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Les métiers du Rail : pas un rivet ne lui échappe... (16)

R. Danloy.

mercredi 7 novembre 2018, par rixke

Francis exerce la fonction de préparateur-chronométreur au service de l’Infrastructure et, plus précisément, dans le domaine de la signalisation. Il s’occupe en effet de l’approvisionnement en matériel des électromécaniciens qui composent les brigades de travaux de Namur, Jemelle et Arlon, sans oublier celui des ajusteurs formant une autre brigade, située à Libramont. Quand il le faut, il n’hésite pas non plus à dépanner les arrondissements de l’ancien groupe de Namur. Cela représente un territoire très vaste si l’on sait que du nord au sud, il va de La Hulpe à la frontière grand-ducale et, d’ouest en est, de Jemeppe-sur-Sambre à Amay.

Son service débute à 7 h 30 mais notre collègue arrive à son bureau le plus souvent avec un quart d’heure d’avance. Il a pour cela une excellente raison. En effet, nombre de travaux - tels que la pose de câbles ou l’installation de signaux - sont confiés par la SNCB à des entrepreneurs extérieurs. Il arrive fréquemment que ceux-ci aient besoin de matériel et lui téléphonent, tôt dans la matinée, avant de commencer le travail. Notre collègue dresse alors la liste de ce qui leur est nécessaire et la communique au magasinier. Ce dernier accompagne ensuite l’entrepreneur à Ronet pour y prendre le matériel qu’il a demandé et le lui remettre.

Toutes ces fournitures sont entreposées à plusieurs endroits. Francis m’explique que Ronet abrite les grosses pièces tandis que les petites sont stockées à Gembloux et les boulons à Namur. Et de poursuivre : « A ce propos, un wagon de matériel est justement arrivé à Gembloux, ce matin ». Il faut donc comparer les bordereaux avec la marchandise afin de voir si tout concorde bien et ranger celle-ci. Le magasinier s’en chargera car cela va lui prendre environ une semaine et Francis manque de temps pour se rendre sur place.

Il est vrai que le suivi des fiches accompagnant les relais de sécurité utilisés dans les appareillages de signalisation constitue une bonne part de ses activités. De fait, ces fiches sont en quelque sorte la carte d’identité des relais et elles doivent constamment être mises à jour. Francis vient également de recevoir des brigades d’électromécaniciens la liste des relais que ceux-ci ont posés. Il remplit les cartes respectives de tous ces relais puis il les enverra à la mécanographie. Après un rapide coup de téléphone au menuisier pour lui rappeler qu’il doit remplacer la porte d’une loge d’un passage à niveau, il accueille Jacky, un sous-chef de secteur technique de la brigade de Namur, qui vient passer une commande d’outillages divers : pointeaux, limes, lunettes pour meuleur, etc. Francis consulte son impressionnante nomenclature et invite son interlocuteur à lui préciser le type exact de matériel qu’il désire. Après quoi, il remplit le formulaire ad hoc. Comme il doit effectuer plusieurs commandes, il utilise des formulaires différents selon le type de besoin, m’expliquant qu’il s’adresse à Roulers s’il faut des caniveaux en béton, à Salzinnes pour ce qui est de la quincaillerie, à Malines s’il s’agit d’outillage et à Etterbeek pour le gros matériel de signalisation La sonnerie du téléphone retentit. C’est un électromécanicien qui désire lui aussi obtenir du matériel. Francis en dresse la liste et la communique au magasinier qui s’occupera de la fourniture. Ensuite, à l’aide des fiches rentrées par ce dernier, il met à jour son inventaire du stock car il ne faut rien laisser au hasard si l’on veut s’épargner les recherches ou éviter de tomber à court !

Mais le courrier vient d’arriver et Francis s’emploie à l’ouvrir. « Tiens, aujourd’hui, me dit-il, il n’y a pas de plans de chantiers ». Or, c’est en fonction de ces plans qu’il commande tout ce qui sera nécessaire à la réalisation des travaux. Ainsi, pour chaque chantier, il établit un devis en ce qui concerne le matériel et la main-d’œuvre et il l’expédie plus tard au « bureau M » pour vérification.

Un coup de téléphone à nouveau : c’est un second électromécanicien qui réclame des tarauds et des filières. Décidément, c’est le jour des commandes spéciales ! Et voilà Francis replongé dans sa documentation, détaillant au bout du fil les caractéristiques des différentes sortes de tarauds et filières !

Cette nomenclature ! C’est vraiment l’outil indispensable. Tous les articles y sont repris sous une numérotation spécifique et y sont décrits en long et en large. « Mais cela ne suffit pas toujours », ajoute notre collègue qui possède un précieux aide-mémoire qu’il a constitué lui-même pour éviter de devoir chercher de midi à quatorze heures quand il s’agit de trouver quelque chose de peu courant. « Ici, me confie-t-il, il existe aussi un petit côté »débrouille". Et notre homme a notamment réalisé un programme pour l’ordinateur, ce qui lui permet de trouver en un temps record certains renseignements dont il a besoin comme, par exemple, le calcul du coût des chantiers.

Et, justement puisque l’on en parle, restons un moment encore au rayon des « dépannages ». Francis dispose en outre de quelques imprimés du genre certificats de maladie ou demandes de facilités de circulation et autres documents d’utilisation fréquente qu’il envoie aux techniciens des diverses brigades quand c’est nécessaire. Mais, en plus des tâches que nous avons décrites, Francis fait en quelque sorte office d’antenne administrative, les malades devant s’annoncer chez lui afin qu’il puisse répercuter l’information auprès des centres médicaux dont ils dépendent.

Inutile de vous dire qu’une telle gestion requiert évidemment une excellente organisation et une tenue rigoureuse des écritures. Mais voici que la journée de Francis touche à sa fin et j’en profite pour lui poser une question qui me brûle les lèvres depuis un certain temps déjà.

Préparateur, d’accord mais chronométreur ? Là je ne comprends plus. Et de me répondre : « Vous savez, depuis que je fais ce métier, je n’ai encore jamais eu l’occasion de tenir un chronomètre en mains. Cet appareil devrait servir à chronométrer le temps qui est consacré à la réalisation de chaque travail, comme la pose d’un relais, par exemple. » D’où, cette ... appellation contrôlée...


Source : Le Rail, novembre 1993