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Les cheminots, artisans de la résistance

mercredi 4 décembre 2019, par rixke

Durant la Seconde Guerre mondiale, alors que la Belgique était occupée, les responsables de la SNCB se trouvèrent devant un fameux dilemme : remettre en état le réseau pour être en mesure d’assurer le ravitaillement de la population ou ne pas le restaurer de manière à contrarier l’effort de guerre de l’envahisseur. Ce fut l’occupant qui décida, s’emparant du contrôle des chemins de fer et abandonnant à notre Société le rôle d’exécutant. Cette situation inadmissible pour les cheminots, atteints dans leur amour-propre, ne put qu’inciter un grand nombre d’entre eux à gagner les rangs de la résistance au sein de laquelle ils accomplirent de hauts faits qui ont fourni quelques-unes des plus belles pages de l’histoire du patriotisme. Ainsi, rien que durant les six premiers mois de l’année 1943, on compta 290 attaques et sabotages de voies. Des boyaux de freins Westinghouse et des câbles de signalisation furent sectionnés, des aiguillages et des cœurs de croisement rendus inutilisables et l’on dénombra l’effondrement de six ponts ! Des cheminots de l’atelier de Cuesmes fabriquèrent même des bombes en secret pour faire sauter l’un ou l’autre édifice et immobiliser les convois. Ce ne sont là que quelques exemples parmi tant d’autres qui soulignent la bravoure des cheminots. Ceux-ci ont en outre su allier aux opérations « militaires » les missions à caractère humanitaire. Et l’épisode du « train fantôme » du 2 septembre 1944 — ce train de prisonniers qui, grâce aux cheminots belges n’arriva jamais en Allemagne — restera pour la postérité leur coup de maître ! Nombreux furent ceux qui reconnurent le courage des hommes du rail et les en félicitèrent comme en témoigne ce document que nous avons retrouvé.

Haut les cœurs, amis cheminots ! La phrase du ministre des Communications de l’époque a conservé toute sa raison d’être après tant d’années. L’homme a reçu en héritage le devoir de faire en sorte que les sacrifices accomplis par ses aînés ne l’aient pas été en vain. Pour la liberté de tous et pour que se perpétuent certaines valeurs, beaucoup se sont engagés dans un noble combat. Conscients des risques, ils ont souvent offert leur vie afin de contrer l’occupant. Il convient aussi de se rappeler que les réseaux ferrés, en formant l’UIC (Union internationale des chemins de fer), ont été les pionniers de la construction européenne. Unité et solidarité sont sans doute les mots qui servent le mieux à qualifier les cheminots. Ils sont certes un exemple à l’heure où de nouveaux dangers planent sur la société. Propos et actes racistes, doctrines extrémistes connaissent en effet une progression inquiétante et l’on est en droit de redouter qu’ils ne mettent en péril les principes fondamentaux de la démocratie et l’harmonie entre les nations...


Source : Le Rail, Décembre 1994