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Isolation thermique et acoustique des voitures

W. van Rijn, ingénieur principal.

mercredi 13 avril 2011, par rixke

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Ecrans.

Les vibrations sonores aériennes doivent être absorbées par des écrans de matières fibreuses ou poreuses telles que la laine de verre, la laine minérale, les fibres d’amiante, les résines synthétiques expansées ou agglomérées. La plus utilisée est la laine de verre, qui présente l’avantage d’être légère et d’avoir un très faible coefficient de transmission thermique. Pour assurer une bonne tenue de ce produit et lui donner plus d’élasticité, on choisit la variété superfine bakélisée à longues fibres (2 microns de diamètre et 20 à 50 cm de long). On se contente généralement de densités variant entre 8 et 50 kg/m³.

Au point de vue thermique, l’air lui-même est un excellent isolant à condition qu’il séjourne en couches minces dans lesquelles aucun courant de convection ne peut naître. Toutes les matières poreuses ou fibreuses sont donc susceptibles d’être de bons isolants thermiques. Il en est ainsi de la laine de verre. D’autres matières, telles que les fibres d’amiante, les grains de liège agglomérés avec un liant approprié et les mousses synthétiques, offrent de bonnes propriétés thermiques alliées avec d’intéressantes qualités d’isolation acoustique.

Dans ce qui précède, il a déjà été fait allusion au rôle important des fenêtres dans les déperditions calorifiques et dans la pénétration du bruit. Il est donc particulièrement indiqué d’utiliser des vitrages doubles dont les écrans réduisent notablement ces inconvénients. En outre, il y a lieu de construire les châssis de telle manière que leur partie ouvrante ne s’engage pas dans une fouille pratiquée dans la paroi du véhicule, car on réduit d’autant les possibilités d’isolation de cette paroi.

D’autres mesures peuvent avoir une influence déterminante. Il ne suffit donc pas d’appliquer des isolants aussi bien que possible pour obtenir une isolation thermique et acoustique efficace, il faut encore veiller à une conception convenable de toute la construction.

 En résumé.

On peut résumer comme suit le programme d’isolation thermique et acoustique à réaliser :

  1. Atténuer la transmission directe des vibrations, depuis la roue jusqu’à la caisse, en interposant des éléments élastiques d’amortissement partout où cela est possible ;
  2. Couvrir l’ossature et les tôles de la caisse d’un produit antivibrant ;
  3. Y superposer une couche de matière qui soit à la fois absorbante acoustiquement et isolante thermiquement. Si le produit antivibrant procure déjà un résultat appréciable à ces deux points de vue, cette dernière couche peut être réduite et même, dans les cas moins importants, être supprimée ;
  4. Placer une deuxième couche d’absorption contre le revêtement intérieur ;
  5. Eviter les ponts thermiques et acoustiques : placer des fourrures en bois ou, mieux encore, des intercalaires appropriés tout au long des supports du revêtement intérieur et veiller à la continuité parfaite de toutes les couches isolantes ;
  6. Terminer le garnissage intérieur par des revêtements absorbants (tapis sur le plancher, velours sur les sièges, etc.) ;
  7. Veiller à la bonne étanchéité des portes et fenêtres ; disposer éventuellement des chicanes aux ouvertures indispensables ;
  8. Enrober et isoler les canalisations métalliques qui pénètrent dans la caisse ;
  9. Suspendre élastiquement tous les organes qui sont susceptibles de transmettre des vibrations (ventilateurs, compresseurs, etc.).

 A la S.N.C.B.

En tenant compte de ce programme, l’isolation de la caisse des voitures a voyageurs de la S.N.C.B. est actuellement réalisée suivant le schéma de principe reproduit ci-contre. La tôle ondulée sous le plancher est recouverte d’une épaisse couche de liège granulé (ou éventuellement d’un autre produit) aggloméré avec un produit bitumineux. Après avoir été enduite d’une couche de peinture de protection, l’ossature de caisse et les tôles reçoivent une couche de produit anti-vibrant dont l’épaisseur est établie en fonction des caractéristiques de ce produit (généralement de 3 à 6 mm). Ensuite, un matelas de laine de verre superfine bakélisée est collé, sans interruption, sur tout le revêtement extérieur. Au plancher, ce matelas est éventuellement appliqué en double épaisseur. Les fourrures d’attache du revêtement intérieur sont garnies de plaques de liège plastifié ou de caoutchouc. Avant la pose du revêtement intérieur (plancher, parois latérales et plafond), celui-ci est recouvert, sur la face arrière, d’un nouveau matelas de laine de verre. Celui-ci est appliqué de telle manière qu’après la pose du revêtement, la couche ne présente aucune discontinuité ; elle est même pincée entre le revêtement et ses supports, Les attaches du revêtement, des sièges et des autres accessoires intérieurs sont en outre réalisées de telle manière que les ponts métalliques entre l’ossature et le revêtement intérieur soient évités au maximum. La photographie montre une telle réalisation qui permet d’obtenir, dans les compartiments, un niveau sonore inférieur à 6 sones (65 phones), c’est-à-dire environ un quarantième du bruit dans le bogie.

