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Les débuts de notre réseau

J. P. (Liège)

lundi 28 juin 2010, par rixke

Nos premières locomotives sont minuscules à côté des « Pacific » actuelles... Quelle disproportion aussi entre les premiers rails de 4 m. 57 de long, d’un poids de 90 kg., et les rails actuel de 54 m. et d’un poids de 2.700 kg., dont le déplacement demande l’intervention d’une forte équipe !
Pourtant, ces éléments désuets ont constitué l’origine de l’invention la plus spectaculaire qui révolutionna littéralement le XIXe siècle.
Dès leurs débuts, nos chemins de fer ont pris la tête des moyens de transport. Ils furent les premiers à s’adapter à l’ère industrielle, et leur suprématie se confirma au cours des années, parce qu’ils suivirent le rythme des besoins économiques.

 Nos premières locomotives

Le « Moniteur » publie, le 1er mai 1834, la loi décrétant la constitution du réseau belge. Le lendemain - remarquez ta célérité de l’époque - l’Etat commande trois locomotives aux ateliers de constructions Stephenson à Newcastle ; ces machines, livrées dans les premiers mois de 1835 et payées une trentaine de mille francs, inaugurent le 5 mai la section de Bruxelles à Malines. En 1835, Stephenson et Cockerill (à Seraing) reçoivent deux nouvelles commandes de quatre locomotives. Trois ans plus tard apparaît un nouveau constructeur, Régnier Poncelet, fondateur des ateliers Saint-Léonard, à Liège, suivi en 1839 par Meeus-Brion, de Bruxelles.

La gare de Mons en 1838.

Quels délais, croyez-vous, sont nécessaires pour construire les premières machines ? Deux des quatre locomotives commandées à Stephenson le 10 février 1835 sont déjà mises en service, l’une en juillet, l’autre en août de la même année. Les quatre unités commandées à Seraing à la même date sont livrées : l’une le 30 décembre 1835 - la seconde en mai, la troisième en juin et la quatrième en novembre 1836.

La gare de Braine-le-Comte à la même époque.

Toutes les locomotives du début portent un nom. Les six premières, fournies par Stephenson, sont baptisées : la Flèche, l’Eléphant, Stephenson, la Rapide, l’Eclair, Hercule. Les machines construites en Belgique s’appellent le Belge, l’Anversoise, l’Escaut, Bayard, la Superbe. D’autres portent des noms historiques : Pépin de Landen, Charles-Quint, Marie-Thérèse ; des noms d’artistes ou de savants : Grétry, Rubens, Van Helmont, Juste Lipse ; quelques noms de femmes : Maria, Héléna, et un nom anglais ravissant : Firefly (mouche de feu).

La puissance de ces locomotives est inférieure à celle des machines actuelles des chemins de fer vicinaux. La « Fusée » de Stephenson ne comporte qu’un seul essieu moteur et un essieu porteur ; son poids total est de 4,25 tonnes et sa puissance, de 25 chevaux seulement.

CARACTERISTIQUES LA FUSEE PACIFIC
Nombre d’essieux porteurs 1 2
Nombre d’essieux moteurs 1 3
Poids total 4,25 T. 126 T.
Puissance 25 chevaux 3.187 chevaux
Longueur 8 m. 25 m.

 Nos premières voitures

En 1835, la construction des voitures est assez malaisée. Aucun atelier à même de s’occuper de ce genre de fabrication n’existe dans le pays. Aussi s’adresse-ton à des carrossiers spécialisés dans la construction des diligences ; ils fabriquent les caisses des véhicules ; les voitures conservent les formes et les noms des berlines et des chars à bancs circulant sur les grand-routes.

On fait venir d’Angleterre des modèles de roues, de plaques de garde, de ressorts, etc... et on en confie la fabrication, à. quelques spécialistes belges. C’est alors qu’un atelier de montage, de garnissage et de peinture est créé à Malines.

 La voie et les installations

Pour poser immédiatement la voie et pour pouvoir remettre des modèles aux maîtres de forges belges, 200 tonnes de rails sont commandées en Angleterre. Ce sont des rails à un bourrelet, sans patin ; le dessous de l’âme est ondulé. Ils ont une longueur de 4 m. 57 et pèsent 20 kg. au mètre.

Nos premières gares ne sont guère plus importantes en étendue que beaucoup de nos gares vicinales. Jugez-en : la gare de Bruxelles Allée Verte comporte six excentriques ; celle d’Anvers, sept ; celle de Bruges, quatre ! Le nœud du réseau, Malines, où aboutissent les lignes d’Ostende, de Bruxelles, de Liège et d’Anvers, et qui de plus, est le centre des magasins d’approvisionnement, des ateliers de construction et de réparation, possède vingt et un excentriques...

Voulez-vous-une idée des dépenses en bâtiments de gares ? Les installations d’Anvers, Vieux-Dieu, Duffel, coûtent 232.000 fr. ; celles de Gand, Wetteren et Oudegem : 288.000 fr ; celles de Bruxelles et Vilvorde : 359.000 fr. Dans ces prix sont compris : le bâtiment des recettes, les hangars aux marchandises et, le cas échéant, les ateliers de locomotives et les remises aux voitures.


Source : Le Rail, juillet 1956