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L’administration des Postes au service de la diffusion de la pensée et des valeurs financières

dimanche 5 septembre 2021, par rixke

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 Un peu d’histoire pour comprendre une évolution

Aux âges d’or de leur histoire, les Hébreux, les Chinois, les Egyptiens, les Perses, les Grecs et les Romains ont pu profiter de véritables services de relais qui transmettaient les messages. Sous César, une lettre adressée de Bretagne à Cicéron ne mit que 26 jours pour lui parvenir à Rome.

Dans nos contrées, en 807, après les invasions barbares, Charlemagne établit trois lignes régulières : partant d’Auxerre, elles se dirigeaient vers l’Italie, l’Allemagne et l’Espagne. Après Charlemagne, pendant plusieurs siècles, il n’y eut plus que des messagers particuliers à la solde des féodaux, des couvents, puis des communes. Quand la Renaissance augmenta les échanges intellectuels, on vit se créer autour de l’Université de Paris un service de messageries réservé, à l’origine, aux étudiants, mais qui devint rapidement accessible à tous. l’Université y trouvait son profit ; aussi disputa-t-elle longtemps son privilège à Louis XI, qui créa la première institution régulière de courriers gouvernementaux chargés du transport et de la remise de la correspondance (1464).

Après l’invention de l’imprimerie et la découverte de terres lointaines, on éprouva la nécessité d’un système de relations plus étendu. En 1490, l’archiduc Maximilien d’Autriche mit en branle une organisation internationale, que les princes de Tour et Taxis illustrèrent, pendant des siècles, comme « maîtres des postes » [1]. Les postes tassiennes [2] ont eu longtemps leur centre à Bruxelles.

La création des grands Etats modernes donna naissance, dans toute l’Europe, à des services de postes gouvernementaux ; ils supplantèrent les postes tassiennes et les postes communales qui s’étaient maintenues, non sans luttes. Mais les chefs d’Etat se réservant le droit de lire les lettres transportées et d’arrêter celles qu’ils jugeaient dangereuses, les abus de cette censure constituèrent un des griefs des révolutionnaires de 1789.

Depuis la chute de l’Ancien Régime, la poste repose sur des principes nouveaux :

  • Le secret des lettres est inviolable ;
  • Des fonctionnaires assermentés sont responsables du secret des correspondances ;
  • Le monopole de la poste est attribué à l’Etat démocratique pour mieux sauvegarder cette inviolabilité.

Au cours du XIXe siècle, sous la poussée de la révolution industrielle et sociale, à côté de la poste aux lettres, naquit la poste financière. Le mandat-poste fut créé, en France, en 1817, une trentaine d’années avant l’apparition du timbre-poste.

Depuis près de deux siècles, les services postaux, dégagés du pouvoir personnel du prince, favorisent l’épanouissement culturel et économique des communautés et œuvrent au rapprochement des peuples. Notons, à ce propos, qu’en 1872, les postiers belges participèrent à la fondation de l’UNION GENERALE DES POSTES qui devint, en 1874, l’UNION POSTALE UNIVERSELLE, préfiguration de la S.D.N. et de l’O.N.U.

 Au service du public

D’abord organisée au profit des souverains ou de quelques groupements puissants, la Poste est devenue un service public qui étend son action partout et l’exerce régulièrement au profit de tous.

Monsieur f. Struyf, directeur général.

Partant de sa mission première, l’acceptation, le transport et la remise des correspondances, elle a été, à la suite des facilités offertes par ses agences, chargée d’autres opérations, qui en ont fait la banque la plus populaire du pays. La Poste transporte des correspondances, des imprimés, des journaux... ; elle se charge d’opérations financières pour le compte de particuliers et effectue, pour d’autres institutions publiques, des prestations que la multiplicité de ses bureaux permet de mieux accomplir dans l’intérêt de la communauté (la participation aux opérations de la Caisse de Retraite date de 1890, la participation aux opérations de la Caisse d’Assurances de 1897, le débit de permis de pêche de 1899). De par sa mission et sa formation, la Poste donne satisfaction à des besoins collectifs dans des domaines où l’initiative privée serait insuffisante.

 Le monopole postal

La loi attribue à la Poste le monopole d’un service : celui de jouer le rôle d’intermédiaire entre l’expéditeur et le destinataire pour le transport :

  1. des lettres missives closes ou ouvertes ;
  2. des cartes postales ;
  3. des annonces, circulaires, prospectus, prix courants et avis de toute nature, LORSQU’ILS PORTENT L’ADRESSE DU DESTINATAIRE.

