleurs des intérêts considérables en jeu. Tout d’abord, leurs droits déjà acquis : l’application loyale de la journée de huit heures, et leur repos hebdomadaire ; leur pension ; le traitement en cas d’accident ; la réorganisation de la caisse de secours, de la caisse des veuves et des orphelins ; le maintien de leurs jours de congé ; en un mot, toute une série de réformes qui, depuis quelques mois, ont été introduites par le ministre actuel, ce dont les travailleurs lui sont très reconnaissants. » (Sénat, Ann. p. 1133.)

 La commission paritaire nationale

La disposition de la loi qui intéresse le plus le personnel est certainement l’article 13. Cet article prévoit la création d’une commission paritaire (dite constituante), composée de vingt membres, dont 10 nommés par le Conseil d’administration et 10 nommés par les organisations groupant le personnel, et présidée par un jurisconsulte sans voix délibérative nommé par le Roi. Cette commission est chargée d’établir le statut du personnel, qui ne peut être modifié qu’avec le consentement de la commission paritaire statuant à la majorité des deux tiers.

Le statut du personnel prévoit l’existence d’une commission paritaire nationale, composée également de vingt membres, nommés comme ci-dessus, et présidée par le ministre ou son délégué. Cette commission a les pouvoirs suivants :

  1. examiner toutes les questions relatives au contrat de travail, à la sécurité, à l’hygiène et, en général, à toutes les questions intéressant directement le personnel ;
  2. donner son avis sur toutes les questions d’ordre général qui lui sont soumises, et qui peuvent intéresser indirectement le personnel ;
  3. participer à la gestion des institutions créées ou à créer en faveur du personnel.

Dans son exposé général introductif du projet de loi, M. le ministre Anseele déclara, à propos des commissions paritaires : « Je n’ai pas, je pense, à m’appesantir sur le principe, les conseils du personnel ayant existé sous le ministère Renkin, ayant été maintenus par M. Poullet, et élargis par mon prédécesseur direct, l’honorable M. Neujean. Moi-même, j’ai développé encore cette réforme sociale par la création de commissions paritaires. » Au cours de la discussion, M. Anseele et M. Jaspar, ministre de l’Intérieur, précisèrent que les dispositions concernant la compétence de la commission paritaire nationale et des commissions paritaires régionales étaient inspirées des règlements de la Compagnie des chemins de fer du Nord français. (Chambre, Ann., p. 2269, 2288, 2289.)

La représentation du personnel au sein de la commission paritaire donna lieu aux mêmes discussions que celles concernant la désignation des trois administrateurs représentant le personnel.

Le ministre, M. Anseele, déclara notamment : « L’honorable M. Lemonnier s’est plaint de devoir constater que les ouvriers non syndiqués ne seront pas représentés au conseil d’administration ni aux commissions paritaires. Je me demande vraiment comment on pourrait le faire et quelle est la conception de l’honorable M. Lemonnier - et peut-être d’autres libéraux avec lui - à l’égard des rapports entre patrons et ouvriers ? » M. Heyman : « Comment voulez-vous représenter des ouvriers qui ne sont pas groupés ? » M. De Bruyn : « Ils vont se syndiquer en syndicat des non-syndiqués ! » (Chambre, Ann., p. 2288, 2294.)

A propos de la désignation des syndicats représentatifs, M. Heyman déclara : « On s’est demandé, en commission, ce qu’il fallait entendre par les mots « groupant les membres du personnel ». Ici, il est bien facile, par une simple interprétation, de trancher la question. En effet, actuellement déjà, il existe, aux chemins de fer, une commission paritaire dans laquelle siègent les délégués de trois groupements : le syndicat national (soc), le syndicat chrétien et le syndicat des fonctionnaires (Note : Fédération générale indépendante des fonctionnaires et employés). Je crois que nous pourrions, d’accord avec le Gouvernement, donner comme interprétation à cet article que la commission paritaire, dont il y est question, pourrait se composer des délégués des trois groupements qui forment actuellement déjà la commission paritaire existant aux chemins de fer. »

A une intervention de M. Pécher (Mb.) déclarant que « tous les groupements doivent pouvoir être représentés », M. Anseele avait répondu : « Comme il y a environ une cinquantaine de syndicats, nous avons été obligés de nous adresser aux plus importants, qui groupent souvent toutes les catégories de personnel. » (Chambre, Ann., p. 2298, 2301.)

