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La nouvelle imprimerie de la SNCB

samedi 4 septembre 2021, par rixke

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Qui ne lit les avis, qui ne remplit des formulaires, sortis les uns et les autres des ateliers de notre imprimerie ? Tous les cheminots, peut-on dire, y compris les pensionnés. Mais, parmi cette multitude, en est-il beaucoup qui savent ce qu’elle comporte et comment elle fonctionne ?

Et tout d’abord où est-elle située ? Depuis peu, elle a été installée à Bruxelles Petite-Ile, dans la partie sud du bâtiment de la gare. Voilà l’occasion de vous retracer brièvement son histoire et de vous exposer son organisation et les services qu’elle rend à la communauté ferroviaire.

 De l’Hôtel des Chemins de fer à Bruxelles Petite-Ile

Lorsque, en 1926, la S.N.C.B. fut créée, elle installa sa propre imprimerie afin de pouvoir assurer elle-même l’exécution des travaux urgents concernant la confection des formulaires, des brochures, des avis, des règlements et des publications diverses nécessaires à l’exploitation du réseau.

Les premiers ateliers furent installés dans les sous-sols de l’Hôtel des Chemins de fer, rue de Louvain, à Bruxelles. Ils se développèrent petit à petit, de manière à pouvoir répondre aux besoins en imprimés résultant de :

  • La nouvelle organisation administrative ;
  • La création de nouveaux services : (Service C, Service E.S., Services Sociaux) ;
  • La normalisation des formulaires et la centralisation des travaux d’impression, qui éliminèrent les commandes que les services extérieurs passaient à l’industrie privée pour leurs multiples imprimés spécialisés.

Après la libération de notre pays, l’imprimerie réorganisa ses ateliers, qui avaient été, pour plus de la moitié, réquisitionnés par l’occupant pendant les hostilités. A mesure des possibilités financières, de nouvelles presses modernes ont été substituées à celles qui avaient atteint la limite d’usure. La modernisation du matériel permit de doubler la production, et l’imprimerie s’est vu confier un travail nouveau : l’impression de la presque totalité des titres de transport [1].

Parce que, depuis sa création, notre imprimerie s’est maintenue à l’avant-garde du progrès en modernisant son matériel et en adaptant ses méthodes de travail, elle peut répondre aux demandes des services dans des délais de plus en plus courts à des prix de revient de plus en plus bas. Elle le peut d’autant plus maintenant que ses ateliers sont transférés à Bruxelles Petite-Ile, dans des locaux, entièrement remis à neuf, dont l’aménagement a amélioré les conditions de travail et de productivité.

 Des aménagements à la page

Le bâtiment est ancien, mais les services des directions V. et E.S., qui ont collaboré avec la direction M.A. aux études pour le nouvel aménagement des locaux, ont réalisé un ensemble rationnel, en réservant une attention spéciale à ce qui touche à l’hygiène et au confort du personnel.

Des précautions particulières ont été prises pour éviter la diffusion de poussières de plomb dans l’atmosphère :

  • Des cloisons largement vitrées séparent des autres locaux ceux qui sont utilisés pour la composition ;
  • Partout, l’air est régulièrement en partie renouvelé, en partie purifié au moyen de filtres ;
  • Pour le nettoyage des casses des typographes, on utilise des aspirateurs spéciaux qui retiennent les poussières de plomb.

Toutes les grosses machines sont montées sur des isolants qui absorbent le bruit et empêchent les vibrations de se communiquer au pavement et, partant, à tout le bâtiment. Des salles spécialement insonorisées isolent les machines les plus bruyantes (fondeuses - composeuses monotypes, par ex.).

Le papier ne se travaille économiquement que dans des conditions bien définies de température et d’humidité de l’air ; aussi les installations de chauffage et de climatisation des locaux sont-elles commandées automatiquement, de jour et de nuit, par des appareils de mesure.