Sont exceptés du monopole postal :

  • Les lettres ou envois transportés par d’autres administrations publiques, dans les conditions à déterminer par le Roi ;
  • Les correspondances que des particuliers s’expédient par des personnes attachées à leur service ou celles qu’ils font prendre ou porter à la Poste ;
  • La correspondance qu’un particulier transporte pour son propre service ;
  • Les lettres de voitures et les factures, non cachetées, ne contenant que les énonciations nécessaires à la livraison des marchandises qu’elles accompagnent ;
  • Les papiers relatifs au service des chemins de fer ou de toutes autres entreprises de transports publics, circulant par le matériel des intéressés.

Ce monopole n’est pas critiqué ; il se justifie pour des raisons morales, politiques et économiques :

  • L’Etat doit pouvoir se tenir en communication permanente et sûre avec tous les agents des services publics et avec tous les citoyens ;
  • Il faut sauvegarder, dans l’échange des correspondances, les secrets de l’Etat et ceux des particuliers ;
  • L’entreprise privée ne pourrait pas, comme la Poste, offrir des services se caractérisant par l’universalité, la constance et la régularité ;
  • L’entreprise privée n’aurait pas consenti les tarifs dérisoires que la Poste applique en faveur de certaines prestations qui favorisent l’expansion culturelle ou commerciale.

 L’Office Des Chèques Postaux

Le premier Office des chèques et virements postaux fut créé en Autriche (de 1882 à 1887). M. le député DENIS qui proposa peu après l’adoption du système en Belgique ne fut pas suivi d’emblée : la loi du 28 décembre 1912 instaura l’Office des Chèques postaux dans notre pays et l’A.R. du 23 février 1913 en régla les modalités d’application. L’objectif à atteindre était de réduire dans la plus grande mesure la circulation monétaire en vulgarisant les règlements de comptes sans usage de monnaie.

Le nouveau service débuta le 16 avril 1913 et prit rapidement de l’extension. Actuellement, l’Office se développe au rythme d’environ 25.000 comptes nouveaux par an. Il en totalise près de 900.000. Ce succès extraordinaire est dû à la rapidité et à la simplicité du système, à la gratuité des virements et à la modicité des taxes (elles n’affectent que les opérations comportant un maniement d’espèces).

C’est à l’Office, beaucoup moins qu’aux banques, qu’on doit la place de choix conquise par la monnaie scripturale (le chèque, le virement et l’assignation). A lui seul, l’Office permet de réduire constamment de 20 % la circulation fiduciaire.

Le nombre journalier d’opérations enregistrées varie entre 500.000 et 1 million. Le personnel fait face à ce trafic énorme grâce à la mécanisation et à l’automatisation ; celle-ci a permis notamment de supprimer 10.000 heures de calcul par jour.

Vue sur l’une des huit sections de comptes groupant chacune 200 agents environ.
Il faut cette imposante somme d’attention, de zèle, de promptitude pour que partout dans le pays la vie des affaires continue.

 L’atelier du Timbre

C’est dans les locaux de la gare de Bruxelles-Nord qu’il fonctionna d’abord, de 1848 à 1868, date à laquelle il fut transféré à Malines.

L’emploi de la typographie est limité aux petites valeurs ainsi qu’aux cartes postales, aux cartes-lettres, aux enveloppes-avion et à certaines valeurs imprimées pour le compte d’autres départements.

La taille-douce est utilisée pour les timbres à caractère artistique. Ce procédé, qui déjoue le mieux les tentatives de falsification, produit des timbres d’une finesse de trait, d’une richesse de tons, d’une vigueur et d’un relief remarquables ; il exige la collaboration d’un artiste graveur d’une rare compétence.

L’héliogravure (procédé plus rapide) est employée pour les émissions urgentes et pour la reproduction fidèle de certains sujets : tableaux, portraits, œuvres d’art, etc..

 Bruxelles X

Depuis l’achèvement de la Jonction un nouveau centre national de triage est installé dans la gare de Bruxelles-Midi sous le nom de Bruxelles X.

C’est un ensemble ultra-moderne, mécanisé au maximum, et dans lequel toutes les manipulations sont pratiquement supprimées. Tout l’ensemble est conçu de manière à pouvoir être complètement automatisé dès que les progrès techniques le permettront.

