Accueil > Le Rail > Infrastructure > Voie > Les traversées à aiguilles

Les traversées à aiguilles

ir. E. Marckx

mercredi 23 octobre 2013, par rixke

Toutes les versions de cet article : [français] [Nederlands]

 Un nouveau type d’appareil de voie.

Depuis quelque temps, on peut voir sur notre réseau un nouveau type d’appareil de voie, dénommé traversée à aiguilles. La phase « prototype » étant terminée, la traversée à aiguilles commence à essaimer et on arrivera probablement fin 1980 à une vingtaine de poses en voie.

Mais... vous demandez-vous :

« Qu’est-ce au juste qu’une traversée de chemin de fer et pourquoi a-t-on créé maintenant un nouveau type de traversée ? ».

C’est à ces deux questions que nous voulons répondre.

 Les « anciennes traversées ».

Les traversées ont toujours fait partie de la gamme des appareils de voie nécessaires à l’exploitation du chemin de fer.

Elles permettent à deux voies de se couper sans que le train puisse aller de l’une à l’autre. Pour que les roues aient la possibilité de passer dans les deux directions de la traversée, les rails - qui portent et guident ces roues - doivent nécessairement être interrompus, ce qui crée des lacunes d’autant plus importantes que les itinéraires se coupent sous un angle faible.

La photo 1 montre une de ces lacunes, entre les deux « pointes » du rail interrompu.

Photo 1

Pour des raisons de sécurité, la longueur des lacunes a été limitée et donc aussi la valeur minimale de l’angle de traversée.

Cette contrainte crée des difficultés lorsqu’il s’agit de réaliser des bifurcations à parcourir à moyenne ou grande vitesse.

Afin de trouver un angle de traversée admissible, il a donc fallu souvent établir des entre-voies plus larges par l’intermédiaire de courbes et de contre-courbes, ainsi que l’indiquent les schémas 1 et 2.

Schémas 1 et 2

Pour assurer le plus longtemps possible le guidage des essieux dans la bonne direction, il a en outre été nécessaire de placer des contre-rails en face des lacunes.

Chaque franchissement de ce type de traversée - dont tous les éléments constitutifs sont rigides - engendre fatalement des chocs importants que tous les passagers du train connaissent bien.

Cette traversée a encore un autre inconvénient : elle limite la circulation de certains types de matériel nouveau « à très petites roues » qui a été développé spécialement pour les transports combinés rail-route sur des wagons à plancher bas (remorques et semi-remorques, grands conteneurs, etc.).

 La traversée à aiguilles.

Attendu qu’il fallait envisager des vitesses de plus en plus élevées sans hypothéquer en rien le confort et la sécurité, compte tenu également du coût d’entretien particulièrement élevé des traversées traditionnelles, on étudia la possibilité de mettre au point une traversée sans lacunes, qui en outre faciliterait les transports combinés rail/route.

Le tout étant de parvenir à supprimer ces lacunes et contre-rails, générateurs de tant d’ennuis.

La réponse de principe semblait simple : remplaçons-les par des aiguilles, c’est-à-dire par des éléments mobiles et manœuvres, pouvant, comme dans les branchements, assurer la continuité de roulement et de guidage pour l’itinéraire tracé ou autorisé.

Le schéma 3 donne une représentation générale d’une telle traversée avec ces 4 aiguilles. La position des aiguilles en traits pleins correspond à l’itinéraire autorisé indiqué.

Schéma 3

Les traits interrompus correspondent à la position renversée des aiguilles. Selon le sens de circulation, deux aiguilles sont donc ouvertes de façon à laisser une large ornière de libre passage, tandis que les deux autres aiguilles « ferment » les lacunes de façon à assurer un roulement et un guidage continus, (photo 2)

Photo 2

Mais... qui dit aiguilles, dit également dispositif complet de manœuvre et verrouillage (photo 3). En fait, c’est bien là le seul élément nouveau, qui pourrait, dans certains cas, compliquer le remplacement d’une ancienne traversée à lacunes par une traversée à aiguilles.

Photo 3

Profitant des possibilités nouvelles, offertes par les traversées à aiguilles, le choix s’est porté sur deux types différents, répondant chacun à des nécessités spécifiques d’exploitation et de combinaisons existant en voie. Une première traversée à aiguilles, de grande longueur, dans laquelle les deux voies se coupent sous un angle très faible (inutilisé jusqu’à présent par suite des lacunes, inadmissibles, qui en auraient résulté) et qui permet de réaliser des bifurcations parcourues soit à 120 km/h dans les 2 voies, soit à 160 km/h en voie directe et 90 km/h en voie déviée, dans une entre-voie normale de 2,25 m. (photo 4)

Photo 4

C’en est fini de ces tracés inconfortables avec des entre-voies anormales, des courbes et contre-courbes.

Une seconde traversée à aiguilles, plus courte, dans laquelle les deux voies se coupent sous le plus petit angle utilisé dans les traversées ordinaires et qui offre l’avantage de pouvoir se substituer complètement aux combinaisons existantes, et ceci sans grands frais. (photo 5)

Photo 5

Le seul inconvénient qui puisse intervenir, lorsqu’on envisage d’installer une traversée à aiguilles, c’est qu’on n’ait pas la place nécessaire pour mettre le dispositif de manœuvre et son moteur, soit sur le terrain, soit dans la cabine de signalisation. Compte tenu des avantages de cette traversée qui a recueilli un accueil très favorable, et aussi de la bonne collaboration entre tous les services intéressés (Voie, Signalisation, Exploitation), on peut estimer que vers 1983, une centaine de traversées à aiguilles seront posées sur notre réseau.


Source : Le Rail, juillet 1980