Les lavoirs, les vestiaires et le réfectoire peuvent rivaliser avec les installations les plus modernes. Chaque ouvrier dispose de deux armoires-vestiaires, une pour ses vêtements de ville, l’autre pour ses vêtements de travail. Des sèche-mains électriques remplacent les essuie-mains. Des caisses hermétiquement fermées protègent les récipients pour les boissons.

Les murs et les plafonds peints dans des tons clairs et chauds contribuent à améliorer l’éclairage et rendent l’ambiance plus agréable.

Cette atmosphère de confort et d’hygiène prédispose le personnel à respecter les mesures imposées dans l’intérêt de leur santé.

 L’organisation générale

En fait, l’imprimerie est un atelier où l’on transforme des matières premières (papiers, encres, manuscrits ou autres documents de base...) en produits finis (formulaires, avis, règlements, brochures, etc.) dans la présentation requise et au nombre d’exemplaires demandés, grâce à des moyens de reproduction divers.

Pour remplir son rôle, elle est dotée de nombreux services, qui vont du service des approvisionnements à celui de la comptabilité, en passant par les ateliers de fabrication et les services d’appoint (dessin, entretien et réparation, duplication, plastification, reproduction des plans, commandes à l’industrie privée, étude des temps, dactylographie, magasin, etc.). La place nous manque pour décrire toute l’organisation ; aussi limiterons-nous notre propos à ce qui concerne la transformation des commandes dans nos ateliers par les procédés d’imprimerie proprement dits.

 La préparation du travail

Chaque jour, l’imprimerie reçoit en moyenne plus de septante commandes, dont ± 27 concernent des travaux à exécuter par les procédés d’imprimerie proprement dits [2].

Pour ceux-ci, le « bureau de préparation du travail » détermine :

  • L’ordre logique des opérations ;
  • Le procédé d’impression à utiliser (typographie ou photozincographie) ;
  • Les types des machines qui interviendront dans la composition des textes et des tableaux (soit les machines à lignes blocs, soit les monotypes) ;
  • Le format des presses à utiliser ;
  • La quantité, la qualité et la couleur des papiers à mettre en œuvre ;
  • Le mode d’impression (recto ou recto-verso) ;
  • Le genre de numérotation et de perforation ;
  • Les travaux de brochage à exécuter (plier, assembler, intercaler, coudre, coller, agrafer, couper...) ;
  • Les temps d’exécution.

Les dossiers des commandes ainsi préparés sont transmis au bureau de planning.

 Le planning

C’est à celui-ci qu’incombe ensuite la mission de prendre en charge les commandes préparées, de distribuer le travail à l’atelier et de le suivre de façon à assurer une utilisation rationnelle des moyens de production et à respecter les dates de fourniture mentionnées aux bons de commande.

 La composition

La composition peut se faire à la main ou à la machine (composition mécanique).

Pour les textes et les formulaires qui seront reproduits par le procédé photozincographique, on établit des clichés en papier transparent soit à la machine à écrire, soit à l’encre de Chine, soit encore en typographie.

Pour l’impression typographique, la composition s’effectue sur deux types de machines :

  • Les machines à lignes blocs (linotypes ou intertypes).
    L’opérateur actionne un clavier comparable à celui d’une machine à écrire. La frappe des touches du clavier provoque la chute de matrices et leur alignement devant un moule à fondre. Quand la ligne est entièrement composée sur la longueur (justification) déterminée, elle est fondue d’un seul bloc. Les corrections dans une ligne entraînent donc la recomposition et la refonte entière de la ligne fautive, quelquefois même des lignes qui suivent.
  • Les machines « monotypes ».
    La composition se fait sur un clavier, semblable à celui des linotypes, dont le but est de perforer une bande de papier enroulé sur une bobine. Cette bande de papier, comparable à celle d’un piano automatique, mais beaucoup plus petite, est placée sur une « fondeuse-composeuse », où elle commande, à l’aide d’air comprimé, la position d’un châssis contenant des matrices, dans lesquelles sont coulés un à un les caractères, qui s’alignent et se mettent à longueur automatiquement.