Dans les automotrices doubles électriques 1962 de la S.N.C.B., le niveau sonore a même pu être réduit à 2,6 sones (54 phones) dans les compartiments de première classe, c’est-à-dire, dans ce cas, à un soixantième du bruit dans le bogie.

Quant à l’isolation thermique, les essais effectués montrent que, par rapport aux voitures de construction plus ancienne, peu ou mal isolées, la consommation d’énergie de chauffage peut être réduite d’environ un tiers.

De tels résultats, joints aux améliorations apportées au système de chauffage, à l’éclairage, etc., permettent d’affirmer que le matériel à voyageurs construit au cours des dernières années par la S.N.C.B. peut être classé parmi les meilleurs des réseaux européens.

La vibration d’un corps solide provoque la mise en vibration des couches d’air environnantes. Il se crée ainsi des ondes de pression qui se propagent dans l’atmosphère. Quand elles atteignent l’oreille, elles influencent le tympan, qui enregistre ce que l’on appelle le son ou le bruit.

La sensation auditive créée par l’onde de pression varie d’après sa fréquence et son énergie. Il est facile de mesurer la fréquence : elle s’exprime par le nombre de vibrations par seconde, c’est-à-dire en Hertz (Hz). L’énergie de l’onde sonore peut être évaluée de différentes manières, par exemple en mesurant la pression quelle exerce par unité de surface. Mais de telles mesures n’ont pas de relation directe avec la sensation sonore réelle. C’est pourquoi l’on a imaginé le décibel (dB), qui définit le niveau de pression acoustique par rapport à un son-étalon (le plus faible qui soit audible) au moyen d’une relation logarithmique.

La sensation auditive dépendant d la fois de la fréquence et du niveau de pression acoustique, deux sons différents peuvent créer la même sensation auditive. C’est ainsi qu’un son de 100 Hz et de 68 dB donne la même sensation qu’un son de 1.000 Hz et de 50 dB. Il est donc nécessaire de pouvoir comparer directement le niveau sonore de deux sons en faisant usage d’une même référence : cette référence est la mesure en phones, qui désigne le niveau sonore que devrait avoir le son à la fréquence de 1.000 Hz pour provoquer la même sensation. Ainsi, les deux sons cités en exemple ci-dessus ont la même force sonore de 50 phones.

Une teille mesure présente cependant encore un inconvénient : elle n’est pas proportionnelle aux sensations. On en arrive finalement à une unité de mesure subjective qui correspond très sensiblement à la sensation physiologique réelle : le sone. Dans cette échelle de mesure, les valeurs de la sonie sont directement proportionnelles aux sensations physiologiques ; ainsi, un bruit de 64 sones est réellement deux fois plus important qu’un bruit de 32 sones.

Le tableau ci-dessous donne la correspondance entre l’échelle des phones et des sones et indique aussi le niveau de certains bruits bien connus de tous.

On voit, dans la partie droite de ce tableau, que le niveau sonore du bruit produit dans le bogie peut être voisin du seuil de douleur, c’est-à-dire de 256 sones.
Sones Phones
Avion à réaction 512 130
SEUIL DE DOULEUR 256 120 Bogie
Automobile de course, Chaudronnerie 128 110 Passage à niveau
64 100
Orchestre symphonique 32 90
Circulation urbaine 16 80 Compartiments à voyageurs
8 70
4 60
Voie normale 2 50
Appartement calme 1 40
Studio radiodiffusion 0,5 30
0,25 20
Chuchotement 10
SEUIL D’AUDIBILITE 0

Source : Le Rail, juillet 1965.