Après Londres, Bruxelles X est devenu le plus important centre de tri postal d’Europe.

La table rotative de Bruxelles X accomplit simultanément un rôle de concentration et de répartition des envois postaux. Ceux-ci, groupés en sacs dans les diverses sections (envois enregistrés, correspondances ordinaires, correspondances pour l’étranger, correspondances pour l’agglomération bruxelloise, imprimés, colis) sont amenés par l’entremise de glissières et d’autres transporteurs mécaniques sur un plateau circulaire tournant. – Du centre de ce plateau un agent les dépose sur des pistes d’acheminement notamment vers le quai aux camionnettes et vers les quais de la gare. – Ecrans de télévision, voyants lumineux font en sorte que dans cette partie de leur « expédition » les envois ne sont pas livrés à eux-mêmes.

 Les bureaux ambulants

Le premier bureau ambulant fut créé, à titre d’essai, en 1840. Dix ans plus tard, le service ambulant était établi définitivement sur différentes lignes de chemin de fer.

La Poste possède maintenant un parc de 33 voitures aménagées en bureaux de tri postal, dans lesquels travaillent 225 agents qui trient et répartissent, à un rythme accéléré, les envois qui leur sont confiés.

Chaque nuit une vingtaine de ces voitures, véritables ruches au travail, sillonnent le pays tout entier couvrant près de 2.000 km. Elles acheminent journellement 150 tonnes de courrier [3].

Les bureaux ambulants tiennent un rôle essentiel dans le trafic postal. Bien que leurs « concurrents » – les bureaux de tri sédentaires – fassent appel aux moyens de transport toujours plus rapides, les ambulants résistent avec une vigueur telle qu’ils demeurent les artères indispensables de la poste aux lettres.

Dans un bureau ambulant il n’y a pas de place... pour le repos.

 La motorisation

Les facteurs des postes forment l’effectif le plus nombreux du personnel. Ils ont aussi la fonction la plus pénible. La motorisation soulage leur travail là où les distances à parcourir et les poids à transporter sont importants.

En milieu rural, un nombre de plus en plus grand de facteurs se déplacent maintenant en camionnettes légères. Le conducteur, après avoir déposé ses collègues dans les villages, effectue la distribution dans les lieux éloignés et peu denses.

En milieu urbain, la motorisation de la levée des boites aux lettres est déjà ancienne ; le courrier pondéreux et celui des grosses firmes sont livrés par de petits véhicules automobiles. Un car spécial peut soit transporter confortablement 16 facteurs avec leur charge, pour les déposer sur le lieu de travail, soit être utilisé comme fourgon de 2.800 kg.

Les courriers postaux bénéficiaient jadis sur les routes de la priorité absolue et obtenaient le passage par la sonnerie du cornet.
Les camionnettes légères actuelles, moins libres dans leurs déplacements, en gardent l’emblème sur leurs portières, peut-être avec un peu de nostalgie.
C’est cela la Poste, et la mission qu’elle remplit est vitale pour la vie économique, sociale et culturelle du pays.
Quelques Chiffres :


  • Plus de 2300 millions d’envols traités par an, environ 4.500 par minute.
  • Plus de 3 200 milliards de francs en opérations financières, dont 90 % représentent le montant des opérations effectuées sans emploi d’espèces par l’Office des Chèques postaux.
  • 62 milliards inscrits sur les livrets d’épargne immatriculés dans les bureaux de poste.
  • Plus de 9 millions d’abonnements aux journaux.
  • Plus de 7 milliards de valeurs vendues en timbres fiscaux.
  • Près de 25.000 agents ; plus du tiers de l’effectif total des départements ministériels.
  • Plus de 2.650 bureaux répartis sur tout le territoire.

Source : Le Rail, octobre 1960


[1« Poste », créé en 1475, a d’abord signifié « relais de chevaux », puis, par extension, « transport public des correspondances » – « Postal » et « postier » datent du XIXe siècle seulement.

[2Les Tour et Taxis (prononcez tassis) étaient membres d’une famille lombarde, les della Torre-Tassis. François de Taxis, le plus illustre, avait sa résidence à Bruxelles, rue Bodenbroeck.

[3En plus de la remorque des trains ambulants, le chemin de fer transporte la majeure partie du courrier postal, acheminant par les trains ordinaires de jour et de nuit plus de 6.140.000 sacs dans le cours d’une année. Notons que la première réglementation des relations entre la poste et le rail date de 1837 déjà.