Les corrections sont beaucoup plus simples dans les compositions monotypes que dans les compositions à lignes blocs : elles n’exigent le plus souvent que le remplacement de lettres ou de mots au lieu de lignes entières.

 La correction des épreuves

Pour s’assurer de la conformité de la composition avec les modèles et les textes, mais aussi avec les règles de l’art typographique, une épreuve du travail de composition est soumise aux correcteurs, qui signalent les erreurs au moyen de signes conventionnels appelés « signes de correction ». Ce n’est qu’après la rectification de la composition et l’établissement d’une seconde épreuve que le « bon à tirer » peut être donné.

 L’imposition

On arrive ainsi à la dernière partie de la composition : elle consiste à disposer plusieurs pages de caractères mobiles, de lignes blocs ou de clichés sur une table spéciale, appelée « marbre ». Elles y sont serrées dans un châssis (ou « forme »), de telle sorte que la pagination soit respectée après l’impression et le pliage. On impose en in-folio (4 pages à la feuille, 2 par forme), in-quarto (8 pages à la feuille, 4 par forme), in-octavo (16 pages), in-douze, etc.

 L’impression

L’atelier possède différents types de presses adaptées aux formats et au nombre d’exemplaires à tirer.

Les presses typographiques peuvent produire jusqu’à 4.000 exemplaires à l’heure. Les presses photozincographiques [3] atteignent des vitesses allant jusqu’à 6.000 ex. à l’heure.

Les imprimés sortent le plus souvent de presse sous forme de grandes feuilles imprimées recto ou recto-verso. Leur parachèvement exige plusieurs opérations dont le nombre varie suivant la présentation : formulaires libres ou brochures.

C’est dans la section de brochage qu’interviennent les perforeuses, les plieuses, les tables tournantes d’assemblage, les agrafeuses à fil métallique, les couseuses au fil de lin, les encolleuses de couvertures, les rogneuses, etc.

 L’expédition

Les imprimés sont ensuite envoyés au dépôt central ou aux autres services destinataires en paquets de 500 ou de 1.000 exemplaires, munis d’étiquettes mentionnant :

  • Le numéro de l’imprimé ;
  • Le nombre d’exemplaires, la ou les langues de l’imprimé ;
  • Le mois et l’année de la fourniture.

La normalisation des paquets permet un stockage facile avec encombrement réduit.

L’organisation de l’imprimerie est continuellement adaptée à l’évolution de nos chemins de fer et à celle des techniques graphiques. Ses ateliers sont capables d’exécuter avec soin et dans les délais les plus réduits les nombreux et divers travaux qui leur sont confiés.

Si la qualité des travaux de l’imprimerie est appréciée, on le doit aussi à la conscience professionnelle et au dévouement d’un personnel qui, à tous les échelons et dans toutes les sections, apporte avec ardeur sa contribution à l’œuvre d’ensemble des cheminots.


Source : Le Rail, octobre 1960


[1L’A.C. Malines, qui était chargé de ce travail depuis les origines du rail, ne fabrique plus que quelques tickets en carton du type « Edmonson », principalement pour les voyages gratuits, les transports de la Défense nationale et le service international.

[2Plus ou moins 22 commandes sont à exécuter en duplication ; plus ou moins 24 par l’atelier pour la reproduction des plans.

[3Le procédé appliqué dans ces presses est appelé « planographie » par opposition à la typographie et au procédé par gravure, qui impriment respectivement sur relief et sur creux. La « planographie » a pour base la répulsion des corps gras par les surfaces humides. Les clichés transparents sont remis à un transporteur sur zinc, qui les reporte sur une ou plusieurs plaques de zinc préalablement enduites d’une solution sensible. Ces plaques sont ensuite montées sur une presse appropriée pour la reproduction sur papier.