En ce qui concerne le mode de désignation des délégués, M. De Bruyn (soc.) précisa : « II vient de paraître un ordre général n° 8, que le ministre des chemins de fer a signé il y a quelques jours, qui donne satisfaction aux démocrates-chrétiens. Vous savez que nous avons toujours été partisans d’une élection. Puisqu’il fallait trouver un terrain d’entente, nous avons accepté une représentation basée sur les effectifs contrôlés. Le texte admis et déjà consacré par une instruction pourra servir demain de directive pour désigner ceux des membres qui représenteront les différentes organisations syndicales. » (Ch.,Ann., p. 2302.)

Enfin, M. Heyman posa une question : « II se peut que, lors d’une délibération, les dix membres désignés de l’administration soient en désaccord avec les délégués des différents groupes. Alors il y aurait conflit, et de quelle façon va-t-on le trancher ? On a demandé si une autre autorité serait éventuellement appelée à trancher le différend. Je crois que la réponse doit être négative, et qu’il faut dire qu’une question qui obtient dix voix pour, alors qu’il y a dix voix contre, doit être considérée comme rejetée, ainsi qu’il en a toujours été. En d’autres termes, il faut comprendre la commission paritaire comme étant instituée, surtout en vue d’obtenir un accord entre les deux parties qui la composent. Si nous sommes d’accord à ce sujet, je crois que nous pourrions nous déclarer satisfaits. »

M. Jaspar, ministre de l’Intérieur, lui répondit : « M. Heyman nous a demandé : « Que fera-t-on quand il n’y aura pas d’accord au sein de la commission paritaire, par exemple quand il y aura dix voix dans un sens et dix voix dans l’autre ? » Je me hâte de lui répondre que l’essence même des commissions paritaires est d’éviter qu’il s’y forme une majorité, afin d’aboutir à une conciliation. » (Marques nombreuses d’assentiment.) (Ch. Ann., p. 2302, 2303.)

L’expérience a confirmé l’exactitude de cette conception ; en effet, la plupart des décisions de la commission paritaire nationale sont prises à l’unanimité, étant entendu que les textes qui lui sont soumis ont été longuement préparés, discutés et amendés au cours de réunions de la sous-commission paritaire.

 Les statuts

La loi prévoit en son article premier : « Les statuts de cette société seront établis et ne pourront être modifiés par le Gouvernement qu’en conformité des dispositions de la présente loi, qui sont essentielles. »

Lors de la discussion au Sénat, M. Jaspar, Premier ministre, déclara : « La loi que vous allez voter ne constitue pas l’entièreté des instruments juridiques qui doivent déterminer la nature, l’objet et l’activité de la Société nationale des chemins de fer belges. Il y a d’abord les statuts, qui devront être rédigés également. Dans ceux-ci, une série de questions, qui ne sont pas visées dans la loi actuelle, devront, naturellement, être résolues. Il y a aussi le cahier des charges de la concession. Si nous avons fixé certains points dans la loi, c’est pour que les statuts, qui seront établis par arrêté royal, ne s’écartent pas des conceptions fondamentales qui, d’après nous, doivent présider à leur élaboration. Ne cherchez donc pas, dans la loi actuelle, la totalité des obligations de la Société et du mécanisme de l’organisme nouveau que nous créons. » (Sénat, Ann., p. 1137.)

Les statuts furent établis par un arrêté royal du 7 août 1926, qui fut remplacé par celui du 21 mars 1961.

