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Style et décoration

Phil Dambly.

mercredi 1er juin 2011, par rixke

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  Sommaire  

 L’aspect des locomotives.

L’impétueuse beauté des locomotives à vapeur a toujours suscité parmi les foules quantité d’admirateurs passionnés. L’esthétique de ces machines répondait à la conception platonicienne de la beauté qui résulte de l’adaptation harmonieuse de la forme à la fonction. Tout en variant selon les pays, l’esthétique a revêtu des formes sans cesse plus expressives des caractères de force ou de vitesse.

Abstraction faite de la période des origines de la locomotive, où le souci de fabriquer des machines capables de fonctionner le mieux possible était l’unique préoccupation des constructeurs, et de la première moitié du XIXe siècle, où l’Angleterre fournissait des locomotives dans le monde entier, on trouve quatre styles fondamentaux : anglais, français, allemand et américain.

Selon les époques et les tendances, les locomotives belges, à part celles de Belpaire et de Flamme, se rapprochaient du style anglais ou français, tout en ayant leurs propres particularités. D’ailleurs, les événements que nous avons rappelés [1] ont exercé une influence certaine sur leur construction. C’est ainsi que les machines du Nord Belge, construites en Belgique, étaient en fait des modèles du Nord français.

Nord Belge. Série 301 à 306 de 1900.

La plupart des machines commandées par l’Etat belge de 1898 à 1908, dérivées des locomotives du Caledonian Railway, dont elles conservaient le gabarit restreint, avaient une allure indiscutablement britannique. A l’opposé des machines continentales et américaines, elles n’étaient pas encombrées des tuyauteries extérieures, qualifiées de « cauchemar du plombier » par les cheminots d’outre-Atlantique.

Le type 41, ex-32 S, avait une allure indiscutablement britannique (1902).

L’élégance des types 6 et 8 compound de 1905, de style français, leur avait valu de la part des machinistes le surnom familier de « demoiselles ».

Les locomotives « Flamme » de 1910, types 10 et 36, frappaient le regard par leurs dimensions impressionnantes et leurs lignes tourmentées. A part le dessin de la paroi frontale de la boîte à fumée, de réminiscence « Caledonian », elles étaient typiquement belges. Les machines construites en Belgique ultérieurement l’étaient aussi, bien que le semi-carénage du prestigieux type 1 de 1935 rappelât la locomotive « Cock O’ The North », dessinée par sir Nigel Gresley pour le London & North Eastern Railway.

L’aspect caractéristique du type 12 de 1938 résultait d’un agencement spécial des tôles enveloppant la chaudière. Un bouclier frontal fendu, conçu par l’ingénieur français Huet, assurait une déviation adéquate de l’air, réduisant la résistance de marche aux grandes vitesses. Grâce au type 12, la S.N.C.B. possédait une locomotive carénée, classée parmi les mieux réussies. Il faut dire qu’à cette époque, un véritable engouement pour le carénage s’était emparé des compagnies de chemin de fer.

Les types 25 et 26 étaient des locomotives allemandes, commandées à l’industrie belge en 1942 et complétées pour la S.N.C.B. à la Libération. D’aspect très sobre, ces machines n’étaient pas les premières locomotives allemandes acquises par les chemins de fer belges. En 1919, au lendemain de la première guerre mondiale, d’importantes séries de locomotives dites « Armistice » étaient cédées à l’Etat belge. De types très variés, elles provenaient en grande partie des chemins de fer prussiens, et leur esthétique particulière ne permettait pas de se méprendre sur leur origine. Au fur et à mesure des révisions, elles ont été légèrement modifiées dans les détails : cheminées belges à chapiteau, réchauffeurs A.C.F.I., tampons, etc. Les plus représentatives ont été les types 64, ex-P8, et les types 81, ex-G81.

L’impressionnant type 10, de Flamme (1910).

En 1919, l’Etat belge racheta au Gouvernement britannique des locomotives américaines qui avaient été utilisées par la Railway Operating Division (R.O.D.) de l’armée anglaise. Les plus répandues étaient le type 40, de pur style américain, et le type 22 (plus tard, type 57). Cette locomotive-tender à la silhouette curieuse avait une soute à eau en selle sur la chaudière (saddle tank).

Les types 29 de 1946 provenaient du Canada et des Etats-Unis. D’allure très américaine, comme les types 38 importés en 1920, ces machines avaient été dessinées en fonction du gabarit international européen (R.I.C.), moins généreux que les gabarits d’outre-Atlantique.

En effet, la hauteur à la cheminée des locomotives américaines atteint couramment 4,57, 4,69, 4,77 et 4,89 m, tandis que certaines machines plafonnent a 4,98 et même à 5,25 m ! A l’instar des américaines, les locomotives à vapeur soviétiques atteignent fréquemment 4,82, 4,92 et 5,25 m. En France, la hauteur varie selon les modèles entre 4,20 et 4,28 m, maximum autorisé par le gabarit « passe-partout », devenu R.I.C. Elle atteint 4,55 m en Allemagne et 4,65 m en Europe centrale. Quant aux locomotives anglaises, elles atteignent parfois 4,08 m, mais dépassent rarement 3,99 m.

L’élégant type 8 de 1905, de style français.

La hauteur des locomotives belges atteignait, en général, 4,28 m. Celle du type 36 s’élevait à 4,33 m ; celle du type 5, à 4,48 m. En Belgique, la largeur des machines allait de 2,80 m pour les types « Mac Intosh » à 3,15 m pour les types « Flamme ». La largeur des locomotives européennes se situe généralement entre 2,90 et 3,10 m, tandis que celle des machines anglaises est limitée à 2,67 et 2,80 m. Les locomotives russes ont, en général, une largeur moyenne de 3,10 m. Celle des locomotives américaines varie de 3,05 à 3,25 m.

Le type 26, « locomotive de guerre » (1945).

On a souvent modifié l’aspect des célèbres machines créées par Belpaire de 1864 à 1885. Ces modifications étaient dues à l’amélioration des abris et au renouvellement des chaudières, dont il y eut trois modèles principaux : celui de 1889, avec cheminée carrée à large base ; celui de 1896, avec cheminée à large section, en forme de cône tronqué, dite « tronconique » ; celui de 1898, avec cheminée cylindrique ordinaire, surmontée d’un chapiteau en laiton poli.

Le type 64, locomotive « Armistice » (1919).

La plupart des types de locomotives à vapeur ont d’ailleurs subi, depuis leur mise en service, des transformations d’ordre interne ou externe, ces dernières modifiant plus ou moins sensiblement leur silhouette d’origine.

Le type 40, locomotive R.O.D., made in USA en 1917.
Le type 12 de 1938 était une locomotive carénée des mieux réussie.
Le type 29 de 1946, construit au Canada et aux Etats-Unis.
Type 1 de 1935 (avant l’adjonction des déflecteurs)

Le type 1 de 1935 rappelait la locomotive anglaise « Cock O’ the North ». Leurs proportions respectives étaient les suivantes :

  • Type 1 : longueur, avec tender, 24,64 m ; largeur, 3,100 m ; hauteur, 4,280 m.
  • Loc. anglaise : longueur, avec tender, 22,477 m ; largeur, 2,800 m ; hauteur, 3,990 m.
« Cock O’ the North »

Les transformations externes modifiaient la silhouette d’origine des locomotives.

Type 7 transformé (échappement Lemaitre, A.C.F.I.. déflecteurs).

Source : Le Rail, juillet 1966.


[1L’Etat et les compagnies.