7.003
Une naissance, ça s’arrose

Ces statuts reprennent la plupart des dispositions de la loi, mais précisent notamment le contenu de l’apport de l’Etat, les attributions du conseil d’administration et du comité permanent, les modalités de la réunion de l’assemblée générale, l’alimentation du Fonds de renouvellement et du Fonds de réserve.

 Les modifications de la loi de 1926

Depuis sa promulgation, la loi organique de 1926 a été modifiée par huit dispositions légales : arrêtés royaux du 14 janvier 1927 et du 15 janvier 1954, lois des 2 août 1955, 1er août 1960, 4 juillet 1962, 21 avril 1965 et 10 octobre 1967, arrêté royal n° 89 du 11 novembre 1967.

Les trois premiers textes comportent des modifications peu importantes : l’arrêté royal du 14 janvier 1927 permet la division des actions privilégiées de 500 F en cinq parts de 100 F ; l’arrêté royal du 15 janvier 1954 remplace à l’article 7 les termes « membres ouvriers et employés du Conseil national du Travail » par « membres du Conseil national du Travail représentant les organisations les plus représentatives des travailleurs » ; la loi du 2 août 1955 remplace, aux articles 5, 9 et 11, les mots « Conseil d’administration du Fonds d’amortissement de la Dette publique » par « le ministre des Finances ».

La loi du 1er août 1960 a notamment inséré un article 1 bis, précisant l’objet de la Société : outre l’exploitation des chemins de fer, elle peut aussi faire des opérations commerciales, industrielles et financières se rapportant directement ou indirectement à son but social, et ce soit par elle-même, soit moyennant autorisation accordée par le Roi, par participation à des organismes ou sociétés belges, étrangers ou internationaux.

A la suite de l’évolution de la jurisprudence de la Cour de Cassation et du Conseil d’Etat, la loi du 4 juillet 1962 a complété l’article 13 sur deux points : d’une part, elle a donné pouvoir à la Commission paritaire nationale d’établir un régime propre à la Société en matière de réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents sur le chemin du travail et des maladies professionnelles ; d’autre part elle a précisé que la Société et son personnel étaient soumis à la législation relative aux Conseils de prud’hommes. La loi du 21 avril 1965 a apporté une troisième modification à cet article 13 : alors que le texte de 1926 se bornait à dire que la commission paritaire était composée de vingt membres désignés par le Conseil d’administration et les organisations groupant les membres du personnel, la loi de 1965 précise que les membres représentant le personnel « sont nommés, selon les modalités que le Statut fixe, par les organisations qui, suivant les conditions déterminées par le Statut, sont considérées comme les plus représentatives de l’ensemble du personnel, tant sur le plan interne de la Société que sur le plan national et interprofessionnel ».

La loi du 10 octobre 1967, approuvant le nouveau Code judiciaire, qui a supprimé les conseils de prud’hommes et créé les tribunaux du travail, a remplacé le dernier alinéa de l’article 13, actuellement rédigé comme suit : « La Société nationale des chemins de fer belges est soumise à la juridiction des cours et tribunaux du travail, même en ce qui concerne son personnel définitif ».

Enfin, l’arrêté royal n° 89du 11 novembre 1967, pris en vertu d’une loi de pouvoirs spéciaux, a apporté une cinquième modification à l’article 13, en précisant que « l’article 11 § 1 de la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains organismes d’intérêt public, n’est pas applicable à la Société ». Contrairement aux autres organismes visés par cette loi, le Statut du personnel de la Société n’est donc pas fixé par le Roi, mais est établi et modifié par la Commission paritaire nationale. Cet arrêté royal précise encore le rôle et la composition du Collège des Commissaires, et certaines modalités du contrôle ministériel.

Aucune de ces modifications n’a porté atteinte aux dispositions essentielles de la loi de 1926, qui régit depuis 50 années le fonctionnement de la Société.


Source : Le Rail, juillet 1976